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Apolline est une jeune chorégraphe. En Bretagne, où elle accompagne une troupe de théâtre, elle rencontre Erwan, un jeune homme beau comme Roméo. Quand celui-ci lui propose une sortie en voilier, elle accepte, au grand dam de ses proches : «Mais tu le connais à peine !». La sortie en voilier est une épreuve : tempête, mer déchaînée, nausées qui tordent Apolline de douleur et de peur... Quand le calme revient, Apolline est exténuée, mais Erwan insiste pour faire l'amour. Elle cède, subjuguée. C'est le début d'un voyage intense et paradoxal, qui les conduira à Naples, puis dans les Pouilles, en Italie. Peu à peu, Apolline se sent de plus en plus entraînée dans une ronde amoureuse et charnelle qu'au fond elle n'a peut-être jamais maîtrisée... Une ronde qui s'achèvera dans la transe explosive de la pizzica ! La pizzica est une tarentelle. Originaire des Pouilles, en Italie, liée dans le passé aux pratiques thérapeutiques du tarentisme, pour soigner les morsures de la tarentule, elle est aujourd'hui une danse populaire. Le premier livre de Solène Rebière révèle une autrice d'une grande maturité : réussite graphique où la danse est sublimée par un dessin plein de grâce, c'est aussi une mécanique narrative pour traiter le sujet de l'emprise amoureuse.
Dans un noir et blanc magnifique et dont elle manie les nuances, Solène Rebière trace le portrait complet d’Apolline. On la découvre depuis sa naissance jusqu’à ce qu’elle découvre d’elle même. C’est un récit initiatique qui passe par la relation amoureuse et la création. La danse n’est jamais très loin dans la vie de cette jeune femme et dans les dessins de Solène Rebière. Pour Apolline, la danse semble avoir un rôle de révélateur et d’expression. La dessinatrice joue sur les mouvements du corps pour montrer l’état psychologique de sa protagoniste. Les mots manquent parfois. Alors le corps exulte et fait ressortir des sentiments, des émotions. Ces quelques cases de liberté pour Apolline sont très belles dans ce qu’elles expriment de pression subie.
La jeune chorégraphe se retrouve dans son histoire d’amour, sous la responsabilité d’Erwan. Il impose son avis, passe d’oreille ami à guide très envahissant. Son désir, ses envies ou encore ses intuitions sont vite passées à la trappe par cet homme. Il prend de la place. Cette relation, très vite à sens unique, bouscule Apolline et ce mouvement psychologique, sous la plume et les crayons de Solène Rebière, ne passe pas forcément pas des mots – bien que les dialogues soient vraiment très bons dans les sous entendus -. Elle se concentre sur le corps, sur ce qu’il subit et ce qu’il peut créer. On assiste donc au parcours intime d’une femme en quête de sa place dans son rapport aux autres mais également à elle même. La danse, et plus précisément la Pizzica, lui permette de trouver sa place sur une scène et dans la vie.
La danse, Apolline la connaît et la pratique depuis sa plus tendre enfance. C'est aussi en dansant que, des années plus tard, elle rencontre Erwan en Fest-Noz. Alors qu'elle est censée chorégraphier un spectacle, elle laisse peu à peu tomber ses amis pour passer plus de temps avec lui. Au point de partir avec lui, en bateau puis en voyage à Naples.Un voyage qui va lui ouvrir les yeux....
Pizzica : danse traditionnelle italienne pratiquée dès le XVIIIe siècle pour guérir du venin de la tarentule. Pour son premier roman graphique, Solène Rebière propose le récit d'une relation toxique, de l'emprise d'un homme d'apparence charmant sur une jeune femme prête à tout pour lui plaire, avant de peu à peu ouvrir les yeux et comprendre...
L'autrice met donc en scène parallèlement cette danse rituelle avec la sortie d'Apolline de l'emprise d'Erwan... Et elle le fait magistralement avec un dessin en noir et blanc magnifique qui n'est pas sans rappeller Emmanuel Lepage. Les scènes de danse sont superbes et Apolline est un personnage complexe, que l'on suit depuis son enfance et dont on comprend mieux l'évolution.
Pizzica Pizzica est un premier album intéressant à plus d'un titre. Au-delà de l'aspect graphique remarquable, j'ai trouvé le sujet bien abordé, sans clichés. Nombreux sont les romans graphiques qui se sont emparés de la question de l'emprise ces derniers mois et celui-ci m'a particulièrement plu !
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