Il n'est pas trop tard pour les découvrir... ou les offrir !
Il agrandit l'image jusqu'à ce qu'elle occupe tout le mur.
On dirait une église. Des veines comme des arcs porteurs, des cellules comme de hautes voussures. C'est très beau. Très beau et très étrange.
« Une cathédrale de pensées », dis-je dans un souffle.
Le Dr Scott pose sur moi son regard vairon. Comme si je devenais réel en cet instant même.
Son oeil froid se réchauffe.
Ensuite, il hoche lentement la tête. « Exactement, Samuel, dit-il, et il répète lentement : le cerveau est une cathédrale de pensées ».
Ils sont trois. Sam, l'enfant précoce doué de synesthésie, son père, Henri, qu'il n'a jamais vu, et Edwinna, le grand amour perdu d'Henri. Un accident les fait se retrouver à l'unité de réanimation d'un grand hôpital londonien. Chacun raconte cette rencontre impossible, aux confins de l'inconscient.
Depuis plusieurs mois, des connaissances me parlent élogieusement de « Si proche, si loin » de Nina George en m’incitant fortement à le lire au motif qu’il vaut le détour et qu’il m’enthousiasmera à coup sûr.
Au vu du synopsis qui me paraissait intéressant, des appréciations majoritairement positives lues çà et là, je me suis dit pourquoi pas ? Ce serait également l’occasion de découvrir une nouvelle prose. Cette auteure allemande étant une première pour moi.
Le 04 février 2019, cherchant un bouquin se lisant rapidement dans l'attente d'une lecture commune, le susnommé me parut idéal pour meubler ce temps.
Je me plongeais donc dans cette nouvelle aventure avec motivation, curiosité et surtout l'espoir de connaître quelques heures de plaisir.
L’ebook définitivement refermé, je concède volontiers que je me félicite d’avoir suivi ce judicieux conseil. Je me suis régalée. Emportée très tôt par l’histoire, impatiente de tourner les pages, j’ai compris que je ne la lâcherai pas jusqu’à son terme.
A travers ce récit, nous partageons l’expérience peu commune et dramatique de trois personnes très différentes, liées inextricablement les unes aux autres, qui se battent pour vivre, espérer et qui doivent faire face à des défis qui leur sont propres comme une lutte acharnée contre une mort annoncée, la perte de l’être cher ou encore la naissance du premier amour.
« Lui », c’est Henri. Il se retrouve dans le coma après avoir sauvé une petite fille de la noyade : il est fauché par une voiture au moment où il dépose l’enfant sur la terre ferme, et s’apprête à reprendre son chemin pour retrouver son fils.
« Elle », elle se prénomme Edwinna (Eddie pour les intimes). Elle lui rend visite tous les jours. Henri était l’amour de sa vie. Il y a de cela deux ans. Et puis plus rien. Et voilà qu’il refait irruption dans sa vie.
Le troisième protagoniste, quant à lui, s’appelle Sam. Treize ans. Ce jeune garçon, surdoué et synesthète, n’a jamais connu son père. Il le rencontre pour la première fois sur son lit d’hôpital, suspendu entre la vie et la mort, dans le monde des rêves, si près et si loin de lui. A son chevet, entouré des médecins, des infirmières et de Mrs Tomlin - l’ancienne amante -, il laisse libre cours à son imagination, et rêve lui aussi de la personne qu’aurait pu être son papa.
À force de veiller un vivant, leurs pensées vagabondent, délicieusement. A quoi songent-ils ? Comment surmontent-ils cette pénible et exigeante situation ? Qu’adviendra-t-il finalement ? Plongez-vous dedans, vous saurez.
Œuvre contemporaine à plusieurs voix complexe mais très intéressante. Nous sommes embarqués dans un monde mal et heureusement peu connu de la majorité des gens. Un phénomène tout autant mystérieux que fascinant qu’il y a encore quelques années, était inévitablement associé à la mort : le coma. Même si je ne suis pas experte de ce domaine, j’ai eu la sensation, en lisant, que Madame George s’était visiblement bien documentée pour coller au mieux de la réalité dans la description de ce trouble de l’état de vigilance. Mes acquis ont été confirmés et j’ai appris certaines choses sur son fonctionnement, sur son accompagnement médical et moral.
De nombreux flashbacks, d’innombrables rêves sont présents sans que cela nuise à la compréhension et à l’intérêt de l’intrigue. En utilisant l’état de conscience évolutif de la victime, l’écrivaine nous éclaire parfaitement sur les niveaux d’existences possibles entre la vie et la mort. C’est désorientant, décontenançant mais instructif. Une réflexion s’impose alors.
