Cet épisode des Reflets du Monde prend racine dans les voyages de Fabien Toulmé. Il y raconte la Thawra, révolution citoyenne au Liban, la lutte d'une favela brésilienne contre un projet immobilier et l'engagement d'une militante féministe au Bénin, trois combats menés par des citoyens. Ou plutôt «par des citoyennes», car, dans ces mouvements de résistance, les femmes occupent une place centrale.
"Le fait d'être féministe, ce n'est pas simplement lutter pour le droit des femmes, c'est lutter pour le droit de tous".
Fabien Toulmé nous décrit ici 3 histoires de luttes sociales toutes menées par des femmes. Que ce soit au Liban, au Brésil ou au Bénin, ce sont les femmes qui portent le message et qui se battent (pacifiquement) pour toute une communauté ou une génération.
L'auteur nous donne également des clés de compréhension sur des notions sociologiques et le côté historique de chacun de ces pays. A lire !
Dans ce premier recueil intitulé Les reflets du monde et qui aura sans doute des suites, Fabien Toulmé s'est intéressé aux Luttes, aux luttes citoyennes.
Il nous embarque pour trois voyages, trois récits de résistance populaire, trois histoires d'humains en lutte.
Sa première destination, le Liban, en novembre 2019, sera un peu le fruit du hasard.
Le salon du livre auquel il devait se rendre, à Beyrouth est annulé, des manifestations secouent le pays depuis presque un mois. Il décide néanmoins de maintenir son voyage, pour tenter de comprendre ce qu'il s'y passe.
Ce qu'il a compris de la situation libanaise d'après les journaux, c'est que les manifestations ont débuté le 17 octobre suite à l'annonce par le gouvernement, de l'instauration d'une taxe sur les appels effectués via l'application Whatsapp pour renflouer les caisses de l'État, mais que ce soulèvement semble surtout être la conséquence d'un ras-le-bol général vis-à-vis de la classe dirigeante.
Pour qu'il puisse nous présenter les choses telles qu'elles se sont passées et se déroulent à ce moment-là, Fabien va rencontrer des gens qui vivent ces événements de l'intérieur et notamment cette jeune féministe, porte-voix connue dans les manifs, Nadal.
Deux ans après ce premier reportage, il est de retour au Liban. Si beaucoup de choses se sont passées entre temps, la crise du Covid, le confinement, la double explosion qui a ravagé la capitale libanaise le 4 août 2020, une crise économique sans précédent, force est de constater que la Thawra, la révolution populaire « n'a pas survécu à tous ces vents contraires et la place des Marthyrs est revenue à son état initial de parking ».
C'est ensuite dans le Nord-Est du Brésil que l'auteur poursuit sa découverte du monde qui nous entoure en se rendant à João Pessoa, la ville au monde où il se sent le plus chez lui.
Il apprend que, là, tout près, le long du Rio Sanhauá, une « communidade », terme brésilien pour désigner des quartiers pauvres, une communauté, en traduction littérale, du Porto do Capim qui vit au bord de la rivière est menacée d'expulsion par la mairie à cause d'un projet immobilier.
Pour savoir ce que pensent les habitants, ces personnes qui subissent cette sorte de processus de gentrification très en vogue dans les grandes villes, présenté comme inévitable et bénéfique car permettant une amélioration des conditions de vie, Fabien Toulmé va dans les pas de Rossana, présidente et fondatrice de l'association des femmes du Porto do Capim, cette communauté qui lutte contre la destruction de ce quartier populaire.
Son troisième voyage se fera au Bénin. Pour ce dernier reportage il va essayer de comprendre ce qui peut amener quelqu'un à militer. Il va rencontrer Chanceline, cette jeune militante pour les droits des femmes qui a commencé son engagement dès le collège. Plutôt que militante, elle préfère se décrire comme une organisatrice communautaire, c'est-à-dire qu'elle fait de la sensibilisation « sur le terrain » sur les problématiques liés aux droits des femmes et plaide auprès des autorités béninoises pour combattre les inégalités hommes-femmes.
C'est avec un immense plaisir que je suis partie en voyage avec Fabien Toulmé. Ses trois reportages composent un documentaire absolument intéressant et édifiant au cours duquel il décrypte trois résistances populaires en nous montrant les mécanismes de chaque rébellion, et duquel il ressort que dans ces mouvements de résistance, les responsables militantes sont des femmes, de véritables héroïnes.
Une question se pose : pourquoi, de façon quasi systématique, dans ces luttes, les femmes occupent-elles des places centrales pour ne pas dire exclusives ?
Cela a interpellé Fabien Toulmé qui s'est alors tourné vers le sociologue Olivier Fillieule qui nous offre des réponses pertinentes et fort intéressantes que je ne divulgâcherai pas ici mais que je vous laisse le soin de découvrir par vous-même dans l'album.
