Que nous proposent les prix les plus attendus de la saison ?
Couronné par le Bronze Owl, nommé cinq fois livre de l'année par la presse, finaliste des plus grands prix littéraires, un premier roman qui a semé le trouble aux Pays-Bas en s'attaquant à un sujet tabou : entrer dans la tête d'un homme en lutte contre lui-même et contre ses pulsions pédophiles. Sombre et captivante, une lecture choc et pourtant nécessaire.
Dans un village de la banlieue d'Amsterdam, au bord de la mer, de nos jours.
Jonathan, la trentaine, sort de prison. Dans le bus qui l'emmène chez sa mère, il se répète ce que le psychologue lui a enseigné : s'il organise rigoureusement ses journées, il sera un homme meilleur.
Jonathan se le promet : il va s'occuper de sa mère, faible, asthmatique, retourner travailler à l'usine de poissons, promener le chien, aller à la pêche. Il restera seul, il ne parlera à personne, il va s'occuper les mains, l'esprit, tout pour ne pas replonger.
Car Jonathan est un pédophile. Il est sorti de prison, faute de preuves. Le psychologue lui a parlé d'un taux de récidive de 80 %. Il sait qu'il ne doit pas se laisser déborder par ses pulsions.
Or, dans ce quartier en démolition où vit sa mère, vivent aussi une mère célibataire et sa fillette...
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« Maintenant je dois faire bien attention. Cela commence maintenant. » Voilà ce que se répète Jonathan dans le bus qui le ramène chez lui.
Il se fait la promesse de devenir un homme meilleur, de s’occuper davantage de sa mère asthmatique, de superviser leur déménagement, de retourner travailler dans l’usine à poissons, de continuer à faire les exercices préconisés par le psychologue…
Car Jonathan pense qu’un emploi du temps rigoureusement organisé l’empêchera de récidiver et de retourner en prison.
Or dans son quartier promis à la démolition, où il pensait qu’il ne restait que lui et sa mère, vit une fillette délaissée par sa mère.
Après m’être demandée ce qui pouvait bien se cacher derrière « La tanche », en lisant le résumé j’avoue que j’ai hésité à le lire. Il y a des sujets qui vous hérissent l’épiderme.
Mais assurément je serai passée à côté d’une claque littéraire comme je ne m’en suis pas prise depuis longtemps !
Inge Schilperoord réussit l’exploit d’emmener son lecteur dans la tête d’un homme qui lutte contre ses pulsions sans empathie ni voyeurisme. Elle instaure une tension accentuée par l’atmosphère irrespirable d’une été caniculaire qui trouve son dénouement dans une pluie tragiquement libératrice.
Un premier roman remarquable qui démontre sans conteste une rare maîtrise des mots. D’ailleurs, il faut ici souligner la traduction irréprochable du néerlandais par Isabelle Rossellini.
« Il avait toujours aimé les poissons. Sa mère ne leur trouvait aucun intérêt, mais lui, il les trouvait apaisants. Les cercles lents, calmes qu’ils décrivaient, le glissement de leurs nageoires dans l’eau. Comme s’ils gobaient le temps pour lui, le temps dont il ne savait que faire. »
Alors qu'il est libéré faute de preuve, Julien se retrouve livré à lui même pour suivre son protocole d'exercices en vue de se déprogrammer de son "problème". C'est donc dans la tête de Julien que se passe ce roman.
On sent bien toute l'envie que le personnage a d'avoir une vie normale mais il revient dans sa maison pour vivre avec sa mère asthmatique et diminuée, juste avant un déménagement et juste à coté d'une maman vivant seule avec sa fille livrée à elle même.
C'est un vrai combat intérieur que même Julien en plus du soutien à sa mère, l'envie d'aider cette fillette, la gestion de ses pulsions.
Un roman fort, bien écrit, aucours duquel la tension monte au fil des pages pour un final surprenant.
Jonathan a trente ans et a purgé une peine de prison pour pédophilie. Il va sortir et rejoindre sa mère dans la maison de son enfance pour la dernière fois, le déménagement dans un autre quartier étant imminent. Il a pour tout trésor son manuel et son cahier : il faut suivre les règles conseillées par la psychologue pour ne pas replonger ...
