"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Les livres nous soignent. Tandis que fleurissent les salons de «développement personnel » et les premières thèses de médecine sur le pouvoir des livres, Régine Detambel, écrivain et kinésithérapeute de formation, s'est donné pour tâche de montrer que la littérature comme remède doit se défier tout autant du pouvoir médical que des lieux communs du bien-être de masse.
J'ai lu cet ouvrage dans le cadre de recherches à des fins professionnelles. Si je ne partage pas toutes les vues de l'auteure, il n'en reste pas moins que cet essai est riche en réflexions. Régine Detambel s'appuie sur des références variées et donne envie, à son lecteur, d'approfondir le sujet. Tout lecteur y trouvera forcément une résonance en lien avec son propre parcours car tout lecteur sait aussi, pertinemment, que les livres sont tout autant des objets, qui véhiculent toute leur sensualité : tâches d'encre et odeur de papier, que des êtres captés au creux des pages qu'on se fait un plaisir ou une douleur à tenir entre nos doigts. La littérature est un voyage qui se poursuit chaque jour et qui demeure singulier : l'essai de Régine Detambel est là pour nous le rappeler.
Assurément « Les livres prennent soin de nous » ainsi que l’affirme Régine Detambel avec le titre de cet ouvrage, une évidence.
En fait, ainsi que l’indique très clairement le sous-titre, il s’agit en premier lieu de réflexions sur la « bibliothérapie », j’ignorais qu’il existait une discipline thérapeutique officielle sur la base des principes actifs de la lecture. Cela ouvre des perspectives sympathiques… se faire rembourser par la sécurité sociale un ou deux ouvrages aux éditions de la Pléiade, ma santé mentale le nécessite absolument !!
Un peu plus sérieusement, cette pratique thérapeutique, au moins lors de la publication de ce livre en 2013, n’est pas développée en France c’est un euphémisme, comme le précise l’auteur (p.55).
Sa mise en oeuvre requiert des compétences, une spécialisation tant du personnel soignant que de bibliothécaires. Naturellement, la bibliothérapie ne peut se réduire à fournir une liste de livres, il ne s’agit pas de reproduire des exercices scolaires. Il s’agit encore moins de prescrire des ouvrages de « développement personnel ».
Si cette bibliothérapie est apparue c’est naturellement que la lecture, les livres, ont des vertus pour l’équilibre de l’être. La lecture permet de s’échapper à des ondes négatives (tristesse, angoisse…) et offre à titre préventif des défenses psychologiques (p.20), c’est un nouveau regard sur la vie ne serait-ce que temporairement. La lecture peut être éveil mais surtout ranime, un quasi défibrillateur.
Pour l’auteure, il convient d’une part de privilégier la lecture à partir des livres papier, plutôt que la liseuse ou l’écran qui ne permettent pas une relation physique, charnelle entre le lecteur et l’ouvrage. Elle associe à la lecture « physique », l’écriture, l’atelier d’écriture prolongeant ce relationnel privilégié et bienfaisant, dans un élan créatif personnel (p.61).
D’autre part, la lecture à voix haute doit être favorisée (p. 74); les « bons livres » aident à vieillir et la lecture à voix haute est particulièrement adaptée en maison de retraite (p. 115-123 « vieillir et lire »).
On l’aura compris, ce livre est un manifeste pour la « vraie » lecture, lecture profonde avec écriture associée.
On pourra néanmoins formuler un léger reproche à ce livre, fort peu documenté sur des retours d’expérience thérapeutiques ; quelques témoignages et des exemples plus concrets de mise en situation auraient été les bienvenus.
« La lumière est dans le livre. Ouvrez le livre tout grand. Laissez-le rayonner, laissez-le faire. » Victor Hugo, dans cet extrait du discours d'ouverture du congrès littéraire de 1878,était précurseur en bibliothérapie !
La bibliothérapie ou l'utilisation du livre comme outil de soin, la lecture thérapeutique comme source d'apaisement des troubles de la santé mentale ou de renforcement du bien-être psychologique, voici ce que prône Régine Detambel dans ce petit essai assez intéressant mais tout de même très ciblé pour les soignants.
Même si je reconnais volontiers le bien-fondé de cette thérapie, et en particulier le fait de privilégier les VRAIS romans aux ouvrages de psychologie et aux "self-help books", je me suis pour tout dire pas mal ennuyée au cours de cette lecture très psycho-savante...
Une belle œuvre qui fait du bien.
Et si on remplaçait les médicaments par des lectures ? Sans aller jusque-là, Régine Detambel se fait fort de démontrer de quelle façon la littérature peut faire du bien à l'esprit comme au corps et plaide pour la mise en place de vrais programmes de biblio-thérapie. Mais attention. Une biblio-thérapie créative, c'est à dire qui mise sur le pouvoir de la fiction et non sur des livres formatés, autour du développement personnel et autres lieux communs. Alors, bientôt Stendhal, Proust ou Yourcenar sur ordonnance ?
