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Imaginez : vous êtes en vacances dans une station balnéaire, et lors d'une de vos journées de promenade dans la cité, à l'entrée d'une librairie, vous voyez - ou ne voyez pas - un homme assis devant une table de formica où trônent, à peine, quelques livres... Vendeur, démarcheur, manifestant ? Non, un auteur. Un auteur invité à présenter et dédicacer son dernier ouvrage, Nunca más. Seulement - il n'est pas très connu malgré plusieurs ouvrages à son actif (mais parus chez une petite maison d'édition) ; la bonne volonté des libraires n'a pas été poussée (pas de promotion : ni d'effet pile ni de photos, ne parlons surtout pas de médiatisation !), il s'agit surtout de créer une animation ; c'est la crise et son livre, 15 -, n'a que 108 pages ; et puis, il lui faut se l'avouer, son dernier ouvrage ne fait pas très «été» (une réflexion autour de la violence conjugale...). Il est abandonné à son triste sort alors pour contrer l'ennui - à la limite de l'invisibilité, de l'indifférence, sauf canine et enfantine -, il va occuper son temps : c'est vous qu'il regardera. Un récit léger (mais pas tant que ça) à l'écriture sobre et fine où l'auteur, observateur quasi blasé, dresse une chronique désopilante de ses contemporains en un lieu touristique.
Je voudrais partager avec vous un coup de coeur qui est, en fait, plus qu'un coup de coeur : c'est un coup au coeur, car le livre dont je vais vous parler fait partie des livres dont Kafka disait qu'ils brisent la mer gelée qui est en nous. Ce livre est un livre des éditions L'Escampette. C'est un livre d'Allain Glykos, qui s'appelle : Aller au diable. Et c'est un texte qui se campe au début du XXe siècle. Un jeune homme, relativement brillant bien qu'issu d'une famille modeste, va arriver à passer son baccalauréat, et le jour de la fête organisée par ses parents pour célébrer son baccalauréat, ce jeune homme va partir, va quitter sa famille et se mettre à marcher. Et là, le livre va nous emmener dans cette déambulation qui ne s'arrêtera bien entendu qu'à sa mort. Ce livre est absolument bouleversant. Je voudrais dire que c'est un texte qui, par la prose d'Allain Glykos, nous emmène dans une déambulation vertigineuse, absolument dramatique et qui nous fait voir, nous fait entrevoir l'animalité qui est en nous. Le héros, Antoine, et là, je reprends la quatrième de couverture du livre, «décide un jour de ne plus participer à la vie des hommes. Il rompt toutes les amarres. Il fut un jeune garçon intelligent, il veut désapprendre...». Et en fait, on voit là un peu cette fascination que peuvent avoir certains individus qui, abandonnant tout, essaient d'aller au plus profond de l'être humain, et l'être humain parfois révèle une animalité, une bestialité dont la littérature est bien entendu pleine. Il y a une phrase qui est un peu un leitmotiv dans ce court roman. Antoine répète à la pauvre femme qu'il a rencontrée et qui le suit dans ses déambulations, à chaque fois qu'elle lui demande : «Mais où vas-tu ?», il lui dit : «Je vais où je suis.» Et il y a également une phrase dans ce livre qui est absolument fantastique sur la déambulation qui est en fait la déambulation de tout homme dans la vie : «Il n'était que du pied qui se pose, oublie sa trace et jamais n'anticipe le morceau de terre ou de vase qui portera le pas suivant.» À la fin de cet ouvrage, on est absolument bouleversé parce qu'il a fait miroir sur les interrogations de tout homme qui pense un peu à sa vie. Et je dois dire que la recommandation que je donne à tous mes clients, c'est de lire ce livre d'une traite et de participer à cette déambulation qui nous laisse à la fin, à la dernière page, absolument épuisé. C'est un livre remarquable. Courez l'acheter !
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