Oui mais il y a un hic : une petite voisine va entrer dans son périmètre vital, c’est elle qui a pris l’habitude de promener Milk, le chien, et elle n’a pas envie d’y renoncer ! Jonathan sait pourtant qu’il n’a pas le droit d’approcher un enfant et tente de se conformer aux règles, mais petit à petit il va glisser vers le néant ...
Le rythme est lent, assez monotone, l’atmosphère lourde des non-dits du fils et de la mère. Une ambiance littéraire pesante, inquiétante, notamment lorsqu’on entre dans les pensées du protagoniste. Jonathan lutte à chaque instant contre ses démons et oui, à ce moment-là, on éprouve une grande compassion pour ce malade qui ne semble plus distinguer les horribles pulsions de la réalité ...
Inge Schilperoord, qui fut psychologue judiciaire sait de quoi elle parle et son roman fait froid dans le dos. Quelle chance peut avoir un pédophile de sortir victorieux de cette bataille contre la maladie ?
Inge Schilperoord est une romancière néerlandaise qui sera présente à Montpellier pour la Comédie du Livre qui, cette année, met les auteurs néerlandais en lumière. Et c’est pour présenter son premier roman, lors d’une rencontre autour des livres, que j’ai choisi de lire "La tanche", sans rien connaître du thème abordé.
"MAINTENANT JE DOIS FAIRE BIEN ATTENTION, se dit Jonathan. Maintenant. Cela commence maintenant. Il posa ses mains tremblantes sur ses genoux et frotta lentement, avec son pouce droit, la phalange de son pouce gauche, pour se calmer. C’était sa dernière matinée de détention." Ainsi commence le roman. Et je ne regrette pas d’avoir, comme d’habitude, délaissé la quatrième de couverture. C’est en effet, uniquement à la page 162 – et ce sera la seule fois – que le mot fatidique est prononcé, le mot qui explique, même si l’on devine la raison de l’incarcération au fil du récit.
Je n’en dirai donc pas davantage sur l’histoire racontée ici, celle de Jonathan, incarcéré et libéré faute de preuves réelles. Il rentre chez lui et reprend sa place auprès de sa mère dans une maison délabrée et en voie de démolition. Il va retrouver sa petite vie étriquée, sa solitude et son usine de poissons. Ne pas connaître l’essentiel permet de savourer la profondeur de l’écriture, la tension qui s’en dégage et donne l’envie à la fois de tourner les pages rapidement tout en souhaitant s’arrêter, craignant le pire. L’atmosphère est étouffante au propre – il fait très chaud tant à l’extérieur qu’à l’intérieur de la maison – comme au figuré. L’écriture de l’auteure, ses phrases courtes, saccadées, traduisent parfaitement les affres dans lesquelles se noie Jonathan, les difficultés qu’il rencontre à se dominer, à mettre en pratique ce qu’il a appris, à faire "ses exercices".
Même si, dans ce roman, il est question de quelque chose de grave, la romancière se garde de juger, elle se contente de décrire, d’expliquer. La tension est permanente et c’est un exploit de la rendre si réelle avec des mots d’une grande simplicité. "Sentant ses mains se crisper de nouveau, il joignit les extrémités de ses doigts et appuya jusqu’à ce que le craquement de ses articulations lui apporte un peu de soulagement. Il se perdit dans les méandres de pensées troublantes." Alors, il y a bien ici et là, des redites, des actions réitérées et lancinantes, mais elles ajoutent au malaise qui de page en page se fait plus important, plus haletant, plus difficile à supporter. Comme la tanche, qui pourrait lui servir de médicament, ne lui prête-t-on pas des pouvoirs de guérison, et qui petit à petit se laisse couler au fond de l’aquarium, Jonathan lui aussi sombre sans personne pour le comprendre.
J’ai aimé ce roman noir mais utile. Il apporte, de mon point de vue, des éléments qui, loin de permettre le pardon pour les fautes horribles commises par certains donnent au moins quelques explications.
