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« Maintenant, il ferait bon dormir jusqu'à ce que les rêves deviennent un ciel, un ciel calme et sans vent où quelques plumes d'ange virevoltent doucement, où il n'y a rien que la félicité de celui qui vit dans l'ignorance de soi.» Lorsque Jens le Postier arrive au village, gelé, il est accueilli par Helga et le gamin qui le détachent de sa monture avec laquelle il ne forme plus qu'un énorme glaçon. Sa prochaine tournée doit le mener vers les dangereux fjords du nord qu'il ne pourra affronter sans l'assistance d'un habitué des sorties en mer. De son côté, le gamin poursuit sa découverte de la poésie et prend peu à peu conscience de son corps, des femmes, et de ses désirs. C'est lui qu'on envoie dans cet enfer blanc, «là où l'Islande prend fin pour laisser place à l'éternel hiver», y accompagner Jens dans son périple. Malgré leur différence d'âge, leurs caractères opposés, ils n'ont d'autre choix que de s'accrocher l'un à l'autre, s'accrocher à leurs amours éloignées, pour ne pas céder à l'impitoyable nature. Avec une délicatesse poétique singulière, l'auteur nous plonge dans un nouveau parcours à travers les tempêtes islandaises. Au milieu de la neige et de la tentation de la mort, il parvient à faire naître une stupéfiante chaleur érotique, marie la douceur et l'extrême pour nous projeter, désarmés et éblouis, dans cette intense lumière qui « nous nourrit autant qu'elle nous torture ». La tristesse des anges fait suite au premier roman de Jón Kalman Stefánsson Entre ciel et terre .
La tristesse des anges - Jon Kalman Stefansson
Le gamin ne se remet pas de la mort de son ami Barour. Il part rendre un livre à celui qui lui avait prêté et dans cette démarche, il est recueilli par deux femmes ainsi que par le directeur d’une école féru de lettres et de poésie. Il prend peu à peu conscience de sa destinée. Dans l’intervalle, il rencontre Jens, le postier qui a besoin d’un homme qui a survécu à la mer pour mener à bien sa prochaine tournée dans les dangereux fjords du Nord.
Ce roman fait suite au premier livre de Jon Kalman Stefansson Entre ciel et terre. On y retrouve ce gamin qui va souffrir dans les neiges que les Indiens du nord du Canada appellent les larmes des anges.
A travers des pentes abruptes et vertigineuses ou le vent est un souffre-douleur, l’auteur continue de nous faire voyager dans cet amas de neige ou chaque homme et femme pense à la vie en côtoyant la mort. Une description d’un univers islandais toujours magnifique à lire.
Apporter à pied le courrier dans les hameaux reculés des dernières terres de Finlande perdues dans la neige et les glaces, c’est la fonction de Jens, le postier, accompagné dans cette mission où il faut traverser un fjord, par celui qui est toujours appelé « le gamin », un adolescent orphelin qui a l’expérience de la mer. Tout oppose les deux compagnons de l’expédition : âge, aptitudes, tempérament, goûts, comportement, mais si ces différences se révèlent source d’affrontements, elles sont aussi précieuses, les deux héros du roman devenant ainsi complémentaires pour faire face aux assauts constants du vent, de la neige, de la glace , de l’engourdissement .
Odyssée au milieu des éléments déchaînés jusqu’à « la limite du monde, là où toute chose prend fin », le roman est aussi celui d’une aventure intérieure, où chacun se révèle face à la lutte contre les dangers multiples.
En dépit de la monotonie du schéma narratif : progression épuisante et dangereuse dans la neige / arrivée dans une maison refuge/ départ au matin pour une étape encore plus difficile, le roman n’est pas ennuyeux. Les personnages rencontrés en chemin sont variés, pleins d’humanité et source de scènes émouvantes. Il est bâti sur un crescendo, où la mort est de plus en plus présente, d’abord comme un risque, puis alors qu’ils sont de plus en plus épuisés, sous forme de silhouette féminine hallucinatoire et récurrente cherchant à les séduire et les entraîner dans un sommeil apaisant.
Document sur la dure vie au sein des immensités désertes et glacées, le roman insiste aussi sur le destin particulièrement tragique des femmes, et surtout des enfants orphelins, considérés comme des animaux .
