"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
La vie est trop courte pour s'ennuyer.C'est l'histoire vraie d'une petite fille née en 1900 à Londres, qui « se sentait déjà queer dans la matrice ». En grandissant, elle a fait le tour du monde, elle a lancé sa compagnie de taxis féminins, elle a fait la guerre, elle a battu des records de vitesse dans des courses de bateau, elle a régné en monarque éclairé sur une île des Bahamas, elle a eu pour meilleur ami et confident une poupée... Vivant plusieurs vies, elle a porté plusieurs noms. À sa naissance, on l'appelait Marion. Puis à 5 ans, après une chute de chameau, elle a choisi le pseudonyme de Tuffy. Enfin, c'est très vite dans le prénom Joe qu'elle s'est vraiment reconnue. Et c'est en homme qu'elle a forgé sa réputation et créé sa légende... Amoureuse de la compétition, de la vitesse et des conquêtes féminines, Joe Carstairs a vécu une existence fidèle à son personnage : explosive, impulsive et excentrique. Suivez la destinée d'une femme richissime au charme incandescent, pleine d'une confiance inébranlable et pour qui la vie ne fut qu'un long feu de joie. Dernier livre écrit par Hubert aux éditions Glénat, premier et unique biopic de son oeuvre, Joe la Pirate est un roman graphique enlevé, virevoltant, cinglant et sans tabou comme un film de Billy Wilder. Inspirée par la ligne claire d'Yves Chaland, Virginie Augustin réinvente une nouvelle fois son style, sans rien sacrifier de l'efficacité redoutable de sa narration ni de sa science de la mise en scène.
Lire la plume de Hubert sur une bio est une première, je découvre alors ce personnage explosif qu’elle soit Barbara, Tuffy ou Joe ! Une narration vive et entraînante à l’image de Joe qui mordait la vie à pleine dent et surtout de la manière dont elle le voulait.
Personnage complexe à la vie trépidante, j’imagine que la faire vivre en bulles ne dit pas chose facile.
J’ai adoré une nouvelle fois le crayon de Virginie Augustin. Un trait fin qui livre une belle galerie de personnage expressif et singulier, c’est dynamique et très beau, même sensuel aux moment opportuns. Elle offre une belle vie sur papier à Joe !
Une personnalité déroutante et quelque peu antipathique pour ma part, car si Tuffy était friandes de gourmandises frivoles à en être boulimique, son côté égoïste et tyrannique était plutôt contradictoire, et l’épisode sur l’île m’a quelque peu dérangé, mais c’est une malheureuse réalité.
Dernier point, étonnée au vue de l’époque de cette liberté dont même si l’aval n’était pas unanime, elle a pu être libre de ses choix et ne pas « être un garçon manqué, mais un garçon réussi »dans une société totalement intolérante sur les libertés sexuelles.
Au début il y eut Marion Barbara, née avec le 20e siècle. Cette espiègle et plutôt déterminée petite fille, ne répondait qu’exclusivement au surnom de Tuffy. Mais gênante pour sa mère et sa nouvelle famille, la jeune fille sera envoyée chez sa grand-mère aux Etats-Unis ou plus exactement dans une pension chic, réservée aux seules filles de sa condition, celles de bonne famille.
Ce qui aurait pu devenir une punition, va se révéler être l’entrée "d’une gourmande dans une pâtisserie" (merci Virginie pour cette jolie image). En effet, celle qui est encore Barbara va y trouver son bonheur et pouvoir affirmer son identité, celle d’aimer les femmes.
Devenue jeune femme et éprise de liberté, Marion apprend à conduire, ce qui lui permettra d’être ambulancière pendant la première guerre mondiale et de rencontrer la première de ses amours féminines.
Mais sa mère ne voit pas d’un très bon œil l’arrivée de Sappho dans la vie de sa fille. Ceci marquera une rupture entre les deux femmes et la renaissance de Barbara sous le nom de Joe, une femme habillée telle une George Sand, et surtout agissant avec cette liberté, qui n’était acquise qu’aux hommes à cette époque.
Voici une vie, réelle, qui nous est relatée dans Joe la pirate, un des derniers albums scénarisés par le regretté Hubert et dessiné par Virginie Augustin.
Ma rencontre avec cette dernière m’a permis de voir prendre forme, sous mes yeux totalement conquis, une femme des plus insolites, déterminée à être libre et à pouvoir vivre sa sexualité telle qu’elle l’entendait, cela malgré une société tellement réticente.
Un parcours, qui pouvait choquer et a effectivement choqué les soi-disant bonnes mœurs, marqué par la vitesse, celle des bateaux, des avions et de la vie effrénée dont il faut profiter "parce qu’elle est trop courte pour s’ennuyer".
Un joli coup de cœur que cet album.
Le tandem de « Monsieur désire » se reforme pour « Joe la pirate » et c’est peu dire qu’on attendait ce dernier opus avec impatience. Unique biographie dans l’œuvre d’Hubert mais quelle biographie ! Celle de Marion Barbara Carstairs, une « Violette Morris » américaine pour son côté frondeur et anticonformiste dotée en plus d’une fortune colossale puisque petite fille richissime d’un actionnaire de la Standard Oil. En treize chapitres dans une narration linéaire et une ligne claire proche de celle d’Yves Chaland, Virginie Augustin et Hubert nous racontent donc le destin hors du commun de cette enfant née à Londres en 1900 qui traversera le siècle entre « champagne et extravagance » pour s’éteindre en Floride à 93 ans.
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Celle qui décrétait « je n’ai jamais été une petite fille. J’étais queer déjà dans la matrice » et ajoutait « je suis ma propre création. Je ne dois rien à personne et surtout pas à mes parents » se rebaptisa « Tuffy » à l’âge de 5ans, puis « Joe ». Elle vécut mille vies en une : elle servit en France dans la croix rouge durant la première guerre, battit des records de vitesse dans des courses de bateau, fonda un garage féminin , acheta une île dans les Bahamas qu’elle gouverna, appris à piloter un avion, collectionna les conquêtes féminines (pas « mil et tre » mais 123 tout de même !) parmi lesquelles Tallulah Bankhead et Marlene Dietrich, fréquenta le duc et la duchesse de Windsor et eut pour confident et meilleur ami une poupée « le major Wadley » avec laquelle elle se fit incinérer…
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Un très riche matériel biographique donc, presque taillé sur mesure pour nos deux auteurs qui se sont documentés et appuyés sur l’ouvrage de Kate Summerscale «The Queen of Whale Cay » malheureusement non traduit en français et sur des clichés d’époque parois fidèlement reproduits. Ils nous offrent des dialogues piquants et qui font mouche, un découpage enlevé avec parfois de superbes pleines pages avec de magnifiques noirs contrastés ainsi que des notices biographiques fort utiles de toutes les célébrités évoquées dans un appendice final… Et pourtant, il manque un petit « je ne sais quoi ». La linéarité de la narration et le noir et blanc épuré mettent finalement le lecteur à distance instaurant un côté paradoxalement trop sage et désincarné. La couverture magnifique, l’unique séquence en couleur (aux crayons) été le portrait final dans ses tons chauds et mordorés laissent entrevoir ce qu’aurait pu être cet album tout comme les deux derniers chapitres. A la fin du roman graphique en effet, le visage trop lisse et semblable à celui de sa poupée de Joe Carstairs se trouve enfin marqué par le vieillissement et elle quitte son masque d’éternel Peter Pan trublion pour montrer son décalage avec les flamboyantes seventies… Là soudain, elle devient humaine et vraiment intéressante …
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