Les écrivains russes sont à l’honneur à Livre Paris du 16 au 19 mars 2018, et c’est une immense fête pour le livre.
Les écrivains russes sont à l’honneur à Livre Paris du 16 au 19 mars 2018, et c’est une immense fête pour le livre.
Le hasard fait parfois bien les choses. Le dernier roman d'Andreï Kourkov, écrivain ukrainien russophone, est en effet arrivé à point nommé puisqu'il a été publié en France quelques jours avant l'invasion de son pays par la Russie.
C'est à Mala Starogradivka, bourgade située dans une zone grise, sorte de no man's land à la frontière de l'Ukraine et du Donbass en proie aux combats opposant les séparatistes pro-russes aux forces militaires dépêchées par le gouvernement de Kiev, que vivent Sergueïtch et Pachka.
Ennemis depuis l'enfance, les deux hommes, proches de la cinquantaine, vont rapprocher leurs deux solitudes et s'entraider. Même s'ils ne sont pas d'accord sur le conflit, ils vont taire leurs divergences et faire un bout de chemin ensemble à coups de vodka plus ou moins frelatée.
Alors que l'écho de la guerre se fait plus insistant, Sergueïtch, apiculteur de son état, décide d'emmener ses ruches en Crimée, tout récemment annexée par Poutine, là où vit un confrère, Tatar de son état. Mais, partout où il se pose, l'œil de Moscou veille et la Russie entend bien faire marcher les populations des territoires qu'elle occupe au pas de l'oie.
Cette inexorable mainmise donne lieu à des scènes où les délires bureaucratiques atteignent des sommets d'absurdité.
Alors que l'homme ordinaire et un brin naïf qu'est Sergueïtch n'aspire qu'à vivre en paix avec ses abeilles, guérisseuses des corps et des âmes, et au plus près de la nature, il est confronté au rouleau compresseur russe qui lamine les populations, qui les force à fuir leurs maisons et qui éradique toutes les velléités des minorités de perpétuer leurs traditions.
À l'instar des Tatars de Crimée, éternelles victimes en raison de leur religion musulmane.
Si cette lecture est salutaire à l'heure où la Russie occupe par la force un pays souverain favorable à un rapprochement avec l'Europe, dont il est partie intégrante, je ne partage pas l'engouement général pour le dernier roman d'Andreï Kourkov. Probablement en raison de longueurs fastidieuses, de redondances, d'un manque de rythme et d'une écriture un peu simple. À l'image de son personnage principal dont le regard étonné en dit long sur la nature du gouvernement russe de Poutine et de ses affidés.
http://papivore.net/autres-litteratures/critique-les-abeilles-grises-andrei-kourkov-liana-levi/
« Ce hameau était déjà en « République populaire de Donetsk » mais il semblait désert . Il comptait cinq ou six maisons, pas davantage. Peut-être était-ce la raison pour laquelle Svetloïé continuait à vivre comme avant la guerre, ou presque. Il n’y avait à proximité ni séparatistes ni armée ukrainienne. C’est pourquoi personne n’était parti, à quelques exceptions près. »
Dans ce hameau de quelques maisons, Pachka et Sergueï vivent à l’écart du conflit. Ils sont en « zone grise », entre armée ukrainienne et séparatistes prorusses. Les combats se déroulent à distance, pas très loin cependant, les canonnades rythment les journées et les nuits. Si leurs avis divergent, ces deux-là n’ont guère le choix : ils doivent rester solidaires, et leurs désaccords animent les longues soirées.
Sergueï est apiculteur et entoure ses ruches d’une attention de père de famille aimant. Il lui arrive cependant de louer les services de ses ouvrières bourdonnantes à qui veut bénéficier de l’effet miraculeux d’une séance de sieste sur les ruches alignées.
Mais Sergueï veut offrir plus à ses compagnes mellifères. L’endroit n’est pas assez calme. Alors avec le printemps, Sergueï quitte sa maison avec son précieux convoi…
De frontières en contrôles, sur la route, Serguéï fera de nombreuses rencontres, tout à tour aidé et aidant, à la rencontre de son passé, qui resurgit là où il ne l’attend pas. Mais les abeilles seraient-elles les vecteurs involontaires d’un mal pernicieux ?