Ce récit dantesque transcende le roman d’aventures car il se situe régulièrement au croisement du rêve et de la réalité, dans une écriture où le fantastique le dispute au poétique . Si l’ouvrage est construit sur la lutte continuelle de des corps contre les éléments pour pouvoir survivre, il présente aussi une réflexion sur l’importance du savoir , sur les livres, sur la fonction de la poésie, par l’allusion à des poètes ou des vers qui viennent hanter l’esprit du « gamin » . Le titre LA TRISTESSE DES ANGES souligne cette dimension, la métaphore « les larmes des anges » désignant les flocons de neige chez les Indiens du Canada.
Roman profond, servi par une belle traduction, mais ardu, où le lecteur, à l’image des protagonistes de l’histoire, progresse lentement .
A la fin de « Entre ciel et terre » le lecteur avait laissé le gamin au village où il se remettrait de son périple. Il est installé chez le capitaine aveugle et Helga.
Dans ce village où la vie est rude et les hommes encore plus, il est accepté diversement, il découvre la vie en société avec toutes ses facettes, lui le gamin maladroit. Au début il vit comme en sursis, comme s’il était le tombeau de son ami Baróur…
Sa contribution est d’aider Helga dans diverses tâches, mais aussi de lire pour le capitaine aveugle, là il redevient un albatros empêtré au sol.
Pourtant Helga veut lui ouvrir les portes de l’instruction et cela a un écho avec son histoire familiale.
Il prend conscience qu’il possède un trésor : les lettres de sa mère. En les relisant il s’aperçoit qu’elle a anticipé et s’adresse davantage à l’homme qu’il deviendra qu’au gamin qu’il est.
L’arrivée de Jens le facteur, congelé sur son cheval, sera un déclencheur vers un ailleurs.
En effet ce dernier devra reprendre la route et rattraper son retard, pour cela tous s’accordent à dire qu’il devra traverser en barque. Mais Jens n’a pas le pied marin et c’est le gamin qui va l’accompagner.
Drôle de tandem entre un homme d’âge mûr qui ne croit que ce qu’il voit et un jeune la tête emplie d’étoiles.
« Certains mots sont des balles de fusil, mais ils peuvent également être des cohortes de sauveteurs. Les mots sont plus grands que lui. »
Finalement, le lecteur se demande si ce n’est pas une chance de vivre à une époque, en un lieu, rudes certes mais où on apprend que chaque geste est essentiel. Où la cohésion du groupe est le moyen le plus sûr de survivre.
Presque tout le livre est fait de la traversée du pays dans le blizzard et de quelques rencontres qui racontent plus la misère que les lendemains qui chantent. Le danger est là, à chaque pas, tout peut basculer. La tête de mule et l’albatros vont devoir s’apprivoiser, se respecter. Le respect le gamin connaît, ses lectures lui ont apporté un regard qui le met à l’abri des jugements.
D’une écriture toujours renouvelée, toujours plus fine et poétique, le lecteur partage un destin et cet hymne à la littérature et aux mots, ces pierres oh combien précieuses.
Le gamin a un univers à l’intérieur de lui, son périple sera un envol.
Ce deuxième tome nous interroge, peut-on après avoir fait cette traversée, qui pousse à se surpasser, revenir à la vie d’avant ?
L’écriture est ample, la réflexion profonde et l’exaltation d’une vie palpite dans chaque phrase. Le nombre de phrases que le lecteur voudrait retenir, il y a une véritable interaction du lecteur. Il suit les traces du gamin comme celles d’une aventure merveilleuse et à deux niveaux : le réel et l’imaginaire.
Une réussite.
©Chantal Lafon-Litteratum Amor 6 avril 2020.
On retrouve avec émotion "le gamin" d'Entre ciel et terre (tome 1).
C'est encore éperdu de chagrin après la mort de son cher ami Bàrður, qu'il va être désigné pour accompagner Jens le facteur.
Hommage à la Poste qui oeuvre en Islande à l'époque dans des conditions absolument inimaginables;
La poésie règne toujours en maîtresse dans ce livre addictif pour celles & ceux qui aiment déjà l'Islande sans même y avoir mis un pied! C'est immense, fort ! sauvage ! blanc! tragique !
