Inspirée d’une histoire vraie, cette BD apporte des conseils et des solutions pour sortir de l'isolement
La Crau, désert de pierres aux portes d'Arles. Pays ras, pays nu, abandonné au mistral et aux brebis. C'est là que vivent Nel et Matt, l'un, fils et petit-fils de bergers, aujourd'hui photographe, l'autre, constructeur de toilettes sèches publiques, réalisateur à ses heures perdues.
Entre eux une amitié forte, belle. Jusqu'au jour où, travaillant à un nouveau film, Matt s'intéresse à la vie de deux cousins de Nel aujourd'hui disparus. Deux frères maudits, qui ont traversé comme des comètes ces mêmes paysages, se consumant à toute allure, en pleines années 1980.
Allers-retours à Madagascar, adolescence sans parents, fêtes, violence, liberté, insouciance :
La trajectoire des deux frères, aussi brève qu'intense, se recompose peu à peu. Échos et correspondances se tissent entre passé et présent, renvoyant Matt et Nel à leurs propres choix, nous interrogeant, à notre tour, sur notre place dans le monde.
Nel et Matt sont deux amis inséparables. Matt entreprend de tourner un film sur le pays d'Arles, le désert de la Crau. Son point de départ : une boîte de nuit, symbole d'une époque. Cela le mène à l'histoire de deux frères, Christian et Fabien, qui s'avèrent être les cousins de Nel. Deux frères différents, aux destinées finalement comparables. Matt mène son enquête et va à la rencontre des différents membres de la famille et des amis pour recueillir leurs témoignages.
Une belle histoire parfois difficile à suivre. Une écriture en effet un peu particulière : les dialogues ne sont pas présentés tels quels. On doit deviner qui s'exprime et quel ton il empreinte : aucune ponctuation. L'auteur va seulement à la ligne et met un point !
Des moments d'émotion qui rattrapent la chose et finalement une histoire originale.
L'un s'appelle Fabien.
L'autre, Christian.
Ils sont frères, et parfois on ne sait plus s'ils s'aiment, se fuient, se liguent ou se détestent.
Deux frères aux passions, aux colères, aux amitiés, aux destructions surdimensionnées.
L'un s'appelle Nel.
L'autre, Matt.
Ils sont amis, de cette belle amitié virile qui ne s'explique pas.
Nel est le cousin de Fabien et de Christian.
Matt, celui qui décide de leur consacrer un film...
C'est d'une plume parfaitement huilée que Sylvain Prudhomme, loin de se contenter d'un ou deux portraits, decide de s'attaquer à la nostalgie de toute une époque. Mieux ! Plus il dénoue les fils des portraits des absents, plus Nel et Matt prennent de l'envergure.
Faut-il maîtriser sa plume, pour accomplir ce tour de force sans accroc, sans faiblir.
Ce sera peut-être mon seul petit reproche, s'il en faut un. le ton est donné tout de suite et ne faiblit ni ne gonfle. Un poil trop linéaire, selon mon goût. Ce qui ne retire rien à la beauté du texte malgré tout.
La Crau. 30 kilomètres de désert au milieu de la Provence, recouvert de pierres comme des galets, balayé par le mistral. le vide, le silence quand les milliers de brebis qui composent ce paysage sont en estive les mois d'été. Je ne connaissais pas cet endroit avant de lire l'histoire et l'écriture majestueuses de Sylvain Prud’homme.
Maintenant, je rêve de fouler cette terre de légende et d'assister aux transhumances des troupeaux par les bergers qui mènent une vie âpre et solitaire sans avoir la reconnaissance qu'ils méritent.
Je n'ai pas quitté ce livre, tenue en haleine par les vies fulgurantes et attachantes des personnages. Dont Nel, photographe, fils et petit-fils de berger qui continue à m'accompagner.
Je vois ses photographies, je ressens son amitié pour Matt, un expatrié soucieux d'écologie à la tête d'une entreprise de toilettes sèches publiques.
Passionné par la réalisation, Matt rêve de faire avec Nel un reportage sur "la chou", une boîte de nuit improvisée dans la Camargue où les musiques de tout horizon se mêlaient joyeusement dans une ambiance baba cool et attirait une foule de jeunes de plus en plus nombreux. Plus que "la chou", Matt veut raconter les gens qui l'ont fréquenté porteur d'une mode et d'une époque nouvelles, celles des années 1970-1980. Une jeunesse fébrile et libre quitte à se brûler dangereusement les ailes.