"Une page ou une phrase nous donne de nos nouvelles et nous prenons soudain conscience d'une vérité intérieure." Voilà l'un des nombreux pouvoirs de la fiction, voilà pourquoi le roman a parfois la capacité de susciter réactions et émotions en abordant un sujet qui nous touche particulièrement alors que la lecture d'un article au contenu scientifique ou psychologique nous aurait laissé froid. Le phénomène d'identification aux personnages y est pour beaucoup tout comme la capacité de la fiction à nous extraire du quotidien et à fixer notre esprit sur une histoire qui nous éloigne pour un moment des petits et grands tracas de notre vie. Montesquieu l'avait dit bien avant : "Je n'ai jamais eu de chagrin qu'une heure de lecture n'ait dissipé."
L'auteure parvient à montrer par quel processus la littérature agit sur le sujet qui s'y adonne, comment elle lui permet de mettre du sens dans sa vie ; mais son propos est aussi d'alerter face au risque encouru par une discipline méconnue et surtout mal connue. "La littérature est principe actif donc à la fois remède et poison." Utilisée pour apaiser ou pour soigner, elle doit être maniée par des professionnels, des personnes qui connaissent parfaitement les livres et leur contenu, des personnes capables d'anticiper l'effet d'une lecture sur un certain type de lecteur, un même contenu pouvant être perçu de façon différente selon les gens, leur vécu, leur histoire personnelle. Quelqu'un comme elle, qui propose d'ailleurs une formation à la biblio-thérapie. On comprend au fil des pages que son combat vise à faire admettre que la biblio-thérapie ne doit pas être l'affaire de médecins mais bien de biblio-thérapeutes formés pour cela.
Je ne sais pas si les romans seront bientôt remboursés par l'Assurance Maladie mais j'ai pris beaucoup de plaisir à la lecture de cet essai dont certaines démonstrations m'ont parlé car j'y ai reconnu mes propres réactions. Je n'avais pas besoin d'une confirmation, je sais à quel point les livres me font du bien, mais c'est toujours agréable de comprendre pourquoi. Et de se dire que parler des livres, finalement, c'est un peu faire le bien autour de soi.
Vous savez peut-être déjà que les livres et moi ne sommes pas seulement unis par une relation personnelle, mais aussi professionnelle… Alors vous comprendrez peut-être mieux le pourquoi d'une tel intérêt pour l'essai de Régine Detambel, « Les livres prennent soin de nous, pour une bibliothérapie créative » (Actes Sud, mars 2015). Note : l'auteure, à la fois kinésithérapeute et écrivain, propose une formation autour de la bibliothérapie sur Montpellier.
Comment ai-je eu connaissance de cet ouvrage ? Grâce au passage de son auteure à la Grande Librairie, sur France 5, le 16 avril 2015 ( le replay de l'émission est toujours disponible – à partir de 40mn15 environ). Etant moi-même relativement proche des livres, la curiosité s'est faite grandissante lorsque ce document est arrivé parmi les nouveautés de la bibliothèque où je travaille. Il ne m'a pas fallu bien longtemps avant de l'emprunter.
Je ne vous livrerai pas une analyse complète et détaillée de cet essai : ici n'est pas mon but. Je me contenterai tout juste de partager avec vous ce que j'ai retiré de ce petit traité en faveur d'une « bibliothérapie créative »… Mais tout d'abord, qu'est-ce que la bibliothérapie au juste ? Il s'agit tout simplement de soigner nos maux grâce au pouvoir des mots, au pouvoir des livres. Mais attention, Régine Detambel semble formelle : pas grâce à ces livres de développement personnel qui pullulent dans les rayons des librairies, qui vous disent clairement comment penser et agir face à telle ou telle situation. Non, dans cette approche de la bibliothérapie, une grande place est faite au monde de la fiction, de la poésie, à la musicalité des mots, en plus du sens qu'on peut leur donner…
Pas question de véhiculer une pensée unique, des recettes miracles, comme c'est souvent le cas dans les livres de développement personnel, mais au contraire laisser libre cours à notre interprétation dans l'acte de lecture, pour puiser dans les mots les ressources dont nous avons besoin pour comprendre, pour avancer… (d'où la notion de bibliothérapie « créative »).
Qui d'entre nous n'a jamais ressenti, à la lecture d'un roman, un tel bien-être, un vrai « mieux-être », tout simplement parce que les mots qu'il contenait ont trouvé une résonance toute particulière et unique en nous ? Se plonger dans un livre, s'immerger dans sa bulle, le temps de quelques pages, et se retrouver soi-même… Qui d'entre nous se s'est jamais projeté à travers une histoire, ne s'est jamais identifié à l'un des personnages, qui nous parlait mieux que les autres ? Bien plus que les mots qu'ils nous livrent, les plus férus d'entre nous sont d'autant plus attachés à la forme même du livre, aux sensations qu'ils provoquent lorsqu'on le touche, lorsqu'on le sent…
Et le livre, objet au coeur même du concept de bibliothérapie, devient alors comme un « doudou » rassurant, un pansement, un remède à même d'apaiser les maux de celui qui le détient…
L'essai de Régine Detambel regorge de références et d'exemples qui viennent étayer ses propos et même si quelques unes m'ont échappée, cela n'a pas réduit l'intérêt que j'ai eu pour ce livre, dont je conseille la lecture à toute personne qui s'intéresse de près ou de loin aux « pouvoirs » que peuvent avoir les mots sur nos maux…
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