L’île est vilaine...
« Le dimanche qui suivit, différents signes annoncèrent que quelque chose allait se produire.
Ce fut déjà et cela dès l'aube une chaleur oppressante, sans brise aucune. L'air semblait s'être solidifié autour de l'île, dans une transparence compacte et gélatineuse qui déformait ça et là l'horizon quand il ne l'effaçait pas : l'île flottait au milieu de nulle part. Le Brau luisait de reflets de meringue. Les laves noires à nu en haut des vignes et des vergers frémissaient comme si soudain elles redevenaient liquides. Les maisons très vite se trouvèrent gorgées d'une haleine éreintante qui épuisa les corps comme les esprits.
On ne pouvait y jouir d'aucune fraîcheur.
Puis il y eut une odeur, presque imperceptible au début, à propos de laquelle on aurait pu se dire qu'on l'avait rêvée, ou qu'elle émanait des êtres, de leur peau, de leur bouche, de leurs vêtements ou de leurs intérieurs. Mais d'heure en heure l'odeur s'affirma. Elle s'installa d'une façon discrète, pour tout dire clandestine. »
"Livres de chevet, livres fondateurs, livres vers lesquels la main et l’âme sans cesse reviennent, livres que ni les années, ni les lectures n’épuisent, livres d’une vie."
A la toute pointe de l’Archipel du Chien, sur une toute petite île pratiquement inconnue de tous, habite une petite communauté de pêcheurs qui vit de la pêche de la vigne, des oliviers et des câpriers. Le calme règne sur cette île où rien ne se passe jusqu’à ce que trois corps de jeunes hommes noirs soient retrouvés sur la plage un matin par la Vieille, l’ancienne institutrice de l’île.
Aidé de Spadon, un pêcheur hors pair mais pas très malin, d’Amérique, l’homme à tout faire et du nouvel instituteur venu du continent, le maire décide de cacher les corps et de ne rien dire à personne. Cette découverte macabre pourrait ruiner le projet des Thermes , car, en plaçant leur île sous le feu des projecteurs et des médias, cette publicité pourrait faire fuir les investisseurs. Or, le maire tient plus que tout à ce projet qui pourrait faire revivre son île, mais l’instituteur, homme honnête et responsable, quant à lui, résiste et veut que soit contactés police et juge du continent afin de mener l’enquête. Après réunion, Spadon , Amérique, le curé et la Vieille abondent dans le sens du maire. Il en sera donc ainsi : il ne s’est jamais rien passé et chacun doit garder le silence. Mais l’instituteur cherche à comprendre et n’admet pas ce qu’ils ont fait. Tout pourrait en rester là mais du continent débarque un matin un commissaire à la « Columbo » qui a trouvé un os à ronger et n’entend pas le lâcher. Seul l’instituteur pourrait l’aider dans sa quête…
Philippe Besson nous livre ici un roman sombre dans la veine du « Rapport Brodeck » et des « Âmes grises » où il nous plonge à nouveau dans la noirceur de la nature humaine.
La tension et le suspense qui règnent en maître jusqu’à l’insoutenable, nous happent et nous tiennent en haleine jusqu’au final.
C'est la première fois que je lis Philippe Claudel ; j'ai été séduite.
Séduite par sa plume si belle et poétique.
Séduite par l'histoire ou plutôt le conte. 3 cadavres d'hommes noirs échouent sur la plage d'une île et sont retrouvés par des villageois. Ils ne vont pas les traiter avec la décence qui se doit.
Je n'ai pas trouvé le ton modalisateur ; c'est noir comme les hommes peuvent l'être.
Il y a de la lâcheté, de la méchanceté, aucune rédemption, de la manipulation, des vies et des enfances fracassées.
C'est une histoire poignante, déchirante et, malgré tout, elle reste belle à lire.
Très belle écriture, j'ai adoré. Tous les sentiments se découvrent et montent en gamme. L'ignorance de l'autre, la peur, la haine, la violence, le mensonge. Mr Claudel ne se fait aucune illusion sur la nature humaine.