Pourtant Nel se montre un peu plus réservé sur le projet de son ami en raison des imbrications avec son histoire familiale dont il ne souhaite peut-être pas rouvrir les plaies.
Nel sans le savoir encore porte en lui le double héritage familial, celui d'un berger et d'un papillon. Matt contre toute attente sera le passeur de son histoire.
C'est pour moi un très grand coup de cœur. Je tiens à souligner aussi la magnifique photo de la couverture qui est celle de Lionel Roux, un complice de Sylvain Prud’homme, dans la rédaction de "légende"
Sylvain Prudhomme je l'ai découvert par hasard grâce au Prix des Lectrices de ELLE 2015. Avec Les Grands, il a réussi l'exploit de me capter et de m'émouvoir avec une histoire à mille lieux de mes centres d'intérêt, celle d'un groupe de musiciens en Guinée Bissau. Sa petite musique m'a longtemps trotté dans la tête, preuve de l'efficacité de sa plume. Ce fut sans conteste l'une des belles découvertes de cette aventure.
Avec Légende, on retrouve la douce nostalgie qui guidait déjà la narration du précédent roman. Par contre, point d'exotisme cette fois. Le décor est parfois désertique certes mais au sud de la France, la plaine de la Crau, aux portes de la Camargue. Une des rares étendues où la nature a encore tous les droits. Le pays de Nel, fils d'une lignée de bergers, devenu photographe, un métier qui lui permet d'immortaliser ces paysages tant aimés. Légende est une histoire d'amitié. Celle de Nel et de Matt, un autodidacte britannique tombé amoureux de la région, entrepreneur et réalisateur de documentaires. C'est Matt qui le premier a l'idée de faire un reportage sur une boîte de nuit célèbre dans toute la région dans les années 80, La Chou, haut lieu de plaisirs et d'excès en tous genre. C'est ainsi qu'il en vient à enquêter sur deux cousins de Nel, aux destins tragiques. Fabien et Christian, deux frères dissemblables, dont les trajectoires se sont écartées pour mieux se rejoindre dans la mort.
"En écoutant Toussaint hier je me suis rendu compte que c'est ça qui me touche, plus que tout : la trajectoire des uns et des autres. Ce qu'ils ont vécu. Je me focalise depuis le début sur La Chou, mais ce qui me plaît au fond dans ce lieu c'est toutes ces vies qui s'y sont rencontrées. Tous ces chemins qui s'y sont croisés."
En remontant le cours de leurs vies, c'est toute une époque qui resurgit et pour Nel une plongée dans des sentiments enfouis depuis longtemps. La figure de Fabien, son influence marquante sur la vie de Nel encore aujourd'hui. Matt ne se rend pas tout de suite compte du trouble que ses recherches provoquent chez Nel et dont leur relation pourrait pâtir. A moins qu'elle n'en sorte renforcée ?
C'est tout le charme de ce roman que de prendre son temps. Le temps du souvenir, le temps de l'introspection, le temps du partage. Un charme très différent de celui des Grands, plus subtil, plus rude aussi, en phase avec ce décor désertique et minéral. Et une portée beaucoup plus intime aussi, qui interroge sur le mystère des liens qui perdurent par-delà la mort.
"Est-ce que c'est pas toujours un peu sa propre mort qu'on prépare en relisant la vie des autres. Est-ce que c'est pas surtout à ça que servent les histoires : nous tendre un miroir."
Ce miroir, Sylvain Prudhomme le tend aussi à son lecteur qui voit s'y refléter le fantôme des années 80, sur fond de propagation du Sida. Et se voit offrir cette sensation étrange de faire corps avec Nel en épousant ses questionnements sur la façon dont se bâtit une vie, se forge une personnalité. On dirait bien qu'il touche une corde sensible.
Voilà qui confirme tout l'intérêt de l'écriture de Sylvain Prudhomme. En deux livres très différents il parvient à transmettre des émotions particulières et à marquer les esprits de sa touche singulière et profondément attachée à l'humain. Rendez-vous pour le suivant.
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