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L'auteur interroge l'origine de ce fossile, le sens de la vie et de la mort, dans un récit où le thème de la disparition de l'enfant, si cher à l'auteur, est prépondérant. Quelle est l'histoire de cet enfant, Homo Sapiens du Néandertalien, découvert en juin 1933 par Claudius Côte dans le Quina, actuelle Charente ? L'auteur se met à la place du visiteur et tente de déceler les mystères de cette « horreur minuscule ». Avec surprise, le lecteur s'aperçoit que l'auteur met en doute la légende du panneau où il est inscrit « l'un des plus anciens hommes modernes français ». Il va même jusqu'à désacraliser l'objet qui est présenté. Comment ce « débris d'ossement sur lequel deux dents sont plantées » pourrait être notre ancêtre à tous ? Comment pourrait-on s'attendrir devant lui ? Ce sont autant de questions auxquelles il essaie de répondre. En tentant de faire des liens entre le passé et le présent, entre ce fossile et la société actuelle, il en vient à l'idée que le musée est un immense reliquaire dont les objets sont là pour fixer l'éphémère, ce qui a été mais qui n'est plus.
L'objet est ensuite l'occasion pour l'auteur de faire jaillir les souvenirs d'enfance, une époque lointaine passée à jouer à la chasse aux fossiles. Un simple caillou a quelque chose de magique pour l'enfant, qui fait de la chasse aux fossiles une chasse au trésor.
A cette époque, il voulait être archéologue, suivre les traces d'Heinrich Schliemann. Il voulait faire confiance à la fiction pour que la réalité se manifeste ensuite. Il ne voulait pas être archéologue pour retrouver mais pour faire advenir.
S'il tente encore de raconter, d'imaginer l'histoire de cet enfant il se montre vite impuissant. Il n'a qu'une seule certitude : il est notre ancêtre à tous dans la mesure où il nous rappelle notre mort. Ce fossile serait là pour nous rappeler notre vanité, dans une atmosphère très pascalienne. L'auteur nous dit que nous finirons tous par disparaître, il ne faut pas s'émouvoir devant ce fossile, qui est seulement là pour témoigner de ce qui n'est plu mais qui a été : seule la présence de l'absence demeure.
A partir d’un objet choisi dans la collection du Musée des Confluences de Lyon qui devrait ouvrir très bientôt, l’auteur déroule une histoire. Philippe Forest a choisi un fragment de mâchoires découvert par Claudius Côte en juin 1933 dans un coin des Charentes, celui d’un enfant de 5 ans.
Ce fragment d’os avec ses deux dents l’amène à poser plusieurs questions ; sur les souvenirs, notre relation au passé, la survivance. Pour l’auteur, quelle relation avons-nous avec, entre autre, ce morceau de mâchoires ? Devons-nous le considérer comme une relique « pas si différente, au fond, dans la vitrine de son musée, de celles qu’exposent les églises et desquelles les dévots mendient un miracle : cheveux, dents, crânes, tibias et fémurs de saintes et des saints » ? et les musées, ce lieu où l’on parle à voix basse, déambulant silencieusement « rien d’autre qu‘une sorte d’immense reliquaire » ?
Diatribe sur ces visiteurs qui, à l’heure de l’ancienne messe dominicale, passent de vitrine en vitrine, s’extasiant comme devant les reliques. Il aimerait beaucoup que les visiteurs que nous sommes, méditent « sur le mystère inouï du monde », que nous nous attachons un peu plus à la vie de ces gens et non à l’objet présenté, fut-il d’or et de rubis, que l’on pense ancêtre et non relique.
Cette relique le ramène à son enfance où il jouait à la chasse aux fossiles avec les gars du village. Ce temps de l’enfance qu’il qualifie de « préhistorique » « Car le temps de l’enfance, pour celui qui l’évoque, n’est pas moins éloigné que la plus obscure des préhistoires » peut-être parce que les lambeaux de notre mémoire sont comme des ossements, des reliques. D’autant que ces gamins, il ne les a jamais revus et que, pour lui, ils sont restés à l’état d’enfant « Immobilisés par ma mémoire dans une ou deux attitudes aussi sûrement que s’ils avaient été saisis vivants parmi les sédiments du temps. Des enfants fossiles. »
La trace, l’empreinte que nous laissons comme ces mains sur les grottes qu’ils relient à l’empreinte de sa propre fille faite à l’école. Côte a inscrit son nom et un numéro sur le fragment de mâchoire comme pour laisser une trace de cette découverte. Besoin d’identification ? Besoin de laisser une trace ?
Philippe Forest amène à une réflexion sur le temps et ses paradoxes, sur la transmission, les traces, l'absence, la mort. En effet, cet enfant est notre ancêtre alors qu’à 5 ans, il est mort sans descendance « Un enfant de cinq ans vieux de trois cent vingt siècles. Plus jeune et plus âgé que nous. »
Un petit livre qui ne se lit pas d’une traite, mais que l’on médite après l’avoir fermé.
L’écriture de Philippe Forest est minutieuse, fouillée, précise. J’ai aimé ce livre qui ne se lit pas d’une seule traite et sur lequel on médite après l’avoir fermé.
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