Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
Lors d'un voyage en Sibérie pour le tournage d'un reportage sur les camps du goulag dans la Kolyma, aussi nommée « route des ossements », l'auteur et son équipe remarquent une forme mouvante sur le bord de la route. Bravant une température de -50°C, ils vont à la rencontre de ce qui se révèle être un chat sur le point de mourir de froid. Cet animal affamé, épuisé et sauvage, ils décident de le baptiser Varlam, en hommage au grand écrivain Chalamov, rescapé des camps et auteur des Récits de la Kolyma. Ensemble, ils traversent la Sibérie, filment les vestiges des camps, les villages bâtis par et pour les zeks, recueillent les témoignages de spécialistes ou de survivants, marchent sur les traces de Chalamov.
« Bienvenue dans la ville la plus froide du monde ! » C’est ainsi que Vadim, dans un français parfait, accueille l’équipe de tournage, venue faire un reportage sur la Kolyma, « la route des ossements ».Ce sera leur guide.
Faire de la moto-neige par -50°C ne doit pas être une partie de plaisir ! Combien de temps aurait pu survivre le chaton abandonné qu’ils ont recueilli sur la route ? L’ équipe l’a baptisé Varlam en l’honneur du grand écrivain russe, moins connu, moins médiatique que Soljenistine car il est resté en Russie. Rescapé du Goulag, Varlam, de par ses écrits est une mine inestimable pour historiens ou néophytes passionnés de cette dictature rouge. Or donc, Varlam a survécu, ce qui n’était pas évident et a parcouru les milliers de kilomètres avec l’équipe, souvent caché à l’intérieur des doudounes.
Ce petit chat est le soleil du livre ; l’histoire de ce sauvetage pourrait être celle de l’auteur, parti en pleine tourmente personnelle.
Varlam Chalamov est le fil rouge de ce récit de voyage. Après lecture de son livre « Récits de la Kolyma », l’équipe part pour la Sibérie. Asia, jeune femme née en Sibérie et vivant en France les aide à déjouer les tracas administratifs si courants en Russie,
L’équipe de tournage peine à s’habituer au froid. Leur équipement grand froid ne résiste pas à moyen terme et pourtant…. « Chaque sortie vaut le coup, chaque prise de vue nous semble stupéfiante. Le paysage est à couper le souffle, surtout les couchers de soleil les plus beaux que j’ai jamais vus ».
Avec eux, je roule, ou glisse dans ces grosses voitures tout terrain, aperçois les restes des Goulags où sont emprisonnés ceux qui déplaisent au pouvoir, appelés Zeks. Ils devaient construire une longue route dans le froid, la boue, les moustiques sibériens alors que leur nourriture était des plus pauvres. Cette route porte également le nom de « Route des ossements » car nombre de Zeks y sont morts et enterrés sans autre forme de politesse sur le bas-côté (cela me fait penser à Convoi par Samarcande où de jeunes enfants ont été ensevelis sur le bord de la voie ferrée) . « L’inhumanité du Goulag ne se réduit pas à sa cruauté. Elle l’était plus encore du fait de sa gestion technocratique ». « Exécution Garanine » sur les politiques, liquidation des « crevards »… Tout ceci pour une seule raison économique : ne pas gaspiller les rations alimentaires auprès de ceux qui «n’en valaient pas la peine. »
L’on a beaucoup parlé, à juste titre, des camps nazis et de leurs atrocités. La même chose se passe en URSS ; par exemple, à partir de 1937, Grigori Loïssevitch, commandant du service médical « pouvait faire ses expériences directement sur des êtres humains, et non sur des lapins, ce qui a permis des avancées rapides et efficaces. On parle de ce genre d’expériences dans les camps de la mort nazis sans se rendre compte que des horreurs analogues étaient pratiquées au même moment à Moscou »
Comme souvent l’horreur côtoie quelque fois le beau. « Le goulag n’était pas qu’un lieu de mort. La vie artistique y était, paradoxalement, en ébullition. Il faut dire que s’y concentrait une somme invraisemblable de talents, peintres, musiciens, écrivains et dramaturges , venus des quatre coins de l’empire. »
L’équipe arrive à Cuba !! Non, non, c’est pure galéjade ou dérision car Kubume est le point le plus froid de la planète. Pourtant ils entrent dans un « restoroute » cabane en tôle lambrissée de lattes de bois où trois « mamas iakoutes » leur cuisinent des boulettes de viande et riz. Chalamov a vécu dans ce village aujourd’hui abandonné alors qu’il est en résidence surveillée et officie comme aide soignant.
Tomtor arrive avec son improbable hôtel et le musée des écrivains du Goulag. Ici, l’arrivée de Poutine n’est pas bien vécue « Il a complètement fermé le pays. A cause de son attitude, qui constitue à dresser le monde entier contre nous, on manque de tout et on ne peut plus voyager…. Les revenus du tourisme, qui n’étaient déjà pas bien élevés, ont chuté de 30 % depuis les sanctions économiques. Avant, il y avait des Américains qui venaient visiter la région…. Résultat, on ne les a plus vus depuis des années, et la Iakoutie n’a jamais été aussi pauvre qu’aujourd’hui ».
