"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
«"Comme tu peux le voir, il s'agit d'une oeuvre digne d'un maître de la Renaissance. Aujourd'hui, l'Église veut récupérer l'original. Il s'agit de retirer le drapé." J'examine la couverture en pierre différente, elle semble bien ancrée sur les hanches et sur la nudité. Je lui dis qu'en la retirant on abîmera forcément la nature.
"Quelle nature?" La nature, le sexe, c'est ainsi qu'on nomme la nudité des hommes et des femmes chez moi».
Dans un petit village au pied de la montagne, un homme, grand connaisseur des routes qui permettent de franchir la frontière, ajoute une activité de passeur pour les clandestins à son métier de sculpteur. C'est ainsi qu'il attire l'attention des médias. Il décide alors de quitter le village. Désormais installé au bord de la mer, il se voit proposer une tâche bien particulière : restaurer une croix de marbre, un Christ vêtu d'un pagne.
Réflexion sur le sacré et le profane, sur la place de la religion dans nos sociétés, La nature exposée est un roman dense et puissant, dans lequel Erri De Luca souligne plus que jamais le besoin universel de solidarité et de compassion.
Il sculpte.
Il sculpte un Christ, ou plutôt il le restaure, et c'est tout un. Il faut son talent pour découvrir les mystères de cette oeuvre. Sa lumière.
On lui confie cette mission, comme on lui en avait confié une autre, autrefois. Être passeur. Faire traverser des clandestins à travers la montagne.
Traverser.
Voilà la grande affaire de ce livre. de l'ombre à la lumière. D'une frontière à une autre. du profane au sacré. Ou l'inverse. le sens n'a finalement aucune importance. de toute façon, à un moment où à un autre, il faudra traverser.
Il est sculpteur.
Erri de Luca est sculpteur. de mots, taillés finement, méthodiquement. Et le tout est d'une beauté tranchante, qui se veut dépouillée et pourtant foisonnante. Mystique. C'est là, partout, dans la poésie de ses phrases. Dans la densité de son texte, 166 pages d'une infinie richesse.
Encore !
Au pied de la montagne, dans un petit village de l’Italie du Nord, le narrateur, sculpteur, s‘associe au boulanger et au forgeron pour proposer ses services aux clandestins en quête d’un monde meilleur. Sa tâche s’achève toujours là où la montagne a tracé sa frontière. En guise de réussite de service rendu, le coût de la course est remboursé, sans publicité. Jusqu’au jour où sa générosité est reconnue et saluée, que la presse s’empare de l’information, mettant fin à son activité.
Sa passion pour l’art, son questionnement sur la foi, sa rencontre avec un prêtre le remettront sur le chemin de la création qu’il embrassera de tout son être. Dans la restauration d’un Christ crucifié, il va découvrir et révéler la nature de l’homme cachée sous un pagne.
Ce court roman est pourtant d’une rare intensité. Sous la plume de Erri De Luca, les mots et les phrases sont poésie, l’expression des sentiments est intense, la compassion est réelle.
L’état de nudité, celle des migrants comme celle du Christ sur cette croix de marbre est l’un des sujet majeur, parmi l’exploration et la découverte de soi, la vérité, le naturel à l’opposé de ces frontières créent par l’homme pour réguler et contrôler les flux migratoires, sujets chers à Erri De Luca.
Outre ces axes de réflexion si bien menés, j’ai vraiment apprécié cette lecture, ode à la création, à la nature, à l’humilité, invitation à la méditation.
Erri de Luca a écrit de nombreux romans mais La nature exposée est le premier que je lis de cet auteur. Je le connais davantage par ces prises de position concernant le projet de ligne Lyon – Turin, projet auquel il était opposé et pour lequel il a été accusé d'incitation au sabotage par la Société Lyon – Turin Ferroviaires. La prison ferme avait été demandée par le parquet mais il a été heureusement relaxé.
Dans ce roman, le narrateur - anonyme comme les autres personnages et les lieux, sauf Naples – vit dans un petit village au pied des montagnes, près de la frontière. Il sculpte des pierres et du bois, ce qui lui procure quelques gains. Ce montagnard convoie également, de nuit, des réfugiés jusqu'en haut des crêtes, comme le font aussi ses amis. Lui, le fait gratuitement. Il rend l'argent à ceux qu'il appelle « voyageurs d'infortune », seulement une fois la frontière franchie.