Des dessins simples presque naïfs très précis restituent bien les cadres de vie dans lesquels circulent les personnages, leur vie quotidienne. Les cases monochromes prennent différentes teintes, souvent en fonction de la chronologie, s'il y a retour dans le temps, ou en fonction de l'interlocuteur…
J'ai été subjuguée par le courage et l'opiniâtreté dont font preuve ces femmes dans la lutte qu'elles mènent pour une vie meilleure avec plus de justice et d'égalité, et admirative de leur parcours qui ne peut qu'inciter à se lever et à ne pas tout encaisser !
Les reflets du monde – En lutte est un roman graphique passionnant et touchant dans lequel Fabien Toulmé fait preuve de beaucoup d'empathie et de tendresse, n'hésitant pas à se mettre lui-même en scène dans son rôle de reporter.
J'avais fort apprécié L'odyssée d'Hakim 1, 2, 3, du même auteur et j'ai été à nouveau conquise par ce dernier.
Chronique illustrée à retrouver ici : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2023/09/fabien-toulme-les-reflets-du-monde.en-lutte.html
L'album est unanimement salué sur cette page ! Je le comprends, mon avis ne va pas dévier, il est dans la même lignée que les autres... J'ai adoré. Bravo.
Fabien Toulmé nous a livré une belle enquête documentaire, un récit sociologique, tout ce qu'il y a de plus vivant, immergé au sein des communautés qu'il a souhaité interroger. Une sorte de "Rendez-vous en terre mé-connue", avec un fil directeur autour des luttes engagées, pour plus d'humanité, plus de liberté.
D'abord au Liban, où il devait se rendre pour un festival BD, tardivement annulé du fait des événements locaux, révolution populaire, quelques années après le printemps arabe. Il y rencontre une jeune femme, Nidal, qui lui donne à voir les raisons de cette révolte de l'intérieur, sans filtre.
Puis, il se rend au Brésil dans sa belle famille, près de Porto do Capim. Là bas, un projet d'aménagement immobilier (+/- véreux) vise à déloger des populations pauvres, mais très attachées à leur favela dans laquelle elles vivent depuis des générations. Rossela est à la tête de l'association pacifique pour la défense des habitants du quartier. D'autres modèles de réhabilitation sont possibles, qui n'impliquent pas la délocalisation future des habitants, dans l'incapacité de rester dans ces nouveaux logements onéreux. L'identité du village chamboulée...
Enfin, un séjour au Bénin, Fabien rencontre Chanceline. Chanceline est engagée pour changer les moeurs et lutter contre la domination masculine, inculquer des notions de consentement. Elle fait campagne dans les écoles pour débattre avec les enfants autour de leur sexualité et des agressions que les jeunes filles pourraient subir, de l'impact sur leur avenir potentiel.
Au Bénin, le nombre de grossesses précoces, dès le collège, est hallucinant. 18,8% des grossesses sont précoces et non désirées... Cela signifie qu'environ 275.000 grossesses surviennent chez les adolescentes chaque année. Le mariage des enfants (avant l'âge de 18 ans) est en étroite relation avec la grossesse chez les adolescentes. L'égalité homme / femme est encore un doux rêve, Chanceline cherche à faire évoluer les mentalités.
L'album est très instructif, bien documenté, avec des rencontres de sociologues qui font de la pédagogie, notamment les explications autour de la position ancrée des femmes dans les luttes évoquées. Les personnages sont très attachants, Fabien utilise même de manière récurrente mais avec distance un Jiminy Criquet, en la personne de son prof d'Histoire, Monsieur Guilledou, qui l'aurait éveillé à la conscience sociétale à l'adolescence.
Malgré 330 pages, un beau pavé, on en redemande, et c'est avec plaisir que j'ai découvert un petit -1- sur la tranche de l'album. Cela augure donc au moins d'un n°2...
Le trait rondouillard de Fabien Toulmé accroît la sympathie pour les protagonistes, et je pense en proposer la lecture à mes filles de 11 / 12 ans. Je ne suis pas sûr que ça les intéresse de suite, mais ça se tente.
Par moments, par le ton et l'immersion à l'étranger, j'ai pensé aux carnets de Guy Delisle (Pyongyang, Shenzhen, Birmanie, Jérusalem). Je les porte en haute estime, c'est donc une très bonne référence !
Je remercie grandement le site Lecteurs.com et Nicolas Zwirn qui m'ont permis de lire, de picorer même car j'ai pris le temps, ce bel album. Oui, merci beaucoup. D'autant que ce livre se prête au partage, et je pense qu'il sautera entre quelques autres mains.
