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Voilà déjà longtemps qu'on s'acharne à « détruire le roman », à écrire des «anti-romans». Il est même probable que, pour l'essentiel, le meilleur, le plus vivant du roman depuis un demi-siècle soit sorti de cette volonté de suicide. Echenoz renverse la vapeur. Il croit au roman, même si cette foi n'est pas celle du charbonnier et qu'elle s'accompagne d'un regard critique et d'une bonne dose d'humour. A lire Les grandes blondes, il apparaît même que le romanesque, cette mise en présence de l'aléatoire, du libre-arbitre et de la nécessité, soit un des derniers espaces qui résistent à la vitrification de notre univers, une des dernières chances de l'irrégularité. Les grandes blondes
ressemble à une machine (...) qu'un ingénieur aurait savamment déréglée tout en la construisant. (...) La machine ainsi clandestinement sabotée n'en ferait plus qu'à sa tête. Elle aurait encore l'apparence d'un mécanisme, brillant, nickelé, impassible, rationnel et abstrait, mais elle serait, en fait, vivante et soumise au hasard. (...) Elle serait même tendre, et parfois mélancolique.
Juste retour des choses quand, ailleurs, c'est le vivant qui prend l'allure du machinal, que «le monde est taillé ton sur ton dans la même fibre synthétique». (...)° Revanche de l'écriture : il n'y a pas un chapitre, pas un paragraphe, pas une phrase dans Les grandes blondes qui puisse servir au cinéma.
Dire que j'aime les livres de Jean Echenoz est un euphémisme. Dire que celui-ci fait partie des bons -certes, comme tous les autres- l'est aussi. Le talent de l'auteur est de raconter des histoires et des personnages décalés, souvent de pas grand chose, juste un pas de côté, de nous faire rire et sourire et de faire tout cela avec une classe incroyable et un style littéraire qui me ravit. "Grand individu maigre autour de quarante ans, Salvador n'avait pas d'épouse. Ses longs doigts pâles jouaient en toute circonstance entre eux cependant que, plus charpentières que charcutières, les mains de Jouve s'ignoraient au contraire, s'évitaient avec soin, chacune enfermée dans sa poche la plupart du temps." (p.8)
Dans cette histoire de grandes blondes, Gloire fuit toute tentative d'approche de Jouve et Salvador et de leur détective Personnettaz et vivra moult aventures dans divers lieux tentant à chaque fois de se faire oublier. Ils pourront se croiser et là encore, ce passage est divinement narré : "Comme il atteignait le milieu du pont, parut le petit convoi de quatre wagons argentés qui assurent la liaison de Rouen à Paris : semblant façonnés en fer blanc, ils filaient sur leurs rails selon un axe nord-ouest-sud-est. Personnettaz empruntant pour sa part le pont dans l'axe sud-ouest-nord-est, les parcours de l'homme et du train se croisèrent à angle droit et, l'espace d'un centième de seconde, le corps de l'homme se trouva superposé à celui de la femme, à l'intérieur du train, qu'il venait de s'engager à chercher." (p. 84/85)
Je pourrais citer beaucoup d'autres extraits, certains flirtant avec l'écriture de Raymond Quenenau, du comique de répétition, du apparemment léger. J'aime les phrases et les mots de Jean Echenoz, j'y trouve un vrai plaisir de lecture comme rarement ailleurs. Les grandes blondes est à ce titre une grande réussite, plus une histoire en léger décalage. Excellent !
c est un roman particulier autant pour l histoire que pour la façon dont elle est racontée. Il se lit rapidement car l'histoire de cette tueuse qui parait etre une femme banale,nous intrigue et on attend le denouement avec impatience.
Paul Salvador a un projet : produire un documentaire sur les grandes blondes (comprendre : celles qui ont compté !). Il souhaite y inclure une séquence sur Gloria Stella, gloire éphémère disparue après un scandale criminel. Il lance l'agence de détective de M. Jouve aux trousses de la jeune femme, redevenue Gloire. Une chasse qui emmènera les enquêteurs de France en Australie puis en Inde, avant de se conclure en Normandie.
L'argument du roman est simple, mais donne lieu à de multiples péripéties, disons-le, assez improbables et incroyables, à la limite du fantastique avec le personnage de Beliard, le petit génie de Gloire. Tous les personnages sont caricaturaux. On finit par s'ennuyer un peu...
On s'ennuie d'autant plus que le style narratif choisi par Jean Echenoz ne facilite en rien la lecture : le narrateur se tient à distance de l'histoire et des personnages, se perdant parfois en conjectures sur ce qu'il auraient pu ou du faire... Un peu comme aurait pu le faire Béliard ?
En synthèse : j'ai déjà lu beaucoup mieux dans la littérature de Jean Echenoz. Là j'ai l'impression d'avoir
Paul Salvador et Jouve vont se rencontrer à la piscine de la Porte des Lilas. Pas pour nager mais boire un verre à la cafétéria surplombant les bassins et regarder les filles en maillots. Ils ont à discuter. Producteur d’émissions TV, Paul Salvador pense lancer une série qui s’intitulerait « Les grandes blondes » en y faisant réapparaître des stars blondes et oubliées. Il va demander à un privé, Jouve, de retrouver une dénommée Gloria Stella. Gloire Abgrall de son vrai nom. Il est conclu qu’on allait la retrouver, cette Gloire qui, elle, ne l’entend pas ainsi puisqu’elle veut, elle, qu’on lui fiche la paix. Ainsi va débuter une poursuite des plus rocambolesque.