Un premier roman, noir, utile et très fort dont on ne ressort pas indemne.
www.memo-emoi.fr
Accusé de pédophilie, Jonathan vient d'être libéré, « faute de preuves ». Moi, le soupçon me suffit à le condamner. Plutôt que de crier mon dégoût et ma haine, j'ai tenté de réfléchir à la façon dont Inge Schiperoord choisit d'aborder le sujet.
Le décor est planté dans une petite ville de banlieue. L'ambiance est moite, poisseuse ; la saison est chaude. Lors d'une de ses balades dans la nature, Jonathan recueille un poisson blessé et le rapporte chez lui. Une tanche. Il déverse son trop-plein d'affection sur l'animal et l'investit d'une mission : être son poisson-médecin. Son livre de chevet sur la faune et la flore lui a appris que les tanches posséderaient un pouvoir de guérison.
La fragilité et la notion de discernement du personnage ne sont pas celles d'un individu que je qualifierais de « normal ». Est-ce suffisant pour justifier ses déviances ? Et que penser lorsque l'animal dépérit ? Jonathan a-t-il réussi à le lier à lui? L'allégorie est dérangeante, très bien pensée.
Le récit est lent. Pas long, lent. Tout, dans le style, le rythme, le vocabulaire, contribue à installer le malaise. Jonathan décrit tous ses faits et gestes, les note scrupuleusement dans un carnet. « Je fais tout ce que j'ai envie de faire en respectant toutes les normes de la bienséance. […] Je maintiens l'ordre dans mon environnement. ». Y a-t-il encore un ordre dans cet environnement ? le savoir-vivre n'est-il pas tristement dérisoire ?
Il se répète comme un mantra : « Ce qui est mauvais, ce n'est pas la personne qui a commis les actes mais ce sont les actes qui transgressent les limites. ». Est-il capable d'apprendre à maîtriser ses actes? Peut-il vraiment penser que «c'est terminé » ? A-t-il droit à la rédemption? Dois-je me poser cette question?
La tanche est un roman fort. Difficile, violent, avec une fin surprenante, je l'ai lue deux fois. Il est écrit avec une délicatesse indéniable, les mots sont pesés, le point de vue osé, mais je ne l'ai pas ressenti comme une provocation (j'aurais eu tôt fait de le reposer). Je ne peux pas vous le conseiller, ni vous dire de le laisser de côté. Je pense en avoir suffisamment dit pour que vous puissiez vous en faire une idée.
Merci aux éditions Belfond qui m'ont permis de découvrir ce roman.
https://cahiersvarisetplumenacre.wordpress.com
Jonathan, un homme jeune qui vit « sa dernière matinée de détention » et murmure une promesse : « Tout va changer ».
Petit à petit, on découvre en quoi cet homme que « les gens ne tenaient pas à fréquenter » (p 12) est « différent » et dans quelle mesure il s’efforce de devenir « meilleur ». Les éléments posés au fur et à mesure des pages nous permettent de reconstruire le passé de Jonathan et de comprendre pourquoi il a été emprisonné.
Jonathan sort de prison et retourne vivre chez sa mère dans une petite maison. Toutefois, il est très seul. Il a peu de communication avec elle. Il pense qu’elle ne pourrait pas comprendre l’intérêt de la thérapie qu’il a entrepris avant sa sortie de prison. C’est alors en dehors de son milieu familial qu’il espère parfois trouver du soutien. Il demande à la tanche capturée si ce poisson va le soutenir (p 75). Il se demande aussi si la fillette qui vit dans une maison voisine va l’aider à se débarrasser de sa culpabilité (p 74). Il s’appuie, il se raccroche au manuel thérapeutique que le psychologue de la prison lui a remis. Il établit un emploi du temps très précis pour réguler ses journées et y inclut la réalisation de ses exercices d’entrainement. Un moyen de structurer sa vie, de ne pas s’égarer, de ne pas laisser d’espace libre, de ne pas déraper ?
L’auteur décrit les méandres des pensées de Jonathan et on le suit sur un chemin qui devrait le mener vers la guérison. Les allusions jetées tout au long du roman et la proximité d’une fillette nous font craindre le pire.
