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«Rue de la Justice», telle fut la dernière adresse d'une de mes arrière-grands-mères, laveuse sur un bateau-lavoir dans une petite ville des bords de Loire. Née en 1863, elle avait un peu plus de vingt ans à la mort de Victor Hugo et toute sa vie conserva sur sa cheminée une gravure des obsèques nationales du poète. Symbole de la confiance des gens d'en bas en la toute jeune république, dont ils attendent justice, progrès, instruction.Revenant sur ma terre d'origine, l'Anjou, j'ai donc tenté de retracer le cadre de leur vie, d'évoquer leur difficile existence de travail, le poids de l'Église et des châteaux, leur foi dans le progrès scientifique et technique. Mais aussi de faire entendre, les soutenant, les accompagnant, les voix de Victor Hugo, de Louise Michel, et celles des républicains et républicaines d'une province qui l'était si peu. Avec en fond de décor, un paysage, le bocage de la «Vendée angevine», la vallée de la Loire, la rumeur et les colères du grand fleuve.Cette confiance en la république pourrait-elle renaître aujourd'hui ? En 2018, il m'a semblé entendre chez les Gilets jaunes quelque chose des très anciennes revendications dont étaient porteurs mes ancêtres, journaliers agricoles, vignerons, artisans, tous ceux que Gracchus Babeuf nommait «les impropriétaires». Égalité, justice, reconnaissance.Faisant retour vers ce petit peuple disparu avec ses modestes et farouches espoirs, attentive à sa leçon, émue par son courage quotidien, je me disais : ce passé-là a de l'avenir.D. S.
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