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La chronique #7 du Club des Explorateurs : "India Express" de Constantin Simon

A la découverte des dessous du journalisme...

La chronique #7 du Club des Explorateurs : "India Express" de Constantin Simon

Lancé en janvier 2015, le Club des Explorateurs permet chaque semaine à deux lecteurs de lire en avant-première un même titre que nous avons sélectionné pour eux et de confronter ainsi leur point de vue.

Cette semaine, Stéphane a choisi Anne-Marie pour partager sa lecture et son avis sur le livre India Express, de Constantin Simon (Le Passage).

 

L'avis de Stéphane

Pierrot, jeune reporter, qui s’ennuie un peu et veut échapper à une carrière ennuyeuse du côté de Bourg-en-Bresse, sa ville d’origine, est contacté par Béatrice Astruc, une journaliste de l’audio-visuel, confirmée et reconnue de ses pairs. Elle lui propose une mission au Sri Lanka, et l’associe à ses reportages comme journaliste d’image. Il accepte, car la perspective d’échapper à la routine l’emporte. Pourtant, au cours de leurs missions, Pierrot va rapidement déchanter : l’éthique journalistique de Béatrice Astruc est des plus douteuses, des plus incertaines : il y apprend comment vendre un sujet, comment le trouver, comment tourner le sujet…

A ceci près que les reportages tournés par exemple sur des trafiquants de drogues, des talibans (sont-ils réels ?), des commissaires de police qui se targuent de mener une lutte sans merci contre les pauvres paraissent à Pierrot bien artificiels, passablement insincères, et empreints d’une fausseté insupportable. Il décide donc de voler de ses propres ailes, de s’affranchir de la tutelle, devenue bien pesante, de Béatrice Astruc, et se met à son compte.

Au cours de reportages effectués en particulier lors de la catastrophe de Fukushima, il découvre, avec la complicité décisive de Maya, une danseuse japonaise rencontrée lors d’un précédent reportage, la dignité des Japonais, leur stoïcisme, leur caractère impénétrable. Cela le frappe, lui, l’homme de l’image habitué à exposer ses sujets jusqu’à la limite de l’intimité. Il modifie sa pratique du journalisme d’image, s’oriente vers plus de sincérité, d’authenticité, de vérité : « Ce que je m’avouais maintenant sans détour : le ridicule de mon métier. Les images que je filmais n’étaient plus des images mais des messages, esclaves d’une information. Elles n’exprimaient rien en elles-mêmes, elles étaient muettes, prisonnières d’une autorité supérieure qui avait divisé le monde en deux catégories : d’un côté les victimes, les « gentils », qui n’avaient droit qu’à geindre ; de l’autre les coupables, les « méchants », à qui je collais une pancarte et que j’introduisais par une musique bien dramatique. »

Plaisante par l’ironie mordante qui transparaît de manière omniprésente dans le récit, cette plongée dans les pratiques d'un certain journalisme audio-visuel me paraît être d'un intérêt pédagogique certain. J'étais déjà circonspect quant aux pratiques d'un journalisme sans cesse empêtré dans la course à l'actu, mais ce livre me rend plus que jamais vigilant et critique vis-à-vis des images vues sur les chaînes d'information continue.

Stéphane Bret

 

L'avis d'Anne-Marie

Pierre a un rêve, devenir grand reporter. Son diplôme en poche, il part pour une mission au Sri Lanka avec une journaliste expérimentée : Béatrice.  Expérimentée me paraît un bien grand mot, les missions sont peu préparées, on fait confiance un peu au hasard, Pierre qui n’a jamais tenu une caméra, le voilà cameraman. Beaucoup d’improvisation mais c’est cela qui fait le charme de ce livre, de l’humour malgré des sujets graves. Il le dit lui-même : « notre voyage ressemblait à un roman picaresque ; elle était Don Quichotte, moi son Sancho Panza. »

Il apprendra son métier à ses côtés, elle lui montrera comment trouver le reportage qui tiendra en haleine le téléspectateur français branché sur sa chaîne d’infos en continu.

Pierre pensait rentrer en France mais son destin, sa vie se fera en Inde, son pays d'adoption.

Un roman vif, des dialogues truculents avec des phrases courtes qui donnent de la rapidité au roman. On est avec eux, on tient la caméra, on court après le sujet qui les rendra peut-être célèbres. Il est vrai qu’à travers ce livre on a une image différente du métier de journaliste, il faut trouver par tous les moyens le sujet qui collera à l’actualité, celui qui leur permettra d’être dans la lumière, celui qui plaira au français moyen assis sur son canapé dans sa vie dénuée de toute aventure mais ne sommes-nous pas les demandeurs, nous voulons toujours plus d'images percutantes.

J’ai bien aimé même si ce n’est pas le genre de livre que je lis d’habitude, une belle découverte, je vous le conseille.

Anne-Marie Philippe

 

Merci à Stéphane et Anne-Marie pour ces chroniques passionnantes !

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