Ils rencontrent les Evenks, clan matriarcal d’éleveurs de rennes qui a choisi délibérément « une mise à l’écart volontaire de la civilisation qu’ils méprisent et avec laquelle ils refusent tout contact »
Ce livre est une leçon d’histoire réaliste, dense, fort bien documentée avec le récit des rescapés du Goulag resté sur place car les Zeks n’avaient plus leur place ailleurs. Je vois ce que Poutine veut dire en parlant de la dénazification de l’Ukraine. La description des paysages, des habitants est habitée par les silences ; Le silence du respect, celui des oubliés du nord, des paysages envahis par la neige. De temps à autre, une petite anecdote amusante déride.
La suite en suivant le lien : https://zazymut.over-blog.com/2024/09/michael-prazan-varlam.html
Ce récit est le "journal" d'un réalisateur de documentaire. De Iakoutsk à Magadan en passant par la « route des ossements », Michaël Prazan raconte son voyage en Sibérie. A ses côtés, on découvre les vestiges des camps, écoute le témoignage des survivants, remonte le temps de la période stalinienne jusqu’à la fermeture du Goulag en 1956, trois ans après la mort du dictateur
Il partage une mosaïque de séquences mémorables comme celle où il fait la rencontre inattendue d’un chat abandonné, transi de faim et de froid. Après l'avoir baptisé Varlam, en hommage au grand écrivain Chalamov, rescapé des camps et auteur des Récits de la Kolyma, il va l'adopter et le ramener en France. Jour après jour, il devient responsable pour toujours de ce chat russe apprivoisé, devenu à ses yeux unique au monde.
Mon avis en deux adjectifs :
Glacial. Contrée sauvage inhospitalière et Histoire démontrant ce que l'homme peut faire de pire.
Inspirant. Résilience des survivants et histoires montrant la grandeur des hommes qui assument leurs responsabilités.
C'est le récit d'une expédition dans une région de la Sibérie orientale que les russes appellent "l'enfer blanc" à cause du climat et de son histoire qui se confond avec celle du Goulag de la Kolyma. C'est le sujet du documentaire que réalise Michaël Prazan qui débarque avec son équipe à Iakoutsk après six heures de vol depuis Moscou sous des températures glaciales d'un mois de février. Ils s'apprêtent à partir sur les traces de ce Goulag à travers les ruines, les petits musées de bric et de broc qui jalonnent la route et bien sûr les habitants dont l'existence est marquée par ce passé récent. C'est une équipe qui se connait bien, avec notamment Asia, installée en France mais née en Sibérie et habile à résoudre les contretemps administratifs qui ne manquent pas de pimenter l'aventure. Asia dont l'adolescence a été éclairée par l’œuvre de Varlam Chalamov, écrivain déporté comme nombre d'intellectuels victimes de la politique de Staline, et qui, une fois libéré écrivit Les récits de la Kolyma, témoignage littéraire poignant et source d'étude pour les historiens. Un survivant, un miraculé. L'ombre de Chalamov plane sur ce voyage alors, quand sur la route gelée Asia fait soudain arrêter le véhicule qui les transporte pour secourir un petit chat blessé et à moitié mort de froid, l'évidence s'impose à l'auteur : on le prénomme Varlam.
C'est le récit d'une rencontre entre le présent et le passé, qui nous fait remonter le temps pour mieux comprendre l'histoire récente de la Russie à l'aune des politiques de terreur qui ont contribué à formater un territoire. Ceux qui étaient envoyés au Goulag, les Zeks étaient employés à construire la route dite "de la Kolyma" ou "des ossements" car elle se confond avec les restes de ceux qui mouraient à la tâche. Les témoignages des survivants, ceux des écrivains, ceux des témoins plus ou moins directs viennent peu à peu mettre en évidence la réalité du quotidien dans ces contrées hostiles. Le récit est dense, documenté, extrêmement fort car il respecte aussi les silences. On y sent la patte du réalisateur habitué à écouter, à regarder et à se laisser imprégner. J'ai appris énormément de choses et apprécié la mise en perspective proposée par l'auteur. Au milieu des ruines encore fumantes de cet enfer, quelle qu'en soit la couleur, suivre les progrès du frêle Varlam et la relation qui se noue peu à peu entre lui et Michaël Prazan fait figure de temps de respiration. C'est donc aussi le récit d'une rencontre improbable entre un homme qui n'aimait pas spécialement les chats et une bestiole qui lui prouvera le contraire. L'émergence de la vie parmi les ruines, le miracle renouvelé de la survie.
Un récit absolument remarquable, dont on ressent les conditions extrêmes, dont on ressort plus instruit et avec l'impression d'une meilleure compréhension des enjeux actuels, qui peut même donner envie de lire Chalamov et ses acolytes auxquels est dédié un "Musée des écrivains du Goulag" dans un petit village de la région. Comme le dit sa conservatrice "c'est grâce à eux si nous pouvons connaître la vérité sur ce qu'il s'est passé". Quant à Varlam le chat, rescapé de la route des ossements, il veille désormais sur la plume de celui qui témoigne à son tour.
(chronique publiée sur mon blog : motspourmots.fr)
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