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D'un côté comme de l'autre, plongez dans deux univers dissemblables et pourtant communs, deux sociétés miroir qui cohabitent sans le savoir et qui se répondent sans le comprendre.
L'en-Bas est un monde où la terre n'est qu'un marécage piétiné par des bambous géants. Seuls les enfants agiles et légers peuvent arpenter la vase sans s'y enfoncer et y chasser au risque d'y périr écrasé. Ils courent alors, jusqu'au soir où ils rejoignent les adultes aux orées protectrices. Mais dans le coeur des frondaisons se cache une obscurité dont personne ne veut parler, d'où s'échappent les cris des victimes de l'Ogre. Aux adultes, le jour, de le rejoindre et de veiller chaque soir à ce que le monstre ne puisse atteindre les enfants. Jusqu'à ce que certains ouvrent les yeux sur l'obscurité et fassent naître l'espoir de ne plus nourrir l'Ogre.
L'en-Haut est un monde où les adultes marchent au-dessus de tout, traînant leurs échasses de plateforme en plateforme, tantôt cueilleurs d'eau ou pécheurs d'oiseaux. Ils survivent, tellement haut qu'ils ne savent plus vivre, que seuls les utiles ont droit de pitance et d'existence. Voutés à déformer leur corps, les marcheurs sont d'étranges oiseaux solitaires qui s'enivrent de vertiges, risquant leur vie au moindre déséquilibre, fermant les yeux sur ce que dissimulent les murs des plateformes, ce qui arrive à tous ceux incapables d'arpenter les nuages, enfants comme vieillards. Jusqu'à ce que certains arrêtent de fermer les yeux et fassent naître l'espoir d'une autre humanité.
Avec ce troisième roman, Isabelle Aupy nous offre un jaillissement d'humanité.
Ce livre tête-bêche est très original. Vous avez deux histoires voire trois car le livre peut être lu d’un côté ou de l’autre, ou encore en alternant les chapitres des deux côtés. Soit deux histoires autonomes et interdépendantes publiées par les excellentes éditions du Panseur que j’aime beaucoup.
Pour ma part, j’ai commencé par l’histoire d’En-Haut et c’est d’ailleurs la première partie du livre qu’a écrite l’autrice. Elle a inventé un monde qui n’est pas le nôtre et où les hommes et les femmes survivent. Dans l’En-Haut, le personnage principal est un petit garçon qu’on voit grandir et essayer justement de survivre. Il vit sur une plateforme dans les airs au milieu d’autres enfants abandonnés. Des échassiers chassent des oiseaux pour se nourrir et les déposent sur les plateformes où les gardiens les récupèrent. Les enfants ont peur des gardiens qui sont assimilés à des ogres. Les femmes accouchent et repartent rapidement chasser pour survivre, abandonnant les enfants. Les personnes âgées quand à elles sont aussi abandonnées. Soit vous êtes actif, utile et vous recevez à manger, soit vous devez vous débrouiller pour vivre.
Dans l’En-Bas, on vit au bord des marais. Les enfants sont pris en charge par les adultes. Ils n’ont pas un père et une mère, mais plein de pères et de mères qui s’occupent d’eux. Ce sont les enfants qui chassent, car leur poids plume leur permet de ne pas s’enliser et de traverser les marais. Mais attention, selon l’âge que les adultes donnent aux enfants, ils changent de catégorie et de fonction. Et passé 15 ans, la vie devient beaucoup moins drôle. C’est le moment où l’on rencontre le personnage principal de la deuxième histoire. Là aussi il est question d’un ogre qui terrorise tout le monde bien que personne ne le voit jamais.
A travers ces deux histoires, l’autrice aborde beaucoup de questions sur notre société qui l’animent. Cela peut paraître sombre, mais Isabelle Aupy y a également glissé un message d’espoir. Je lis peu de littérature de l’imaginaire et je pense que ce roman n’est pas à classer dans cette catégorie. Certes il s’agit d’un monde inconnu mais c’est surtout un prétexte pour parler de notre monde où la domination est prégnante, où chacun veut survivre au détriment des autres. J’ai été emportée par l’écriture poétique de l’autrice. Elle utilise beaucoup les métaphores avec notamment la figure de l’ogre. Et au-delà de l’enfance, chacun des personnages principaux vit une histoire d’amour.
Encore un texte unique et original des éditions du Panseur qui rejoint mes étagères pour ma plus grande joie.
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