Il est démasqué par un réfugié écrivain qui, pour le remercier, mais sans lui demander son avis, rend public sa traversée, ce qui lui vaudra notoriété et ennuis. Il est banni par ses deux amis et se voit contraint de quitter le village.
Il va donc partir vers la mer, chercher du travail. Il est embauché par un curé pour restaurer une statue en marbre du Christ crucifié. Son travail consiste à retrouver la statue initiale, c'est-à-dire à enlever le drapé dont l'avait fait affubler un clergé pudibond. Ce drapé recouvre la nature, autrement dit le sexe : « la nature, le sexe, c'est ainsi qu'on nomme la nudité des hommes et des femmes chez moi. »
Tout au long de son ouvrage, De Luca nous emmène dans un questionnement subtil sur l'art, la foi, l'amour, la nudité, la notoriété.
Ce livre est également une profonde réflexion sur la mer, la montagne, la sculpture, sur le sacré et le profane, la place de la religion dans nos sociétés. Il souligne le besoin universel de solidarité et de compassion.
J'ai trouvé ce roman qui décrit la marche du monde au travers d'une histoire simple, d'une grande beauté, d'une grande poésie. Tout en étant engagé, il dégage une richesse sensorielle bouleversante. L'auteur, face au drame des réfugiés, nous rappelle que ceux qui quittent leur pays, contraints, sont des héros.
Chronique illustrée à retrouver sur : http://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Un beau conte contemporain et intemporel à la fois.
Le personnage est puissant et beau.
Sculpteur, passeur de clandestins, amoureux de la nature, modeste……
Poésie, art, nature suintent au fil des pages.
Un roman sur l'art, sur les religions, les migrants c'est aussi un roman sur le partage, l'ouverture d'esprit, la solitude et l'engagement.
Comme d'habitude c'est une belle écriture soignée qui est aussi précise quand elle décrit la nature que quand elle parle de la scrupule. Elle met nos sens en éveil, jusqu'au toucher.
Un court roman sur un moment de vie, un espace de quelques mois qui nous enrichit tout comme le narrateur qui en sort grandi.
Alors que l'on est plutôt dans la contemplation, l'observation, le final est plus actif surprenant comme pour nous faire revenir au monde réel.
Une lecture délicieuse.
Superbe livre sur le passage , la transmission...sur la voix de l'artiste à travers sa sculpture ... magnifique !
Passeur-Sculpteur, le montagnard piémontais nouveau personnage de l'univers d'Erri DeLucca semble être le reflet en miroir de l'auteur, lui même alpiniste contestataire et exceptionnel sculpteur de phrases. Lumineux.
Dans son dernier opus, Erri de Luca donne la parole à un montagnard piémontais solitaire, vivant de ses souvenirs et de ceux qu'il taille pour les touristes tantôt dans un morceau de bois, tantôt dans un caillou.
La nuit, il fait passer des migrants de l'autre côté de la frontière. Et leur rend le prix de leur passage. C'est son secret. Percé à jour, il passe lui-même la montagne et doit trouver de quoi vivre : ce sera restaurer un christ en croix, pour l'église de la côte où il s'attarde. Et plus exactement ôter le drap ajouté pudiquement, jadis, au corps du supplicié. Lui rendre "sa nature".
Notre personnage va se lancer dans la restauration de cette Crucifixion qui le mènera vers une quête intérieure et spirituelle dont il en sortira grandi en tant qu’artiste.
Pour mener à bien sa mission, il va chercher les conseils d’un prêtre, d’un rabbin ou d’un ouvrier musulman.
A travers cet oecuménisme l’auteur signe un roman puissant dans lequel il invite le lecteur dans des réflexions profondes sur les questionnements théologiques, les signes, le sacré et le profane, le drame des migrants, l’ascétisme, la femme et le couple, la double nature du Christ, le travail de l’artiste.
Les livres d’Erri de Luca sont courts aussi l’auteur va-t-il à l’essentiel sans se départir de cette écriture imagée et poétique qui m’enchante.
Une belle réussite, une fois encore.
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