"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une jeune femme s'installe avec R., son mari, dans un hameau perdu de Basse-Silésie, à quelques dizaines de mètres de la frontière tchèque. Nous sommes aussitôt après la chute du régime communiste en Pologne, mais ce n'est pas l'unique changement perceptible : les maisons, les jardins et les forêts environnantes regorgent de vestiges et de traces laissées par les Allemands qui vivaient autrefois, majoritaires, dans cette région. Strates de terre, strates de temps, le hameau prend rapidement les dimensions de l'univers, puisque les possibilités de narrations, à partir de lui, sont infinies.
D'une imagination débordante, mêlant légendes, ragots de villageois, explorations des rêves et de l'Internet naissant, recettes de cuisine et fines observations de nos contemporains, ce roman d'Olga Tokarczuk est l'épopée d'un tout petit lieu, avec une ahurissante galerie de personnages, dont Marta, la voisine, perruquière fantasque, qui amorce et tisse les histoires, Marek Marek qui se saoule à mort pour ne plus sentir l'énorme oiseau qui est dans sa poitrine, ou encore Ergo Sum, le professeur de latin qui se changera en loup-garou... et jusqu'à sainte Kümmernis, ravissante femme à barbe crucifiée par son père.
Livre très surprenant, déroutant même au début,d'Olga Tokarczuk, lauréate du prix Nobel en 2018.
C'est son écriture fluide, poétique qui fait l'intérêt de ce récit et son art de mêler présent et Histoire, réel et rêve.
Le ton est léger, les personnages comme la narratrice sont dans un entre deux , entre le conscient et l'inconscient.
Le cadre c'est la Silésie, dans un tout petit lieu, proche de la frontière avec la Tchécoslovaquie, une région malmenée par L Histoire.
La narratrice avoue que son compagnon R.et elle vivent silencieusement dans leur maison isolée. Alors, c'est auprès de Marta, une vieille femme qui a toujours vécu là qu'elle
trouve de la vie. L'auteure déroule dans de courts paragraphes des séquences de vie toutes simples , proches de la nature où les deux femmes partagent recettes de cuisine, cueillettes,perruques. Elles partagent aussi des récits de rêves , des croyances.Et dans le livre réalité quotidienne et onirisme s'entremêlent.
Il y a aussi des drames, des coups du destin que l'auteure raconte sans s'appesantir, avec délicatesse. Ainsi Peter Dieter , un Allemand, meurt-il brutalement dans ce village de son enfance et devient l'objet de transport sans fin par les soldats d'un côté à l'autre de la frontière.
Dans cette région où l'on vit dans la nature, l'on peut être victime de son ignorance , le fils des Frost meurt d'avoir consommé des champignons mortels.
L'auteur entrecoupe le récit de longs paragraphes consacrés à la légende de Kummernis jeune fille qui se réfugie dans les ordres contre l'avis de son père et qui deviendra une sainte.
C'est un ensemble de paragraphes à première vue disparates, qui dit peut-être ce qui fait la richesse et la complexité d'une petite communauté villageoise de Silésie, les légendes font partie des fondations ou du fond.
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