"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
« Mon cancer s'écrit myélome et je ne peux m'empêcher de penser « miel homme ». Il me paraît plus doux, du coup, moins agressif. Grâce à lui, je me sens comme un héros Marvel. Je suis l'Homme de miel. » Olivier vit à Sète, dans le sud de la France. Un coup de fatigue et une analyse sanguine plus tard, il apprend qu'il est atteint d'une maladie rare dont l'issue est souvent fatale : le myélome.
Olivier Martinelli aborde le sujet difficile et craint de la maladie. Mais ce n'est pas un texte pénible, bien au contraire, sa très belle écriture, simple et poétique, et son humour affûté emplissent ces quarante-neuf courts chapitres d'une énergie absolument positive qui prend le lecteur par la main. Le résultat en est un très joli petit livre, de ceux qui parlent facilement à tout le monde et qui touchent en plein coeur. Surtout, il passe un message important et assez simple finalement : face au pire, tout ce qu'il reste à un homme, c'est vivre.
Ce premier roman qu'Olivier Martinelli n'a pas décidé d'écrire, pour reprendre ses mots, a la force de supplanter la maladie. Il n'y a aucune illusion, la vérité est regardée en face et affrontée, il y a les bas, mais les hauts reviennent toujours au galop avec une énergie débordante.
L'Homme de miel est un livre qui fait du bien, un livre utile, un livre super-héros.
L'homme de miel est un livre publié à la rentrée littéraire 2017 par un éditeur extrêmement passionné et d'une grande sensibilité, Christophe Lucquin, qui a fondé sa maison d'édition indépendante en 2011. Les livres de cet éditeur se singularisent à la fois par le choix des sujets des publications, souvent très puissants mais également la qualité de l'objet livre, avec un papier très blanc, une identité visuelle très marquée par des touches de bleues, notamment sur la couverture, la quatrième de couverture et sur la page de garde. Le dessin qui orne la couverture de ce livre est extrêmement bien pensé.
Olivier Martinelli publie avec ce livre un recueil de chroniques autour de la découverte de sa maladie, un cancer appelé myélome. Il utilise lui même le terme que j'emploie pour évoquer ce livre dans la postface. Il est l'auteur de plusieurs nouvelles parues dans divers recueils et de cinq romans dont certains parus uniquement sous forme numérique.
En dépit de son sujet, c'est un livre qui se veut positif, grâce à de nombreuses touches d'humour, d'autodérision dont le narrateur fait preuve lorsqu'il nous relate l'ensemble de l'année liée à son cancer, les séjours à l'hôpital, les suites de l'opération qu'ils a subi. Les titres de chapitre sont extrêmement percutants. Ce qui m'a le plus touché dans ce livre, c'est assurément la relation de notre narrateur / auteur avec ses deux enfants, Dan et Liz. Ce n'est pas un livre qui se veut larmoyant, plein de pathos, c'est tout simplement un ouvrage que j'ai trouvé d'une grande finesse. L'écriture en est limpide, simple au sens noble du terme, belle tout simplement. On a bien évidemment une attention très forte au corps, aux sensations. On est avec cet Homme de miel et son entourage, notamment sa famille, tout du long de ce récit. Il est intéressant d'apprendre également que l'écrivain a fait la rencontre d'un artiste peintre qui semble être un sacré personnage et c'est bien évidemment un livre qui nous parle également de création, notamment lorsque l'on est atteint d'une maladie mais pas seulement, avec cette autre figure d'artiste présente dans le livre. On aimerait voir les tableaux de Eddie, notamment lorsqu'on lit le chapitre XLVII "L'arbre de vie" qui fait partie des nombreux chapitres magnifiques de ce livre, qui nous évoque notamment ce qu'évoque le tableau pour notre narrateur, c'est-à-dire l'image qu'il a dans sa tête de son fils dans les bras de sa grand-mère, la mère d'Olivier. L'auteur évoque également son métier d'enseignant et comment il l'a quelque part sauvé.
Je compte pour terminer cette chronique citer la fin du livre, un des passages que je trouve parmi les plus beaux de ce dernier. C'est une scène du narrateur avec ses enfants.
"J'allais lui montrer ces drôles de nuages quand je me suis aperçu qu'ils avaient disparu. Il n'en restait rien. Rien qu'une inquiétude diffuse striant le bleu profond du ciel. Le froid m'a fait frissonner. Instinctivement, mes enfants se sont blottis davantage contre moi. Ils ont enfoncé leur chaleur et leur futur immense tout près de mon âme. De leurs petites mains, ils ont attrapé mon coeur. Ma peur a volé en éclats."
C'est un livre magnifique et j'ai eu un absolu coup de cœur pour ce livre qu'il faut absolument se procurer en librairie et qu'il vous faut lire pour se rendre compte de la force de certaines personnes et surtout du recul qu'elles sont capables d'avoir lorsqu'elles traversent une épreuve.
Loin d'être morbide ce livre est au contraire positif, même si l'on sent bien par moments le découragement de l'auteur, l'envie de baisser les bras, les angoisses, les cauchemars souvent liés à l'idée de la mort bien sûr mais surtout à la peur de ne pas voir grandir ses enfants et pour iceux de ne pas grandir avec un père. Ne pas sentir ces interrogations, ces peurs serait faire l'impasse sur une grande partie de la vie d'Olivier Martinelli depuis l'annonce de sa maladie. Mais, ce qui ressort le plus de ses courts textes, c'est l'espoir et la volonté de vivre. Pas forcément pour réaliser de grandes choses, des exploits, mais vivre pour les siens, en profiter au maximum et s'appuyer sur eux pour reprendre des forces, même si face à la maladie et quand bien même on est très écouté, accompagné, on reste seul. Cette solitude, il ne l'élude pas, voulant en plus, sans rien cacher protéger ses proches et notamment ses enfants encore petits.
Les textes sont beaux et tristes mais aussi beaux et joyeux, parfois poétiques, jamais plombants. Olivier Martinelli écrit des pages bouleversantes, touchantes, pleines de vie. L'humour est là aussi qui fait passer bien des choses, même dans les moments durs, voire très durs : "Lorsqu'un médecin vous assure que ce qui vous attend est sans danger, ne soyez pas surpris si ça se termine par une flaque de sang dessinant une forme étrange dans un plateau en inox." (p.17) En étroite collaboration avec l'humour, il y a de la légèreté bienvenue dans un texte d'une telle force et de la poésie qui fait passer les moments difficiles : "Je n'y voyais pas à vingt mètres. J'ai enclenché les essuie-glaces. Je n'y voyais toujours rien. Il ne pleuvait que de mes yeux. Je les ai libérés de leur humidité d'un revers de la main. L'humidité est revenue aussitôt. Je les ai nettoyés une fois encore. Puis j'ai capitulé." (p.27). Olivier prend de la force partout, dans la main de sa fille, dans la compagnie de ses proches, dans ses projets d'écriture qu'il se presse de mener à bien, dans le sourire d'une infirmière, dans la douceur du regard ou de la voix des médecins et j'espère modestement dans ma chronique, sincère.
Christophe Lucquin dont vous savez sûrement mon attachement à sa maison d'édition, publie ici un texte inratable en cette rentrée littéraire et aussi plus tard, l'un de ceux qui remuent le lecteur, qui lui donnent de la force et une envie de profiter encore plus de chaque instant.
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