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Avec l'inauguration au début 2016 de la succursale du Louvre à Abu Dhabi, le musée accède à un nouvel âge : celui de l'entreprise et du décentrement hors d'Occident.
La construction du musée du Louvre - en compagnie d'autres musées, comme le Guggenheim Abu Dhabi - sur la plate-forme muséale de l'île de Saadiyat, représente en effet un effort inédit de constitution d'un ensemble intégré voué au tourisme et réalisé par les grands noms de l'architecture mondiale comme Jean Nouvel, Frank Gehry, Norman Foster, Tadao Ando, Zaha Hadid, entre autres. Le Louvre Abu Dhabi, tout comme d'autres musées construits récemment deviennent ainsi des lieux d'attraction touristique, non seulement par les oeuvres qui y sont exposées, mais également parce qu'ils deviennent eux-mêmes des oeuvres d'art offerts à la contemplation esthétique du public venu les visiter. Mais si les musées sont exposés, font désormais l'objet d'une exposition artistique en tant qu'oeuvres d'art architectural, ils s'exposent également à la contestation en raison de leur origine occidentale. Le Louvre Abu Dhabi tente ainsi de répondre aux multiples critiques exercées à l'encontre du musée, prétendument « universel » mais en réalité occidental, en se présentant comme le « premier musée universel du xxie siècle dans le monde arabe ». Parmi ces critiques, celle de l'artiste libanais Walid Raad s'avère particulièrement dévastatrice puisqu'elle fait véritablement exploser le musée du Louvre en montrant que ce musée, de même que tous les autres musées occidentaux, emprisonnent les oeuvres d'art arabo-musulmanes dans une cage muséale dont cet artiste entend les faire sortir.
La condition carcérale des oeuvres d'art, en particulier de celles que l'Occident s'est appropriées et qu'il a emprisonnées tout au long de son histoire coloniale, est donc au coeur de ce livre. L'auteur, dans la lignée de Michel Foucault, entend en effet montrer que le musée constitue une véritable « hétérotopie », c'est-à-dire un lieu d'extra-territorialité, à l'instar de la prison ou de l'asile d'aliénés, qui prive de sens la totalité des cultures qui y sont exposées et qui sont placées de façon totalement arbitraire sous la juridiction de celle qui prétend les ordonner toutes sous le masque de l'universalité : la culture occidentale. De cette façon, on peut estimer que l'exportation du musée hors d'Occident posera de façon inéluctable la question de la pertinence de cette forme d'exposition en tant qu'instance légitime de représentation de l'altérité.
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