Le Club des Explorateurs permet à deux lecteurs de lire et chroniquer un même titre et de confronter ainsi deux points de vue
Robert McAlmon avait tout pour devenir une légende. Marié à la fille de l'homme le plus riche d'Angleterre, parrain des Américains expatriés à Paris, cet écrivain surdoué fut l'ami de Kiki, de Man Ray, d'Aragon, l'amant de Nancy Cunard et de John Glassco. Dans le tourbillon des années 1920, il était le centre des nuits de Montparnasse, celui auquel on faisait appel pour sortir un artiste de prison, trouver de la drogue ou organiser un kidnapping.
Soutien inestimable pour Joyce et Gertrude Stein, McAlmon fut aussi le premier éditeur de Hemingway, à qui il fit découvrir l'Espagne. Leur amitié virile rapidement transformée en rivalité allait cristalliser la mélancolie de cet éternel vagabond.
En suivant les pas de son héros, Maud Simonnot nous entraîne dans l'envers du décor de la Génération Perdue au fil d'un récit vif, émouvant, qui redonne sa place à Robert McAlmon et tente d'élucider le mystère de son effacement.
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Qui donc connait Robert McAlmon ?
Je lis l'interrogation chez vous. Alors qui connaît Ernest Hemingway ?
Vos yeux semblent bien plus ouverts et à l'écoute !
Alors, j'avoue ma faiblesse moi aussi : je ne connaissais pas ce Monsieur McAlmon avant d'ouvrir l'ouvrage de Maud Simonnot.
Cet homme n'était autre que le premier éditeur d'Hemingway. Mais il était aussi auteur. Poète. Adepte du Carpe Diem et des soirées entre amis. Soirées parisiennes très alcoolisées, cela va de soi, alors que de l'autre côté de l'Atlantique, la prohibition faisait rage.
Maud Simonnot a su me captiver par son écriture romanesque pour me livrer la vie littéraire de McAlmon, dit Mac. Un homme altruiste, effacé et aimé, souvent entouré, mais finalement toujours seul. Si heureux, ou malheureux de pouvoir se sauver, de disparaître, afin de toujours rester indomptable. Il aimait les livres, l'ivresse, l'instant présent et les autres.
Quel travail titanesque Maud Simonnot a t-elle fait pour s'approprier cette vie qu'elle semble tant connaitre. Quel formidable hommage écrit à cet homme presque oublié. Pari réussi car elle m'a entrainée dans le Paris littéraire anglo-saxon des années 20.
Ne cherchez pas dans ce livre dialogues ou intrigue, la vie de McAlmon se suffit à elle-même. Au gré des pages, on rencontre Sylvia Beach, la fondatrice de la librairie Shakespeare and Co, dans laquelle il m'arrive de poser ma besace pour la remplir.
Évidemment, Hemingway n'est pas en rade puisque Simonnot nous conte son amitié et ses frasques avec Mac. Aussi James Joyce et les lectures de son pavé, ulysses, publié par Mac. Ezra Pound, Nancy Cunard, Bill Williams, Kay Boyle … Autant d'individus que vous allez croisez dans ce livre avec délectation.
Finalement, je connaissais un peu McAlmon, via le personnage de Jack dans l'ouvrage « Et le soleil se lève aussi » d'Ernest Hemingway. Car Hemingway se serait largement inspiré de son éditeur pour créer ce personnage. Livre que j'ai détesté, de par son écriture, et le manque de profondeur dans la description des états d'âme des personnages, d'une génération perdue. Et éprise d'insouciance. Cette profondeur, je l'ai trouvée dans le livre de Simonnot. Avec en prime, un titre de livre à la teinture poétique. La nuit pour adresse. Je m'en irais m'y noyer pour une once de sa couleur.
J'ai lu le livre de Simonnot comme j'aurais pu écouter du Brahms, ou regarder un couple danser. Avec les mêmes ardeurs, les mêmes émotions, les mêmes sourires. Submergée par le Paris des années folles. Puisque Simonnot nous le rappelle, par la voix de Hemingway : « Si vous avez la chance d'avoir vécu jeune homme à Paris, où que vous alliez pour le reste de votre vie, cela ne vous quitte pas, car Paris est une fête. »
Merci à Lecteurs.com et Gallimard de m'avoir permis de lire cette oeuvre en avant-première.
Et d'avoir rencontré une personne attachante, discrète et très talentueuse, Maud Simonnot.
Il est des cadeaux inestimables...
Ma mise en scène :
https://twitter.com/jalleks/status/842351179334057984
La nuit pour adresse est un récit tout à fait original, puisqu'il s'agit d'une biographie romancée.
Le protagoniste est Robert McAlmon, un homme à la vie incroyable, très réputé de son vivant, qui n'a néanmoins pas accédé à la postérité, contrairement à certains auteurs qu'il a aidés à percer en les publiant, à commencer par Hemingway.
Le travail de documentation qui sous-tend le livre est herculéen, tant concernant le parcours de McAlmon que le contexte historique et l'époque qui sert de cadre au roman.
A travers le prisme proposé par l'auteur, consistant à remettre McAlmon à la place qui était la sienne comme s'accordent à en attester les témoignages exhumés datant de cette époque, on revisite un temps que l'on croyait connaître, des figures dont on a côtoyé les noms sans toujours comprendre les relations qui les liaient les unes aux autres. Et, bien entendu, on fait connaissance avec Robert McAlmon, les milles facettes de sa personnalité patiemment dessinées à l'épreuve de ce qu'a été sa vie, ses hauts et ses bas, plus excessifs qu'ils ne le sont pour le commun des mortels, et contribuent à appréhender la vie de McAlmon comme une fulgurance.
Noceur incorrigible, mélancolique, exalté, loyal, entier, il ne manque pas de qualificatifs pour décrire McAlmon, comprendre l'admiration qu'il peut susciter, et s'interroger sur ce qui a pu conduire à sa fin abrupte, incompréhensible.
La nuit pour adresse est une ode à un homme hors du commun, auquel l'Histoire n'a pas rendu justice. C'est aussi une réflexion sur ce qui fait l'Histoire, et sur le pouvoir des générations actuelles de la réinterpréter, de la faire évoluer, et de revenir sur certaines de ses imprécisions et de ses oublis en nous démontrant qu'ils ne sont pas fatals.
Chronique complète disponible sur http://viederomanthe.blogspot.fr/2017/03/la-nuit-pour-adresse-maud-simonnot.html
Proche de la biographie romancée, elle donne à entendre la voix singulière de Robert McAlmon, un expatrié qui a fait vibrer la nuit parisienne de ses folies et le monde littéraire par son nez pour dénicher les grands talents.
Indéniablement dans l'air du temps, flirtant avec panache avec les surréalistes, Mac devient bien plus qu'un américain à Paris. Avec Hem (Hémingway), Cocteau, Joyce ou Man Ray, il est au cœur d’une époque où l’on se perd dans l’espoir de se (re)trouver.
De ses amitiés à ses choix éditoriaux, de sa solitude d'homme libre à ses rêves de grandeurs, l'auteure saisit tous les contrastes d'une génération mais surtout d’un homme libre.
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