Fabien Toulmé a eu l'envie de faire du reportage de terrain, d'aller à la rencontre de gens aux quatre coins du monde, pour raconter leurs parcours, qui pour être individuels parlent cependant au plus grand nombre.
La révolution populaire du Liban en 2019, la Thawra décidera du thème : la lutte, et plus particulièrement la lutte menée par des femmes : Nidal au Liban qui lutte entre autres pour l'égalité hommes-femmes, Rossana au brésil qui au sein d'un mouvement se bat contre un projet qui veut détruire son quartier et Chanceline au Bénin qui éduque les jeunes filles et jeunes garçons à l'éducation sexuelle, au consentement.
Excellentissime gros roman graphique d'une part parce que Fabien Toulmé est un formidable reporter qui sait intéresser ses lecteurs à son sujet par ce qu'il écrit et évidemment, sinon ce ne serait pas une bande dessinée, par son dessin, un peu naïf, coloré de cases monochromes, tantôt bleues, tantôt vertes ou roses ou ocres... et par ses touches d'humour -souvent de l'autodérision.
Et d'autre part, et surtout par les thèmes abordés et les femmes rencontrées. Nidal, dans un Liban en pleine déroute dans lequel il n'est pas simple d'être une femme qui lutte, qui milite et ose prendre la parole, qui reçoit des menaces mais persévère et ne lâche pas l'affaire. Elle veut l'égalité hommes-femmes et plus globalement, virer les élites corrompues, cesser le fonctionnement du pays qui offre les plus hauts postes en fonction de sa communauté...
Rossana à Joao Pessoa qui veut que son quartier -la communauté Porto do Capim- promis à la démolition vive et qui s'y démène : manifestations, recours à la justice. Elle veut en faire un sanctuaire écologique et il faut pour cela que la mairie assainisse, investisse...
Chanceline au Bénin qui tente d'inculquer aux jeunes les notions de consentement, de sexualité protégée, pour lutter contre les grossesses précoces et qui se heurte à des préjugés, des traditions...
Bref, c'est un excellent ouvrage, trois reportages passionnants, très bien racontés, denses, il faut prendre son temps, et c'est une bonne idée tant on a envie de rester en compagnie de Fabien Toulmé et de ces femmes.
Les partis pris, sur le fond et la forme, de Fabien Toulmé nous offrent une "BD reportage" efficace, didactique et empathique.
Sur la forme Toulmé joue avec un graphisme simple ne cherchant pas l'hyper réalisme, mais aux traits simples, précis et totalement maitrisés. De même le code couleur contribue à faciliter la lecture : un bichrome pour différencier le présent de l'enquête et les représentations des événements passés à l'occasion des entretiens; et des bichromes différents pour chacun des 3 reportages.
Ces reportages mettent en scène l'auteur dans sa quête d'échanges avec les protagonistes donnant une implication du "reporter" de terrain et une illustration de sa subjectivité et de ses fragilités en suivant le conseil de son ancien professeur d'histoire lorsqu'il est susceptible de prendre des risques pour sa personne : "... ta volonté de restituer les choses à tes lecteurs doit s'arrêter là où ta peur commence -... - la question est donc de savoir à quel niveau se situe ta peur"
Les "intermèdes" entre chaque reportage permettent à la fois d'apporter une actualité après plusieurs mois, voire années, de la lutte présentée, et de donner une lecture plus "sociologique", plus analytique, tout en finesse dans l'analyse des complexités.
Et chaque situation / thématique en donnant la parole, en l'occurrence à des "femmes puissantes", pointe les motivations : souvent la recherche ou défense de satisfaction des besoins fondamentaux (Liban), la défense d'un territoire par une communauté menacée d'expulsion pour des objectifs immobiliers et touristiques (Brésil) ou encore les droits des femmes au Bénin, ce qui commence par la défense des petites filles.
La place et l'implication des femmes est dominante avec, en partie, l'explication des thématiques des luttes créant une forme d'acceptabilité de ces implications par l'ensemble des communautés (même lorsque les hommes sont absents de la lutte).
Mais, comme le dit une une des protagonistes des luttes : "le fait d'être féministe, ce n'est pas simplement lutter pour le droit des femmes, c'est lutter pour le droit de tous".
Et j'ajouterais que toutes ces femmes "interviewées" sont parvenues à faire des études ; ce qui reste une lutte en soi dans beaucoup de territoires et de pays pour que les petites filles gardent leur intégrités, puissent se former et définir leur chemin de vie.
Pour finir (ou commencer), l'ouvrage de Fabien Toulmé illustre bien que la lutte passe par la reconnaissance de l'injustice, les rencontres et l'engagement ; hasta la vista siempre.
