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1900, Oil Town dans l'Ohio. Sur ces terres crasseuses mélangées aux hydrocarbures, tout le monde travaille de près ou de loin pour l'or noir. C'est ici qu'arrive qu'Emily accompagnée de la petite Claire et de Susan, une femme secourue sur son chemin. Désormais, elle sera Mary Mc Cartney, la nouvelle institutrice. C'est ainsi qu'elle croit pouvoir approcher et tromper Drake, le tyrannique et gros exploitant pétrolier de la ville. Elle ne se doute pas un instant que c'est lui qui l'attend ! Démasquée, Emily apprendra au passage, un élément important sur sa mère qui lui fera perdre la raison. Destabilisée et traquée par les chasseurs de prime, elle n'aura d'autres choix que de fuir en direction de New York.
Vous avez sûrement déjà vu passer La Venin...
C'est la série dont j'ai le plus parlé sur ma page (Quoi ça ne vous dit rien ???? Allez hop, regardez en story, vous allez avoir une séance de rattrapage..)
J'ai parlé de chaque tome et des versions en noir en blanc, qui pour les amateurs du genre, sont de toute beauté.
Et pour ne pas déroger à la règle (en même temps, je n'ai pas envie d'y déroger), voilà donc le dernier en date "Entrailles" (tome 3). Comme je vous l'ai déjà dit, avec ces très belles versions en grande taille (tant pis pour nos étagères), on redécouvre l'histoire d'Emily en s'attachant encore plus aux détails du trait de Laurent Astier.
Quel plaisir !!! Quel régal pour la rétine !! Quel travail minutieux !
Mais La Venin, ce n'est pas seulement beau, c'est aussi une histoire très bien maîtrisée par Laurent Astier et un récit, qui de tome en tome, vient s'épaissir. Cela donne encore plus de raisons de vouloir lire la suite. Alors en couleur ou en noir et blanc, n'hésitez pas cette série est géniale.
Après l’avoir laissée aux affres de la mort après la terrible tempête et le raz de marée de Gavelston, nous retrouvons Emily dans ce troisième tome de La Venin, Entrailles écrit par Laurent Astier.
1900, toujours en route pour assouvir sa terrible vengeance, Emily n’est plus seule, nous la retrouvons cette fois-ci en compagnie de Claire, la fillette qu’elle a sauvée des griffes d’un terrible prédateur. En route pour l’Alabama, elles font la connaissance de Susan, jeune femme noire, dont le mari vient d’être lynché par des hommes du Klan au nom de la suprématie blanche. Toutes trois prennent la direction de l’Ohio, Emily ayant officiellement obtenu un poste d’institutrice à Oil City, ville où le pétrole, nouvel or noir, coule à flot. Mais en réalité, après le gouverneur Mc Grady et le révérend Coyle, c’est au tour de Mr Drake, le riche propriétaire pétrolier, d’affronter l’implacable Emily et les fantômes de son enfance.
Suivant le schéma narratif des deux premiers tomes, nous retrouvons parallèlement Emily pendant sa jeunesse, en 1890 alors qu’elle s’enfuit de chez sa tante bigote qui la bat. Toujours à la recherche de membre de sa famille qui pourraient prendre soin d’elle, elle part pour la Floride et s’installe chez l’adorable Tanta Amelia. Mais comme souvent, le destin va de nouveau s’acharner sur la pauvre enfant…
En résumé, La Venin est une excellente série en raison de ses magnifiques dessins, de l’inventivité de son scénario vengeur et de ses terribles personnages.
Les prochains tomes, un ou deux, il reste deux méchants à châtier, seront attendus avec impatience.
« La mortelle randonnée » d’Emily alias « La Venin » continue. Voici de retour l’héroïne imaginée par Laurent Astier moins d’un an après la sortie du tome II aux éditions Rue de Sèvres. Dans un troisième opus intitulé « Entrailles », elle poursuit son dessein mortifère pour châtier les tortionnaires de sa mère devenus depuis leurs années universitaires des notables régnant aux quatre coins du pays. Après avoir réglé son compte au politicien Eugene Mc Grady, puis au révérend Allister Coyle, elle a l’intention de s’attaquer à Drake devenu un puissant industriel en Ohio.
Mais elle est de moins en moins une pauvre cowgirl solitaire car elle désormais accompagnée de Claire, la petite orpheline qu’elle avait tirée des griffes du révérend au tome 2 et de Susan, une jeune femme noire qu’elle a sauvé des exactions du Klan…. sans compter les Pinkerton, le sergent mis à pied par sa faute et les chasseurs de prime : tous sont à ses trousses car la récompense pour sa tête a encore augmenté !
La mécanique semble bien huilée (oui, je sais, jeu de mots un peu douteux pour une histoire qui se déroule au pays de l’or noir !) : un tome, une région des Etats-Unis, un homme à abattre. Or, une fois de plus, Laurent Astier prend le contrepied de ce qu’on attend : dans ce troisième album, la vengeance arrive au tout début. L’essentiel n’est plus là.
