"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une femme attend, depuis vingt ans, le retour de son mari parti à la guerre. Leur fils a grandi sans connaître son père. Les intrus, qui ont envahi la demeure et convoitent cette épouse esseulée, se montrent de plus en plus agressifs et pressants. Pour continuer à attendre, elle doit encore gagner du temps, envers et contre tout.
Même s'ils ne sont nommés qu'à la fin du roman, le lecteur comprend vite qu'il s'agit des personnages de L'Odyssée.
En adoptant le point de vue de celle qui attend, c'est une nouvelle histoire qui est racontée. Sur cette île grecque, dans ce monde pourtant ancien, tout semble familier et étrangement actuel. Nous ne sommes plus témoins du courage et de la ruse d'Ulysse dans son périlleux voyage, mais de la patience et de l'intelligence de Pénélope, face à une barbarie ordinaire.
Par la profondeur des sentiments, la beauté des descriptions, l'écriture simple et intense, la lenteur du rythme mais aussi la multiplicité des scènes saisissantes et l'incroyable crescendo final, Sans plus attendre est un livre qui frappe durablement l'imagination du lecteur.
Dans son premier roman, Sylvie Durastanti nous plonge dans l’attente du retour. Un homme devrait revenir alors dans ce silence pesant, complexe et à durée indéterminée, les voix s’expriment, tournent dans la tête ou parviennent à trouver un écho. Ainsi, la maîtresse et sa fidèle Eri nous racontent ce quotidien, cette vie qui essaye de continuer sans vraiment être. L’autrice nous décrit l’entretien journalier de l’espoir qui habite ces femmes et avec elles, toute une île. Que l’homme providentiel revienne et ce sera le retour à la normale. En attendant, il faut résister aux courants contraires, les mauvais présages, les facilités de construire une autre vie et de perdre la raison de l’espoir. Derrière les gestes anodins et un fameux subterfuge, se cache justement cet espoir. Celui-ci est alimenté par des valeurs, par une conception de la vie. Les deux femmes auxquelles vont s’ajouter d’autres personnages parlent aux lecteurs·trices directement et on voit alors toute l’énergie qu’elles mettent pour trouver les ressources nécessaires. C’est donc un mouvement intérieur, profond qui se met en place pour contrer le temps, refuser les injonctions et garder l’espoir. Cette sincérité prend forme dans le silence et le mystère des personnages, notamment la maîtresse, qui ne révèle pas toutes ses astuces aux autres. Le temps devient alors un ennemi et on sent qu’il perd de sa force. Nous n’avons pas de repères précis, les jours se suivent, se ressemblent et la répétition bouleverse toute perspective. On approche d’une certaine folie amplifiée par l’isolement insulaire et l’enfermement au sein du domaine. Dans ce choix de refuser la vie telle que les autres vaudraient l’imposer, Sylvie Durastanti compose un livre politique, sur la possibilité de choisir individuellement l’organisation dans laquelle on veut s’inscrire.
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