Des gens réussissent à vivre dans des lieux que la Nature ne leur réserve même pas!
L'amour des mots sauvent cet adolescent qui décidément habite en soi sitôt le livre ouvert!
Lecture hautement recommandable (dans l'ordre svp!)
Voilà trois semaines que le Gamin est installé dans le confort douillet de la maison de Kolbeinn et Helga. Il aide à la buvette, va faire les courses et le, soir, il fait la lecture pour le vieux capitaine aveugle. Mais il n'en a pas encore fini avec le froid et la neige. Jens, le postier, doit livrer le courrier dans les fjords du Nord, ''là où l'Islande prend fin pour laisser place à l'éternel hiver''. Une partie de la route se fait par voie de mer et Jens n'a pas le pied marin. Il lui faut un compagnon qui sache mener une barque et ce sera la mission du gamin. Le géant taiseux et le freluquet amoureux des mots partent donc aux confins du pays, dans la solitude des grands espaces blancs...
Roman du froid et de la neige, cette ''tristesse des anges'' qui brouille le paysage, dissimule les crevasses mortelles, transit les hommes jusqu'à la moelle, peut tuer aussi sûrement qu'une arme, ce deuxième tome de la trilogie de Jon Kalman Stefanson est tout aussi poétique que le premier. On y retrouve le Gamin, toujours en deuil de son ami Bàrður, toujours réticent à profiter de sa nouvelle vie quand tous ses proches ne sont plus de ce monde. Pourtant, la chaleur, la poésie, les livres, l'éveil des sens grâce à la belle Ragnheiður, font désormais partie de son quotidien si différent de la rude vie de pêcheur qu'il a laissée derrière lui. Quand il doit à nouveau se frotter à l'hostilité des éléments, il le fait en pleine conscience, certain de pouvoir traverser le pire grâce au pouvoir des mots qui emplissent sa tête et son âme. Le chemin est semé d'embûches et le Gamin s'interroge sur le sens de la vie dans cette contrée si peu faite pour l'homme. Pourtant, dans cet éternel hiver qui laisse si peu de place à la lumière, une lueur d'espoir persiste. Des hommes et des femmes y vivent, y élèvent des enfants, y rêvent de printemps. Porté par les poèmes qu'il se récite sans fin, stimulé par la chaleur humaine qui existe sous la glace, le Gamin suit sa route pour relier les humains par des lettres, des journaux, des traces du monde.
Hommage aux mots, à la littérature et aux traditions littéraires islandaises, La tristesse des anges glace le sang autant qu'elle réjouit le cœur. Il y a de la poésie, de la beauté, de la neige, du froid et aussi tellement d'humanité dans ces pages que l'on peine à quitter ces terres islandaises, surtout que le doute persiste sur le sort du Gamin et de Jens que la tempête malmène plus que de raison. De la grande littérature !
Islande, XIXe siècle, après « Entre ciel et terre » dans lequel un gamin affrontait la mer et la perte cruelle de son mentor, Jon Kalman Stefansson invite son lecteur à le suivre dans les landes désolées du Nord de l’Islande, figées dans un hiver glacial. Le gamin (le même) s’est réchauffé le corps et le cœur dans un foyer accueillant mais il va repartir pour épauler Jens le postier, qui ne peut affronter seul les fjords dangereux dans sa tournée du Nord.
Arc-boutés contre le vent qui souffle en tempête, la neige qui s’abat sans discontinuer, le froid glacial qui les étreint, le gamin et Jens font face aux éléments, déterminés à livrer le courrier au péril de leur vie.
Dans la même veine que « Entre ciel et terre », l’auteur poursuit sa quête sur le sens de la vie, la stérilité d’une existence exempte d’amour et offre au lecteur ébloui des pages sublimes et glacées, pleines de poésie et de questionnement philosophique. C'est très beau.
Suite à "Entre ciel et terre", et tout aussi réussi. Frileux, s'abstenir !!!
"Celui qui vit dans le doute n'arrive jamais à rien, il ne devient rien."
"Certains mots sont des balles de fusil, mais ils peuvent également être des cohortes de sauveteurs"
Un livre où règnent le glacial des paysages et des conditions de vie face à la chaleur des mots. Une lecture d'un rare plaisir.
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