Dans « Entrailles » plus de références explicites aux célèbres westerns comme dans les tomes précédents. Si le tome inauguraI s’ouvrait sur un hommage assumé à Sergio Leone et à « Il était une fois dans l’Ouest » et si le deuxième faisait un beau clin d’œil à « Sierra Torride », ici l’intérêt est ailleurs. Laurent Astier s’attache d’abord beaucoup plus au désarroi d’Emily. Il montre comment la rage peut secouer « ses entrailles » et la violence dont elle peut faire preuve. Alors qu’elle semblait jusqu’à présent être une Nemesis implacable qui avait tout prévu, elle déraille … Elle est présentée ici comme humaine, trop humaine : à la fois dans les flashbacks de l’enfance qui mettent en scène à nouveau la perte et l’errance après une pause idyllique en Floride - alors qu’elle avait trouvé l’amour maternel qui lui manquait auprès d’une tante ni intéressée ni déséquilibrée mais aimante pour changer- mais aussi dans son effondrement en tant qu’adulte suite à des révélations que nous nous garderons bien de vous divulguer ! Enfin, le tome innove surtout dans l’expansion des horizons.
En effet, l’auteur traite ici de la société américaine et de ses failles dans le Sud (Alabama) puis dans l’Ohio. On s’éloigne donc des régions traditionnellement dévolues aux westerns. Il faut dire que la période s’y prête : la frontière est fermée, la société industrielle moderne a fait son arrivée sur le nouveau continent et les ressentiments perdurent après la guerre civile formant un explosif cocktail riche en histoires potentielles. Dans la saisissante scène d’ouverture, on voit ainsi des notables membres du Klan (un shérif, son adjoint et même un sénateur ) se livrer à l’incendie d’une ferme de noirs, lyncher le mari et envisager d’en violer l’épouse tandis qu’on assiste ensuite à l’exploitation d’ouvriers dans une ville minière. Dans la gamme chromatique utilisée tout comme dans les dialogues des personnages, l’auteur établit un parallélisme : les noirs et les gueules noires, ceux qui fouaillent « les entrailles » du sol, sont les damnés de la terre et y vivent un véritable Enfer.
Point de mythification ni de rêve américain ici. D’ailleurs, la seule référence littéraire présente dans ce tome est un extrait du « Tom Sawyer » de Mark Twain : là encore un Amérique rêvée, fantasmée, gentiment WASP et proprette. N’est-ce pas un hasard que le passage choisi soit celui du blanchiment de la barrière de tante Polly à la chaux ? En effet, les westerns du 9eme art (« Marshall Bass » mis à part) et encore plus du 7e art sont traditionnellement aussi blanchis à la chaux hollywoodienne : on n’y voit guère de Noirs, très peu d’ouvriers et les femmes y sont soit entraineuses de saloon soit des utilités. S’appuyant sur de nombreux documents iconographiques (qu’on peut retrouver comme à chaque fois dans « les cahiers d’Emily ») et sur « Une histoire populaire des Etats-Unis » d’Howard Zinn, Laurent Astier répare cela et nous montre l’Amérique comme on ne la voit pas souvent. Emily se mue en passionaria et souffle le vent de la révolte épaulée par les femmes de mineurs. D’ailleurs sur la couverture, elle ne brandit pas un fusil ou un revolver mais une simple pelle, l’instrument des travailleurs. Susan, la jeune femme noire, est une sorte de double d’Emily : aussi pugnace, déterminée et franche. Elle se fait, elle, le héraut de la cause afro-américaine et permet aussi à Emily d’évoluer. Un seul bémol, on regrettera qu’elle soit parfois croquée de façon stéréotypée et peu flatteuse.
En transformant son héroïne en une Louise Michel à colts et Stetson, Astier crée un écho avec des situations actuelles (place des femmes dans la société, grèves ouvrières, manifestations gilets jaunes et mouvement Black Lives Matter) qu’il souligne malicieusement dans des dialogues à l’anachronisme assumé.
Finalement « la Venin » fonctionne un peu comme la série concept des frères Maffre « Stern » qui aborde un genre littéraire différent à chaque tome. Ici, on pourrait dire que Laurent Astier s’amuse à revisiter des catégories de films : après le thriller puis le film catastrophe, il aborde la chronique sociale. Il double ce défi d’une contrainte graphique : après avoir traité du feu dans le tome 1, et de l’eau dans le deuxième, il s’intéresse à un troisième élément, la terre dans celui-ci et adopte à chaque fois une palette chromatique adéquate, épaulé cette fois par son frère Stéphane.
Comme le montrent ces jeux littéraires, l’ensemble est extrêmement pensé. Même si la maquette est sensiblement identique d’un tome à l’autre ( une histoire principale, des flashbacks sur l’enfance , les voyages d’Emily enfant et adulte en pages de garde et les Cahiers à la fin), les surprises et les dépaysements abondent. C’est toujours jubilatoire pour le lecteur : le dessin est beau, les pièces du puzzle se complètent petit à petit, il y a du suspense … mais cette « road bd » est aussi plus sombre et donne matière à réflexion … Une fois de plus, une réussite ! Nous avons hâte de retrouver cette fille de l’air dans « Ciel d’éther » !
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