"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dimanche 28 juin 1914 : l'archiduc François-Ferdinand, en visite officielle à Saravejo, est abattu d'un coup de feu. L'assassinat de l'héritier du trône d'Autriche-Hongrie par un nationaliste serbe, prêt à tout pour déstabiliser la région, ne tarde pas à embraser le monde ; 34 jours plus tard, l'Europe entre en guerre.
François-Ferdinand est devenu l'héritier de François-Joseph, sans y avoir été préparé, en quelque sorte par accident ou plus exactement dans des circonstances dramatiques : la mort de son cousin Rodolphe à Mayerling en 1889, puis celle de son père en 1896.
Mort sans avoir eu l'occasion de donner sa mesure et de régner, François-Ferdinand se révèle une personnalité plus complexe qu'il n'y paraît. Connu pour ses coups de sang, l'homme est doté d'une incroyable énergie, affectionnant la vie familiale - il s'est en outre mis au ban de la dynastie en épousant une jeune femme bien au-dessous de sa condition. Catholique conservateur, méfiant à l'égard des Hongrois et des Italiens, il s'est souvent prononcé en faveur de la paix, a tâché de moderniser l'armée et a suivi avec sympathie le renouveau artistique de l'époque. Enfin, il est convaincu de la nécessité de réformer la monarchie : François-Ferdinand, « l'homme qui aurait pu sauver l'Autriche » ?
De multiples sources inédites ou mal connues du public français nourrissent ce portrait nuancé et équilibré dressé par Jean-Paul Bled, spécialiste incontesté des Habsbourg et de l'Autriche-Hongrie.
Le 28 juin 1914, à Sarajevo, était assassiné l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche, héritier de la monarchie d’Autriche-Hongrie. Cet évènement déclencheur allait précipiter l’Europe toute entière dans la Première Guerre Mondiale 34 jours plus tard. Mais qui était donc François-Ferdinand, comment était-il arrivé dans la position d’héritier du trône, quelles étaient ses idées… ? Ce sont toutes ces questions auxquelles Jean-Paul Bled, historien spécialiste de l’Autriche-Hongrie et de l’Allemagne, va s’attaquer dans son livre François-Ferdinand d’Autriche paru chez Tallandier. Une très belle occasion de redécouvrir la Monarchie disparue depuis 1918 et cet inconnu célèbre…
Amis lecteurs, au cas où vous ne seriez pas connaisseurs de l’histoire de l’Europe Centrale, ne fuyez pas ! Je ne saurais rédiger ce « post » sans vous donner quelques repères historiques : sachez donc que la monarchie est dirigée depuis 1848 par François-Joseph, qui a pour épouse Elizabeth, bien plus connue sous le nom de Sissi. De leur union naquirent plusieurs enfants, dont un fils, Rodolphe, retrouvé mort avec son amante en 1889, à Mayerling. Le trône revient donc en cas de décès de François-Joseph à Charles-Louis, le frère de l’Empereur. Or ce dernier décède en 1896, et son fils, François Ferdinand, devient donc le nouvel héritier. Pour être complet et juste, on parle d’Empire austro-hongrois à partir de 1867, pas avant ; à cette date, sous la pression des Hongrois, l’Empire d’Autriche se scinde en deux avec une partie dominée par l’Autriche, l’autre par la Hongrie (l’Empereur étant en charge de la diplomatie, de la guerre et des finances).
Vous retrouverez l’ensemble de ces éléments dans le premier chapitre du livre qui a le mérite de poser l’Etat de la Monarchie dans cette seconde moitié du XIXème siècle. Jean-Paul Bled nous décrit ensuite l’apprentissage du jeune homme qu’il résumera ainsi :
Sauf quelques cas particuliers, François-Ferdinand ne s’est montré un élève ni intéressé, ni curieux. (…). Les limites de cet enseignement apparaîtront clairement quand le statut de François-Ferdinand aura changé (…)
Catholique ardent, hostile au partage de la Monarchie tel que décidé en 1867, il s’oppose assez rapidement à François-Joseph. C’est notamment autour du mariage de l’archiduc que la tension sera vive ; François-Ferdinand épouse une comtesse issue d’une famille noble tchèque qui ne fait pas partie des familles pouvant nouer une alliance avec les Habsbourg. Après l’avoir dissuadé d’épouser Sophie, François-Joseph oblige son neveu à faire un mariage morganatique (cela veut dire que sa future épouse ne fait pas partie de la famille impériale et que ces enfants ne pourront prétendre au trône). Cela marquera la rupture entre les deux hommes.
François-Ferdinand a deux facettes : il est d’un côté nerveux, instable, violent (son tableau de chasse comporte environ 275.000 pièces – je me souviens à cet égard de ma visite au chateau de Konopiste près de Prague, où sont exposés les nombreux trophées), hostile au libéralisme et au progressisme, et de surcroît manquant de culture. De l’autre, c’est un père et un mari aimant, un homme attaché à la paix, qui a joué un rôle de modernisateur des armées de la Monarchie, et qui était conscient de la nécessité de réformer cette dernière. Ceci est très bien rendu par le livre.
On lira également avec intérêt tout le contexte des guerres balkaniques qui ont précédé la 1ère guerre mondiale et l’on pourra s’interroger une fois de plus sur le destin en voyant les conditions de l’attentat : en effet, une première bombe avait été lancée et un lieutenant blessé. François Ferdinand réfugié entre temps à la mairie veut rendre visite au blessé ; en repartant, le chauffeur reprend l’ancien itinéraire, et c’est ainsi qu’il se précipite vers ses assassins…
J’avais déjà lu de Jean-Paul Bled la biographie de François-Joseph, qui m’avait plu davantage. Il n’en demeure pas moins que ce François-Ferdinand d’Autriche mérite une lecture !
https://etsionbouquinait.com/2015/11/17/jean-paul-bled-francois-ferdinand-dautriche/
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