Après ce tome 1, on attend avec impatience les autres "reflets du monde ... en lutte".
Tout démarre avec un voyage professionnel au Liban en 2019. Ce n’est pas pour la thawra, débutée quelques temps plus tôt que Fabien Toulmé se rend au Liban. Mais les aléas de la vie font qu’il va y rencontrer Nidal, une femme militante. Elle va lui expliquer bien des choses sur son pays et les raisons de cette thawra. Cela va amener Fabien Toulmé à approfondir ses connaissances sur les luttes dans le monde et grâce à un sociologue pourquoi ce sont très souvent les femmes qui se retrouvent au cœur de ces luttes. En plus de Nidal, nous rencontrons donc Rossana la brésilienne et Chanceline la béninoise.
Pas de surprise et pas de déception pour ce nouveau roman graphique de Fabien Toulmé.
Pas de surprise car dès la couverture, nous reconnaissons la patte de l’auteur avec ses dessins et ses couleurs reconnaissables. Fabien Toulmé a sa façon de dessiner les personnages. Certain-e-s diront que c’est naïf,simpliste. Mais moi, c’est ce que j’aime. Le principal y est et c’est ce que je recherche.
Pas de déception car encore une fois, Fabien Toulmé nous entraîne avec passion dans son reportage. Il va au principal et nous explique avec pédagogie ce qui est important à retenir.
Dans ce roman graphique, il rend hommage aux femmes qu’il a rencontré mais également à tous les hommes et femmes qui se battent pour garder leurs droits, leurs dignités, leurs terres et leur planète.
C’est encore une très grande réussite pour l’auteur. Cet ouvrage est à la hauteur de tous les autres ouvrages de Fabien Toulmé.
Merci à #NetGalleyFrance et aux éditions Delcourt pour l’acceptation de ma demande de lecture.
Fabien Toulmé voulait revenir à la BD reportage. « Reflets du monde – En lutte » inaugure une série d’albums dédiée aux enquêtes sur le terrain.
Liban, Brésil, Bénin… l’auteur nous emmène sur 3 lieux de lutte. 3 résistances populaires menées par 3 citoyennes engagées. Car le hasard a voulu que ces luttes soient menées par des femmes. Le hasard ou le contexte… Les lumières d’un sociologue spécialiste sont d’ailleurs les bienvenues, elles viennent éclairer le récit et sont un apport passionnant.
Le dessin de Fabien Toulmé est reconnaissable. Faussement naïf, il sait apporter bonhommie, légèreté et humour… il illustre à merveille les ambiances, les rencontres et met en avant l’humain. On s’attache instantanément à Nidal, Rossana ou Chanceline, ces femmes qui se battent pour défendre leur cause.
Au-delà des histoires humaines si intéressantes, Fabien Toulmé parvient à raconter le monde avec humanité et pédagogie. Il s’engage ainsi, à sa façon, en mettant en lumière ces êtres qui oeuvrent pour le bien commun. Et ça fait du bien, on lit, on rit, on apprend, on en garde quelque chose au fond de soi… la BD comme on aime.
Interview de Fabien Toulmé à suivre sur ma page insta bulle.noire
3 destins, 3 pays, 3 luttes, 3 femmes.
Fabien Toulmé, fidèle à ses convictions et à celles que lui a enseignées M. Guilledou son prof d'Histoire-Géo à la Fac, est allé à la rencontre de celles qui luttent, pour que nous les comprenions mieux. Sur place, il sera guidé par Nidal pour nous parler de la Thawra, la révolution citoyenne au Liban, par Rossana, une Brésilienne, qui lutte pour contre un projet immobilier et pour finir par Chanceline, une militante féministe au Bénin.
Selon le Larousse la définition de lutte est la suivante : "Ensemble des actions menées pour obtenir quelque chose, pour défendre une cause"
Mais quelles sont ses actions ? Pour obtenir quoi ? Pour défendre quoi ? Fabien Toulmé a choisi 3 luttes bien différentes et pourtant avec de nombreux points communs, dont le premier est qu'elles sont menées par des femmes. Mais pourquoi ? Pour mieux comprendre ce phénomène, il est accompagné d'Olivier Fillieule, sociologue qui travaille sur les questions de lutte et de militantisme. Ensemble, ils les décryptent pédagogiquement en en gardant ce qui en fait l'essence même, l'humain.
Fabien Toulmé a la faculté de s'emparer de sujets forts et importants avec beaucoup d'humour et d'humanité. Et c'est une fois encore, une réussite. Je n'ai pas pu décrocher tellement c'était passionnant et pourtant cette BD fait plus de 330 pages, découpé en trois grandes parties. Une belle mise en lumière de trois citoyennes œuvrant pour l'intérêt de tous.
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