"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
1970. Le Benelux est le théâtre d'une révolution inédite, d'inspiration prétendument féministe : en réalité un régime totalitaire fondé sur une forme d'apartheid excluant les hommes de toute vie sociale, mais n'en aliénant pas moins les femmes soumises à un très sévère embrigadement. Le roman croise habilement deux histoires : celle d'une " sujette " du régime, Astrid, infirmière de son état, dont la vie quotidienne, décrite par le menu, est le prétexte à un tableau de la vie dans l'Empire (État policier, omniprésence des " brigades de sauvegarde de la Révolution ", strict contrôle des naissances pour exterminer les mâles, culte permanent des " Bergères " - aussi bien la fondatrice du régime, dite la " Grande Bergère ", aujourd'hui morte, que sa fille, actuellement au pouvoir dite " La Bergère ", selon le modèle de Kim-Il- Sung et de Kim Jong-Il. Un jour, Astrid se trouve choisie, à sa grande surprise, parmi les heureuses " invitées " aux cérémonies célébrant l'anniversaire de l'avènement au pouvoir de la " Bergère ". Celle-ci la remarque et l'invite à la cour où apparaît à ses yeux ébahis, au milieu d'un luxe et d'une corruption indécents, l'envers du décor, la réalité paranoïaque du pouvoir.Parallèlement, un groupe d'intellectuels français " féministes " est invité à venir visiter la Belgique - voyage historique puisque c'est la première fois depuis des années que ce pays ouvre ses portes. Sur le modèle des voyages d'intellectuels dans les pays communistes au XXème siècle, ou plus récemment des visites officielles de parlementaires en Corée du Nord, les brigadières les " promènent " à leur gré et leur font voir des ersatz de " villages Potemkine " pour tromper leur curiosité. Aveuglés par leur foi dans la Révolution, nos Français n'y voient globalement que du feu. Toutefois, à leur retour en France, le groupe se déchire, entre les pro-belges et les sceptiques qui veulent dire la vérité. Avant qu'à une date indéterminée, le régime belge ne tombe, sombrant dans une débâcle pitoyable.
Je ne sais pas d'où vient ce livre coincé dans ma PAL depuis des années.
Acheté où, quand, pourquoi ?
Mystère.
Donc, découverte totale, et découverte complètement inattendue.
C'est de la science fiction, ou plutôt de la politique fiction.
Dans les années 70, en Belgique, les femmes ont pris le pouvoir.
Dirigée par Ingrid, puis par sa fille Judith, nommées « Les bergères », les hommes sont relégués au dernier plan, utilisés, très souvent émascules.
Le pays est complètement fermé au monde extérieur, personne n'entre plus en Belgique.
C'est le royaume des femmes qui vouent toutes un culte sans limite à La bergère.
Description d'un monde totalitaire comme il en existe, mais l'originalité ici est que ce sont uniquement des femmes qui mènent le jeu.
L'histoire est racontée par un groupe de français qui a obtenu une autorisation exceptionnelle pour entrer dans le pays, et par une habitante du pays.
C'est assez inédit, décalé, pas mal écrit.
J'ai parfois trouvé que c'était un peu longuet, mais globalement, ça se laisse lire.
L'auteur renverse totalement le schéma occidental. Ce sont les femmes et que les femmes qui sont au pouvoir. L'objectif est de dénoncé tous les excès. J'ai adoré l'exercice même si le texte présente quelques longueurs, elles sont gommées par un style agréable à lire et par la progression dans l'excès. Un livre qui permet une remise en cause de la pensée "banale".
Né en 1978 en Belgique, Bernard Quiriny a publié deux recueils de nouvelles dont le très remarqué "Contes carnivores" en 2008 au Seuil. "Les assoiffées" est son premier roman.
Inventer une telle histoire n'était pas gagner d'avance mais Bernard Quiriny, jeune auteur prometteur, s'en sort plutôt bien malgré quelques points négatifs.
La psychologie des intellectuels français qui visitent la Belgique est assez plate. J'aurais aimé qu'elle soit plus recherchée, qu'on en sache davantage sur le passé de ces personnages.
Si la délégation française est "aveugle" et se laisse convaincre par les propos et explications de Kristin, leur guide (désignée par la Bergère) lors de leur visite officielle, la face cachée du régime, véritable dictature, est révélée au lecteur par le journal d'Astrid, une jeune infirmière. Les hommes se font émasculer et sont parqués dans des camps. Quant aux femmes, elles vivent dans des "appartements sororaux" et doivent se conformer à un état d'esprit bien précis.
Le régime totalitaire de la Belgique a inventé une technique artificielle pour la fécondation mais celle-ci est loin d'être infaillible. En effet, Judith qui possède un fils, le cache chez une nourrice et écrit à ce sujet : "Notre pays est conçu pour les femmes parfaites ; pour nous, qui aspirons à la perfection sans l'atteindre, c'est en permanence la peur du faux pas, la peur d'être en dehors des lois."
En fait, les deux récits (la visite des intellectuels français et le journal d'Astrid) s'enchevêtrent et dévoilent au lecteur un régime où la terreur et la peur oppressent hommes et femmes.
"Les assoiffées" est un roman audacieux, burlesque, féroce, traité avec intelligence. Dommage qu'il souffre de nombreuses longueurs.
Personnellement la fin du livre m'a surpris mais je ne la dévoilerai pas ici pour ceux qui n'ont pas (encore) lu le livre. Sinon, c'est un roman que je verrais bien adapté au cinéma.
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