Ce roman s’est imposé comme une lecture solidaire alors que la guerre continue de décimer une population injustement attaquée. Mais cette volonté de soutenir ce peuple n’est pas juste une lecture en passant : on y découvre un auteur talentueux, qui nous conte une histoire envoutante, sans omettre le contexte politique, mais toujours en centrant le sujet sur ce que peut ressentir le peuple, représenté par le bon sens de Serguéï.
Les lecteurs sont quasi unanimes, et le roman ukrainien remporte un vif succès, bien mérité.
Traduction (Russe) Paul Lequesne
432 pages Liana Lévi 3 février 2022
L’apiculteur prend la route
Pour comprendre un pays il faut se pencher sur sa littérature. Andreï Kourkov, aujourd’hui réfugié dans l’ouest de l’Ukraine, vous en apporte une preuve éclatante avec Les Abeilles grises. Avec une plume subtile et pleine d’humanité.
Comme il le reconnaît volontiers lui-même, Andreï Kourkov n’aurait jamais imaginé en écrivant Les Abeilles grises que la guerre viendrait mettre un éclairage très particulier sur son roman. Lui qui est né à Leningrad, mais qui a grandi en Ukraine où vivait sa grand-mère, a fui Kiyv au lendemain des premières frappes de l’armée de Poutine pour trouver un refuge – très provisoire – dans l’ouest du pays où il poursuit son travail de résistance, stylo à la main. Le président du PEN Club ukrainien écrit, raconte, interpelle, traduit sans relâche.
Ironie du sort, c’est aussi dans cette région que part Sergueïtch, le personnage principal de son roman paru le mois dernier en France. Il raconte comment cet apiculteur tente de survivre dans cette zone du Donbass déchirée entre les séparatistes prorusses et les Ukrainiens devenue rapidement une sorte de désert, car presque tous les habitants ont fui, de peur d’être victime d’une balle perdue ou même d’un tir intentionnel à leur encontre. «Un coup de canon retentit quelque part au loin. Puis un autre une trentaine de secondes plus tard, mais comme provenant d’un autre côté. Quoi, ils dorment pas, ces abrutis? Ou c’est-il qu’ils ont décidé de se réchauffer? bougonna Sergueïtch, mécontent.»
Tout au long du livre c’est un réel plaisir de suivre les efforts de cet homme finalement aidé par Pachka, son ennemi. Car ce qui réchauffe le cœur et montre en creux toute l’absurdité de cette guerre, c’est la profonde humanité qui se dégage de leurs échanges. «Il le regardait et songeait que s’ils n’étaient pas restés les deux seuls habitants du village, jamais il ne lui aurait adressé de nouveau la parole. Ils auraient vécu ainsi parallèlement, chacun dans sa rue et chacun sa vie. Et jamais jusqu’à leur mort ils n’auraient eu d’autre conversation. S’il n’y avait eu la guerre.»
Non seulement, ils se parlent, mais ils vont finir par surmonter leur ressentiment et se comprendre.
La langue d’Andreï Kourkov, tout à la fois ironique mais qui ne peut se départir de la mélancolie de l’âme slave donne au quotidien de ce branquignol force et profondeur. À le suivre durant son odyssée vers l’ouest puis vers la Crimée, on ouvre avec lui les yeux sur les raisons de cette guerre – le matraquage de la propagande, la réécriture de l’histoire – on souffre avec les millions de déplacés, on partage leur souffrance. Mais on se nourrit surtout de deux mots qui pourraient sembler incongrus au vu de la situation, mais qui résonnent déjà comme une première victoire : espoir et poésie!
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Sergueïtch et Pachka sont les seuls habitants de Mala Starogradivka,ville du Donbass, entre le front ukrainien et séparatiste pro-russe. Ennemis un peu amis, par nécessité vitale ils s’accrochent à leurs habitudes et leurs maisons en espérant des jours meilleurs. Ballotés par des circonstances qu’ils subissent, ils nous font ressentir l’inanité de la guerre, et l’humanité qui les unit semble invincible. Sergueïtch décide un jour de partir pour sauvegarder la santé des abeilles de ses six ruches et ses pérégrinations lui offrent des rencontres diverses qui nous renseignent sur les habitants des lieux qu’il traverse et sur les dégâts causés par la prégnance de la présence russe, en particulier en Crimée vis à vis des Tatars.Le détachement apparent des protagonistes vis à vis des événements, la mise en valeur des femmes et des abeilles coulent agréablement comme du miel et permettent d’apprécier la couleur et la chaleur réconfortante et finalement optimiste de l’écriture d’Andreï Kourkov.
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