Cet écrit soulève des questions existentielles intéressantes sur le but et la définition de la vie. En me suivant à votre tour, vous y trouverez peut-être des réponses.
La narration à la première personne m’a beaucoup plu. Les acteurs prennent alternativement la parole au commencement de chaque chapitre. Ils nous donnent ainsi leur vision respective sur les évènements passés ou présents. J'ai adoré la manière dont cela fonctionnait car cela les rend plus profonds, plus réfléchis. Grâce à leur dévoilement, à leurs explications sur la façon dont ils appréhendent la tragédie qui se joue, leur rencontre avec l’inconscient, nous apprenons à les connaître véritablement. Une complicité s'établit peu à peu. Une certaine intimité naît alors entre eux et nous. Nous nous inquiétons réellement pour eux.
Les personnages, justement, sont raffinés. Ils sont joliment dessinés et sont exceptionnellement convaincants. Ils font preuve de charisme. Ils dégagent une telle aura que j’ai pris assurément du plaisir à les accompagner.
Sam a toute mon affection. Cet adolescent atypique par son intelligence supérieure et sa synesthésie est profondément mature pour son âge. J’ai été charmée par son courage, son humanité. J’ai éprouvé de la peine quant à sa tristesse, son désarroi. C’est un individu attachant, généreux qui renvoie quelque chose de spécial tout simplement. Désormais, je suis davantage informée sur sa particularité neurologique non pathologique.
J’ai admiré Eddie. C’est une femme forte, blessée dans son orgueil qui assume néanmoins la lourde responsabilité qui lui a été confiée. Le duo qu’elle forme avec Sam est attendrissant.
La vision onirique d’Henri est bien retranscrite. Elle reflète vraiment ce qu’il est dans la « vraie » vie. Un individu qui a vu tant de souffrances qu’il en n’a renoncé à aimer et à être amé. Il s’interdit tout bonheur.
Plume légère et agréable. Rythme, ni trop lent ni trop rapide, convenant au cadre que représente une chambre d’hôpital.
Mes félicitations vont à N.G pour avoir eu le courage de traiter de sujets difficiles liés aux choix humains. Vie, mort, coma, amour, peur, conscience, inconscience… Nous voyageons dans ces univers parallèles si proches et si lointains à la fois. Grâce aux rêves d’Henri, nous nous immergeons totalement dans l’esprit. Elle aborde avec brio, pudeur et légèreté les questions difficiles mais non moins importantes que sont la perte, la solitude, le manque.
En résumé, j’ai eu dans les mains un bouquin tout en couleur, intense et de haute tenue. Un texte écrit de manière subtile qui se veut simultanément épanouissant et déchirant, instructif et drôle quelquefois. Je ne me suis jamais ennuyée. J’y ai croisé de l’empathie, de l’intelligence et de l’humilité.
A entreprendre ? : Absolument. Si les histoires émotionnelles ne vous rebutent pas, vous allez aimer ce livre. Il y a des passages amusants où vous sourirez, d’autres seront à l’inverse très tristes et vous arracheront probablement quelques larmes. Mais une chose est certaine, vous ne serez pas insensibles à cette lecture qui restera, pour moi, un moment fort de ce début d’année. Ces débuts avec la romancière sont incontestablement réussis.
Si proche, si loin est un roman dans lequel on entre sans vraiment savoir à quoi s’attendre. Un roman qui nous happe dès les premières lignes, nous emmenant ensuite dans ce voyage…
Voyage. Le lecteur suit cette histoire du point de vue de plusieurs personnages: Henri, ce père héros plongé dans le coma après avoir sauvé une petite fille de la noyade; Sam, cet enfant attachant atteint de synesthésie, qui viendra voir son père à l’hôpital, père qu’il ne connaît pas; Edwinna, cette éditrice, ancien grand amour d’Henri. Et découvre ainsi leurs vies, les décisions qu’ils ont prises dans le passé, leurs envies présentes, leurs souhaits… Devenant ainsi presque intime avec chacun d’entre eux.
Voyage. Dans un « entre-deux », frontière entre la vie et la mort, où se mêlent rêves, nouvelles vies, rencontres, recommencements et souvenirs…
Outre cette histoire entraînante qu’est la rencontre tardive d’un enfant avec son père, plongés tous deux dans deux mondes distincts, Nina George parvient avec brio à nous faire ressentir tous genres d’émotions (ceci avec une extrême douceur, presque enfantine) et à nous faire réfléchir sur divers sujets: qu’est-ce que l’amour, finalement ? ; comment régirais-je face à la perte d’un être cher ? ; que se passe-t-il réellement lorsque qu’une personne est plongée dans le coma?
Un MAGNIFIQUE roman !
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