Alors que 3 corps sont découverts échoués sur la plage, Le Maire, le Docteur, L'instituteur et le Curé décident de faire disparaitre les corps comme si ce n'était jamais arrivé. La vie suit son corps jusqu'à l'arrivée du Commissaire qui va les mettre les uns et les autres face à la noirceur de leur âme.
Comme souvent chez Claudel c'est sombre, les personnages sont au delà du réel sans être caricaturaux, créatifs et prêts à tout pour ne perdre la face. Le commissaire est bien mystérieux et il nous dévoile les perversions au compte goutte.
Magistral.
Lorsque trois cadavres de jeunes noirs s’échouent sur une plage d’une île volcanique de l’Archipel du Chien, le Maire décide de s’en débarrasser. Il ne tient pas à troubler la tranquillité de son île peuplée de pêcheurs et d’agriculteurs, et puis il est aussi question d’un projet thermal pour favoriser le tourisme. Il va passer un pacte de silence avec le reste des témoins de cette macabre découverte : le docteur, le curé, l’ancienne institutrice à la retraite, le nouvel instituteur venu du continent et un pêcheur. A ce stade de l’histoire, chacun aurait pu retourner vaquer à sa petite existence avec quelques troubles de conscience mais c’est sans compter l’entrée en scène d’un étrange personnage…
Une fable contemporaine sur la nature humaine. Si « elle se passe ici, comme elle aurait pu se dérouler là », l’actualité nous fait porter notre regard vers une certaine île grecque. Toute la palette sombre des sentiments humains y est habilement dépeinte. Au fur à mesure que le drame se noue, le ciel en aplats bleus vire à l’anthracite et l’île est recouverte d’une couche noire de lave refroidie. La nature se fait puissance vengeresse.
L’un des personnages raille le médecin lorsque celui-ci lui répond qu’il lit des livres pour comprendre ses semblables. Avec celui de Philippe Claudel, ils ne sont pas fréquentables surtout lorsqu’ils sont persuadés d’agir pour le bien du plus grand nombre. L’enfer est pavé de bonnes intentions, et l’île en est une préfiguration. Certains lecteurs ont trouvé les personnages trop stéréotypés, peut-être n’ont-ils pas compris que la forme de fable l’exigeait pour parler de la lâcheté ordinaire ou peut-être qu’ils n’ont pas supporté le miroir grossissant tendu par celle-ci…
Philippe Claudel est un amoureux de Louis-Ferdinand Céline. C'est à dire qu'il est un sentimental des débuts de romans, des récits incontournables et décisifs. On se souvient des premiers mots de Mort à Crédit: « Nous voici encore seuls. Tout cela est si lent, si lourd, si triste... » Lourd et lent, ces mots rappellent ceux d'un autre maître en écriture de Philippe Claudel: André Hardellet et son roman à scandale: Lourdes, Lentes. Écriture puissante, tracée au sabre, qui influença fortement l'auteur des Âmes Grises, tout au long d'un Inhumaines, le précédent livre du romancier.
Littérature de rupture, contagieuse en outrages et autres provocations. Avec L'Archipel du Chien, Claudel revient à ses premiers amours et au dynamitage d'un certain manichéisme. Comment devient-on complice? Comment devient-on coupable ? Ces questionnements, digne d'un Kafka, Claudel les met en place au fil de ce roman passionnant. Sorte de syncrétisme littéraire - on y retrouve du polar, de l'imaginaire et du réalisme - L'Archipel du Chien convoque les thématiques de l'étranger et de la migration, dans un espace fantasmé qui ressemble de très près au bassin méditerranéen. Durant cette parabole, cet imaginaire au vitriol, Claudel fabrique une tension et un suspens, qui interroge l'éthique de tout un chacun. Claudel, une odyssée nécessaire.
il vient de sortir en poche, depuis le temps que je voulais le lire, j'hésitais.
Hâpée par le récit, le caractère âpre de ces personnages, fiction, ou réalité, mais tellement d'actualité.
Ne laisse pas indifférent sur la nature humaine.
Très bien écrit.
On accroche rapidement à ce livre, qui met en avant la nature humaine, mais pas de son bon coté
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