Est-ce ce qu’il fait ou est-ce ce qu’il est qui le définit le mieux ? Page 50, il déclare : « Je suis bon. Il ne s’agit pas de moi mais de mes actes. » Il est volontaire, accroché à la méthode à laquelle il s’exerce comme une bouée censée le sauver de la récidive. « La thérapie [doit] faire une autre personne. […] Une autre personne. Une nouvelle personne. » (p 29). Dispose-t-il de suffisamment de moyens pour y parvenir ? Peut-il devenir quelqu’un d’autre ?
Comment la société peut-elle prendre en charge une telle détresse finalement ?
Le roman avance lentement : les pensées de Jonathan, la répétition des mêmes actes quotidiens, une vie chronométrée, la nécessité de temps pour évoluer, pour devenir « meilleur ».
Ce roman aborde la pédophilie d’un point de vue singulier : celui de faire vivre le lecteur dans l’esprit de cet homme qui nous fait trembler. La citation d’Albert Camus proposée en ouverture fait écho à ce récit « L’appel humain et le silence déraisonnable du monde ».
Pour évoquer mes impressions, j'ai envie de revenir sur cette phrase de la 4ème de couverture : "Sombre et captivante, une lecture choc et pourtant nécessaire."
Sombre, oui, de toute évidence au vu du sujet abordé. Ce n'est pas un roman "feel good". C'est un roman dur et violent qui invite plutôt à la réflexion.
Captivante, elle l'est aussi. Pas en raison d'une intrigue qui pousse à tourner les pages pour découvrir au plus vite le dénouement. Non, on veut comprendre l'incompréhensible. Mais est-ce seulement possible ? Peut-on "comprendre" les actes ou les pensées d'un individu pédophile ?
L'auteur nous invite en tout cas à découvrir la vie de Jonathan, ses pensées, ses envies, ses craintes, suite à sa sortie de prison. Une vie parfaitement rythmée, ou presque. Seule ombre au tableau, ses pulsions qu'il tente de maîtriser... Et le passé, pour lequel aucun retour en arrière n'est possible.
Même si l'on peut parfois ressentir de la pitié pour Jonathan, notamment au vu de la culpabilité qu'il ressent et des efforts qu'il fournit pour essayer de changer, il demeure difficile de s'attacher à ce personnage.
L'auteur, qui a été psychologue judiciaire, semble particulièrement connaître le sujet. Elle l'aborde avec précision, notamment dans le travail qu'effectue Jonathan au quotidien via son cahier d'exercices, ou bien encore concernant ses pensées et le combat qu'il mène avec lui-même.
Une lecture nécessaire ? Je n'ai pas ce sentiment. Se mettre dans la tête de Jonathan permet d'avoir un aperçu de ce qu'est sa vie, tiraillé entre ses pulsions malsaines et son envie de les anéantir.
À défaut d'être nécessaire, j'estime plutôt cette lecture utile, du moins pour quiconque souhaite savoir ce qu'il peut se passer dans l'esprit d'un pédophile.
Si "La tanche" peut déranger et constituer une lecture parfois difficile, l'auteur a le mérite d'aborder un thème délicat avec intelligence. Un roman noir et marquant.
http://www.faimdelire.com/2017/10/la-tanche-de-inge-schilperoord.html
Jonathan sort de prison. Les faits pour lesquels il a été incarcérés n’ont finalement pas pu être prouvés. Il est libre. Mais cette liberté sans main tendue l’effraie. Alors, il se raccroche au manuel que lui a donné le psychologue du centre pénitentiaire et aux exercices psychologiques qu’il contient pour tenter de tenir à distance la fièvre qui le ronge. Tout aurait dû fonctionner si la jeune Elke n’était pas venue vivre dans la maison près de la sienne, littéralement abandonnée par sa mère, toujours absente.
Ce roman décrit parfaitement les tensions psychologiques, la douleur ressentie par le malade, l’angoisse, la honte et la culpabilité de ne pas parvenir à maîtriser ses pulsions. Les descriptions sont d’autant plus intéressantes qu’elles peuvent s’appliquer à nombre de troubles mentaux. On suit la lutte de Jonathan pour parvenir à devenir « quelqu’un de meilleur » et les obstacles intérieurs auxquels il se heurte. Un roman intense dont seul le dénouement m’a un peu déçue.
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