Quelles seront vos prochaines lectures ?
Des voix s'élèvent, s'approchent du centre de la scène qu'est ce livre et s'expriment. Ce qui les lie, c'est qu'elles portent toutes des contradictions. On pourrait s'en inquiéter, dans un monde où il faut constamment choisir son camp. Mais ici, l'homme n'est ni bon ni mauvais. Il hésite, souffre, espère et doute, comme nous tous. N'est-ce pas là l'expérience qui est la nôtre aujourd'hui ? Chercher tant bien que mal à accorder nos paroles et nos actes ? Tenter de trouver du sens là où il n'y en a plus ? Voir que les choses sont sans espoir, et pourtant être résolu à vouloir les changer ?
Une adresse aux lecteurs qui intensifie la poésie, une façon de se réapproprier le discours sous forme de nouvelles. Antoine Wauters va toujours plus avant dans l'exploration des frontières du roman, et nous le suivons.
Quelles seront vos prochaines lectures ?
Un recueil de 12 nouvelles magnifiques d'intelligence, de force, de poésie que je vais relire plus lentement pour en savourer toute la magie.
Douze textes courts aux sujets très différents, qui touchent profondément le lecteur par leur force évocatrice de maux de notre société, de questionnements, de réflexions emballés dans une forme poétique et un style remarquables. Comme toutes ces formes d’écriture, textes courts, nouvelles, il est difficile d’extraire un fil conducteur, puisqu’il y en a autant que de scènes différentes, et l’ensemble ne peut être apprécié qu’à l’aune du grand plaisir pris à sa lecture.
Moi qui suis pétrie de contradictions, je ne pouvais que me retrouver dans ce livre. La première nouvelle m’a cueillie pour m’emmener là où j’avais envie d’être bousculée. Et la seconde m’a bouleversée par ce qu’elle évoquait de ce que j’avais vécu et fait subir… Vous n’y comprenez rien, c’est normal. C’est tellement personnel. Car, c’est aussi ça la littérature. Des mots qui te remuent parce que tu as l’impression qu’ils ont été écrits pour toi. Alors, en deux mots, pour éclairer votre lanterne : dans ce second texte, un vieil homme fuit avec quelques autres l’Ehpad des Six myrtilles.
« A croire qu’ils se moquent de nous ! Le ridicule des noms de résidence pour vieux, mon amour… »
Ce texte oscille entre vitupérations contre un système et poésie du souvenir, avec une magnifique déclaration d’amour à celle qui n’est plus. « Qui a dit que vieillir, c’est oublier ? »
« Pendant dix ans, ils ont placé des bavoirs autour de chacun de mes repas, mis des pailles dans l’eau à la grenadine de mon vin, et m’ont aboyé dans les oreilles pour que je reste tranquille. Ils disaient que j’étais agité, que j’étais dur de la feuille, que j’avais perdu la boule et que la maladie de la mémoire m’avait atteint. T’ai-je dit que pendant tout ce temps tu n’as pas quitté mes pensées, Lucia ? »
Ces douze textes ne sont pas vraiment des nouvelles, mais plutôt des monologues enragés. Avec l’utilisation du « nous » collectif, l’auteur libère les paroles. Ça bouscule, ça remue, ça dérange, ça gratte, et c’est ça qui est bon !
De l’amertume de l’enfant qui subit la violence d’un père, aux regrets des femmes d’avoir mis des enfants au monde, ce livre est un manifeste pour un monde meilleur. Les mots de Wauters, on a envie de les lire à voix haute, de les cracher à la face du monde pour essayer de redonner du sens à nos vies.
Et cette nouvelle adressée à Dieu de celles qui arrivent au paradis, celles qui ont vécu dans le respect de la religion, dans le silence, qui n’ont pas osé, mais qui n’ont pas écouté non plus leurs enfants, celles qui ont travaillé dans la recherche, sur les textes anciens, loin du présent de notre société, celles qui ne peuvent même pas offrir trois euros à la main tendue qui leur demande, parce qu’il est pauvre, parce qu’il est peut-être chinois ou coréen, parce qu’il les gêne, là, sur leur chemin, parce qu’il est un caillou dans leur chaussure, parce qu’il met en évidence leurs petites contradictions. J’ai envie de la lire, de la déclamer, de l’offrir à voix haute et intelligible à tous ceux dont les oreilles sont prêtes à écouter ce qui dérange.
Questionnements, remises en cause, dénonciations, et surtout des réflexions. Oui, c’est noir, oui c’est désespéré, mais c’est le reflet de notre monde, de notre société, de ce que les hommes ont fait et laissent aujourd’hui à nos enfants, parce que «l’avenir est dans le regret ».
http://leslivresdejoelle.blogspot.com/2022/04/le-musee-des-contradictions-dantoine.html
COUP DE COEUR
Ce texte est un recueil de douze nouvelles sous la forme de "discours" qui permettent à Antoine Wauters d'interroger notre monde. Ce sont des voix qui portent toutes des contradictions." Nous nous rendons dans notre musée à nous, le musée de la contradiction. Un musée où il y a, d'un côté, l'envie de se faire un peu de mal, de l'autre, l'envie de se faire un peu de bien."
A travers ces voix Antoine Wauters donne la parole à des faibles, des blessés de la vie, "des mioches non choyés et salement tombés sur terre... Nous n'avons plus de place où vivre. Et nous brûlons", à des femmes qui rêvent d'un monde habitable pour leurs enfants loin de la violence du monde, à une bande de résidents d'une EHPAD qui prend la poudre d'escampette dans le "discours d'une troupe en pyjama", à deux enfants dans le "discours du château en cendres" qui fuient la violence d'un père et retrouvent un peu de tendresse auprès de leur oncle mort dans les ruines du château...
Il émane de ces différentes voix de la rage, de la révolte, des envies de liberté. Une lueur d'espoir brille car, si toutes ses voix savent que tout est perdu, elles gardent quand même la volonté de ne pas baisser les bras et l'espoir de voir changer le monde.
Une lecture génératrice de multiples émotions. Des nouvelles de quelques pages d'une telle densité que j'en ai espacé la lecture sur plusieurs jours tellement certaines me prenaient aux tripes. Un texte aussi fort par son fond engagé que par la puissance et la poésie de l'écriture d'Antoine Wauters.
Mais quel livre quel livre et quel auteur !
bluffant à chaque fois
même en devenant « poétiquement plus consommable »
Ici de très courtes nouvelles
hybrides fictives/philosophiques
qui s’imbriquent à l’endroit du cerveau combatif
cette maison d’édition me ravit de ses choix plutôt osé, engagé et engageant
lisons Antoine Wauters et vivons conscients
(la littérature à l’ouverture me semble un beau programme politique)
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