L’imagination inventive débordante de Jean Echenoz conduit le lecteur au bord de précipices, aux confins du monde, dans les quartiers parisiens ou dans les campagnes bretonnes et normandes mais surtout sur les limites du réel et de l’irréel avec beaucoup d’humour. Du surréalisme d’un homoncule (Déf. Larousse : petit être vivant doué d’un pouvoir surnaturel que les alchimistes prétendaient fabriquer à partir de sperme et de sang), compagnon de Gloire qui, elle, n’hésite pas à précipiter les emmerdeurs dans le vide, à la réalité du système mafieux Indo-européen, le livre se lit tambour battant. Les descriptions paysagères sont d’une authenticité saisissante. Les personnages évoluent comme des acteurs sur des images cinématographiques.
Ce roman pourrait faire penser aussi à la poursuite d’un idéal qui ne l’est plus, une fois atteint… A la recherche d’un mythe. Le mythe des « grandes blondes ».
Bref, c’est l’univers Echnoz dans tous ses états… Jubilatoire, goguenard, exotique, talentueux.
Ce qui m’épate toujours dans les livres de Jean Echenoz c’est son vocabulaire recherché et sa façon de manier la grammaire, avec ce doute que l’histoire en elle-même n’est qu’un prétexte pour jouer avec les mots comme un chat s’amuse avec une pelote de laine. C’est toujours un travail d’écriture remarquable truffé de ’traites’ règles de grammaire et avec une syntaxe construite autour d’une solide ossature sous des airs qui n’en n’ont pas l’air… D’une invraisemblable aventure chimérique, il saura la rendre cohérente, légère et addictive juste avec le don inégalé d’une écriture ciselée à admirer et saluer.
« Pas forcément besoin d’être grande pour intégrer la catégorie des grandes blondes, pas nécessairement. (Il réfléchit.) Peut-être même, au fond, pas absolument besoin non plus d’être blonde, d’ailleurs. »
Jean Echenoz, c’est le maître avec son laser, le lecteur c’est le chat émoustillé qui bondit de surprise à chaque page tournée. Et quelles surprises ! Le roman met en scène des personnages, tous uniques et drôles, parfois pathétiques ou surréalistes, placés chacun sur une trajectoire qu’Echenoz s’amuse à brouiller de façon abracadabrante.
Paul Salvador, producteur d’émissions télévisées en manque d’inspiration, engage une équipe d’espions pour sortir une ancienne chanteuse (blonde) du désert médiatique. Il veut parler des blondes, grandes de préférence, parce qu’elles sont une catégorie humaine à part, ou parce qu’elles sont génétiquement différentes, ou simplement parce qu’elles arborent tantôt un blond vénitien, cendré, cuivre ou sable. Perdu dans son approche et pas très professionnel, Salvador s’entête à retrouver cette célébrité du passé pour illustrer son émission.
Celle qu’il recherche, en l’occurrence Gloire, une grande et sulfureuse blonde – qui pourrait être sortie d’une téléréalité si l’histoire ne s’était pas passée en 1995 – a fait les beaux jours de la chanson française avant de faire ceux de la prison pour le meurtre de son agent.
[...]
Probablement l’un des rares auteurs à avoir écrit un livre en l’hommage de son éditeur, Jérôme Lindon, Jean Echenoz est sur la première scène de la littérature française contemporaine. L’histoire en elle-même n’est pas pas inoubliable, mais Echenoz sait pérenniser le plaisir de lire. Les éditions de Minuit publient peu de livres mais beaucoup de grandes plumes : Jean Echenoz est de celles-là. Recommandé fortement !
L'article entier sur mon blog :
http://www.bibliolingus.fr/les-grandes-blondes-jean-echenoz-a80136656
Voici un livre qui sait nous réconcilier avec la femme, notamment la grande blonde aux jambes interminables et à la silhouette élancée, aux yeux de velours et aux lèvres boudeuses, bref, avec ces filles qui nous énervent franchement par leur attitude hautaine...
"Les grandes blondes" balaie tous les stéréotypes, puisque celle que recherche absolument le producteur d'émission télé est une vraie... teigne ! Elle se cache sous un visage quelconque, s'habille mal et veut se fondre dans le paysage pour disparaître absolument, se sentant en danger constamment, ayant par le passé vécu et provoqué des choses abominables... Gare à ceux qui s'en approchent, c'est une véritable bête sauvage qui sommeille en elle, les détectives lancés à ses trousses l'apprendront à leurs dépens.
Histoire loufoque, oui, pour le moins, quand on imagine Gloire en compagnie de son homoncule qui ne lui souffle pas toujours les meilleures idées. Aventure complètement déjantée, qui nous fait traverser une bonne partie du globe et nous rend témoins d'actes plus que répréhensibles.
Un livre qu'il fait bon lire, pour passer un bon moment, le sourire aux lèvres.
Le chef d'oeuvre d'Echenoz, à lire avec attention.
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