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S'il est vrai que Pasolini a donné le meilleur de lui-même dans ses films courts et dans ses courts-métrages, ces trois scénarios, écrits dans les années soixante, en sont la confirmation. Très différentes entre elles dans leurs trames, les trois histoires sont en réalité parcourues par la même veine surréelle et humoristique, outre le fait qu'elles sont toutes trois caractérisées par une sorte de « théâtralité » du langage qui en fait des petits chefs-d'oeuvre de la phase moins idéologique et plus comico-surréelle de Pasolini. Chaque scénario fait partie de trois films conçus en plusieurs épisodes, sortis dans les salles de cinéma entre 1963 et 1968, fruits de la collaboration de plusieurs réalisateurs mondialement connus.La ricotta est un épisode de ROGOPAG (titre-sigle qui identifie les quatre cinéastes qui firent partie de la production du film : Rossellini, Godard, Pasolini et Gregoretti). C'est l'histoire d'une troupe cinématographique qui s'apprête à tourner un film sur la Passion du Christ comme s'il s'agissait d'un tableau vivant inspiré des « Dépositions » peintes par Pontormo et Rosso Fiorentino. Stracci, sous-prolétaire des banlieues de Rome, harcelé par une faim chronique, interprète dans le film le rôle du bon larron. Comme dans une vieille comédie, Stracci invente toutes sortes de stratagèmes pour se nourrir: il vend le petit chien de la Diva, achète une ricotta entière et la dévore dans une grotte, en même temps qu'une montagne de nourriture que la troupe lui a offerte pour se moquer de lui. Quand on tourne la scène de la Crucifixion, le larron demeure immobile sur la croix : Stracci est mort.La Terre vue de la Lune est un épisode surréel qui fait partie du film Les sorcières. Un épisode peuplé d'hommes et de fantômes et plein de gags, de dialogues et de coups de théâtre absurdes, qui rappelle les films comiques de Charlot ou les bandes-dessinées de Donald Duck. Le scénario est né du récit « Le Plouc et la Plouque » et se déroule parmi les ruines du Colisée et d'une banlieue fantasmagorique. Pour le film, Pasolini a créé aussi des bandes-dessinées très riches en couleurs qui ont servi de modèles aux chevelures et aux costumes des acteurs du film. Le troisième scénario, Qu'est-ce que c'est, les nuages ? est une relecture métathéâtrale de l'Othello de Shakespeare confiée à une compagnie de marionnettes pensantes qui, dans les coulisses, s'interrogent sur le destin qui lie chacun à son emploi. Quand Desdémone est sur le point d'être étranglée, le public enragé surgit et tue Othello et Iago qui sont jetés dans une horrible décharge. Mais là, parmi les ordures, les deux hommes voient pour la première fois le ciel et les nuages, et trouvent la paix en découvrant « la merveilleuse et poignante beauté de la Création ». Iago fut le dernier rôle de Totò qui mourut avant la sortie au cinéma de Caprice à l'Italienne, dont le film de Pasolini faisait partie.On est devant un choix stylistique nouveau et bien défini de Pasolini : un langage filmique léger et comique, à la fois absurde et amusant, parcouru par une veine théâtrale originale aussi éloignée de la tradition bourgeoise du récit que des règles de la narration dictées par le bon sens commun.
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