"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Paris, 1962. Luc Blanchard enquête sur un groupuscule soupçonné d'être un faux nez des services secrets, impliqué dans l'assassinat à Genève, deux ans plus tôt, d'un leader de l'Union des populations du Cameroun. Une piste conduit le jeune journaliste à Yaoundé, mais il met son nez où il ne devrait pas et devient la cible du gouvernement local et de ses conseillers de l'ombre français.Avec l'aide de son ami Antoine et d'un ancien barbouze, il va tenter de s'extraire de ce bourbier pour faire éclater la vérité.Frakas nous plonge dans un événement méconnu du début de la V? République : la guerre du Cameroun, qui a fait des dizaines de milliers de morts dans la quasi-indifférence générale et donné naissance à ce qu'on appellera plus tard la «Françafrique».
Pour ceux qui aiment les romans historiques avec des personnages imaginaires qui ont croisé des personnalités ayant réellement existé, c'est bien documenté et je recommande cette lecture.
L'histoire se déroule peu après l'indépendance du Cameroun, en 1962.
L'auteur avait publié auparavant "Requiem pour une République", traitant de l'Algérie, on retrouve ici des personnages de ce premier roman alors il vaut peut-être mieux les lire dans l'ordre éventuellement.
Cet excellent thriller politique plonge le lecteur aux origines de la Françafrique qui s'est installée une fois que la France a accordé l'indépendance à ces dernières colonies d'Afrique subsaharienne en 1960. Ou comment remplacer la manne coloniale par un système tout autant rentable.
Et c'est passionnant de découvrir ainsi la matrice d'un des aspects majeurs de la vie politique contemporaine. D'autant plus que Thomas Cantaloube a choisi de traiter le sujet par l'angle mort de la guerre qui a sévit au Cameroun de 1955 à 1962, une guerre cachée dans le prolongement de la guerre d'Indochine. Grâce à une documentation ultra précise , l'auteur met en lumière les faits saillants de cette guerre cachée, menée par la France contre les rebelles de l'UPC ( Union des populations du Cameroun ), rappelant furieusement les méthodes répressives mises en oeuvre durant la guerre d'Algérie : bombardements de villages, tortures, escadrons de la mort, assassinats ciblés de dirigeants de l'UPC comme Ruben Um Nyobe. Toute la trame historique est parfaitement lisible avec un sens de l'analyse politique assez brillant dans sa capacité à la rendre intelligible et concrète. Sa radiographie géopolitique de bas en haut de l'échelle des responsabilités est passionnante.
Le sujet aurait pu écraser le romanesque. Ce n'est jamais le cas car Thomas Cantaloube a su impulser une intrigue policière classique mais efficace, porté par un casting haut en couleurs qui fonctionne parfaitement : un journaliste ex-flic, un convoyeur de drogue ex-résistant et un mercenaire ex-barbouze.
On suit donc l'enquête d'un journaliste, Luc Blanchard, sur la piste d'une organisation secrète de type OAS, la Main rouge, et de l'assassinat à Genève d'un leader de l'UPC, Félix Mounié ( fait réel ) empoisonné par les services secrets français. Il se rend à Yaoundé et y découvre cette guerre cachée du Cameroun et tous les dessous de la Françafrique naissante. Il devient rapidement une cible à mesure qu'il s'enfonce dans ce bourbier semé d'embûches.
Thomas Cantaloube a le sens des péripéties. Il mène son intrigue pied au plancher, jonglant avec aisance entre fiction et réalité historique, entremêlant personnages fictifs et réels comme Jacques Foccart, secrétaire général aux affaires étrangères, grand manitou de la politique africaine du général De Gaulle. La dernière partie est particulièrement trépidante ( presque un peu trop rocambolesque d'ailleurs ) en mode pieds nickelés dans une course poursuite en hélicoptère, avec des dialogues savoureux souvent truculents.
À l’instar de Requiem pour une République, son premier roman, que j’avais fort apprécié, Frakas se révèle également un excellent thriller historique et politique.
Si nous ne sommes plus dans les années les plus sombres de la Vème République (années 1959 à 1961), dans les coulisses de la guerre d’Algérie, nous n’en sommes pas si loin. Le roman se déroule peu après, sur une période plus courte, du 17 mai 1962 au 8 août 1962.
Sans qu’il soit fait référence au premier livre, donc sans aucune obligation de l’avoir lu, on retrouve avec plaisir les trois personnages centraux, aux opinions et aux caractères différents que sont Luc Blanchard, Antoine Carrega, devenu Antoine Lucchesi et Sirius Volkstrom.
Luc Blanchard a démissionné de le Police criminelle et vient d’être embauché au journal France Observateur, à la rédaction. « On lui avait assigné un domaine dont personne ne voulait : les anciennes colonies françaises qui volaient désormais de leurs propres ailes, Algérie, Maroc, Afrique noire. L’ancien empire n’était plus, mais que devenait-il ? » Il va ainsi s’intéresser à la situation au Cameroun, intrigué par l’assassinat, deux ans plus tôt, d’un chef de l’opposition.
Antoine Lucchesi, ancien résistant corse est devenu convoyeur de drogue à bord de son chalutier, accompagné dans ses sorties par Alphonse Mukenga, par ailleurs commis de cuisine dans le restaurant de Maria, la compagne d’Antoine, dans le Panier, à Marseille.
Quant à Sirius Volkstrom, cet ancien barbouze manchot, grillé en métropole, n’a eu d’autres choix que de se planquer en Afrique.
Une piste va conduire notre journaliste à Yaoundé, mais il met son nez où il ne devrait pas et devient la cible du gouvernement local et de ses conseillers de l’ombre français. Pour tenter de s’extraire de ce bourbier et pour faire éclater la vérité, il aura grandement besoin des deux autres acolytes.
Frakas est un polar politique qui nous plonge au cœur de la guerre du Cameroun qui a fait des dizaines de milliers de morts dans la quasi-indifférence générale. Il nous fait revivre la naissance de la « Françafrique », cette relation spéciale, de type néocolonial, établie entre la France et ses anciennes colonies en Afrique subsaharienne, caractérisée par le rôle des services de renseignement, des entreprises, des barbouzes, des militaires …, l’ingérence directe des autorités françaises dans les affaires intérieures des anciennes colonies et la complicité des élites africaines locales.
L’intérêt de ce bouquin est de nous faire vivre au travers d’une fiction absolument passionnante et haletante la Françafrique et ses hommes politiques aux mains sales.
Thomas Cantaloube, comme dans le premier tome, n’hésite pas à mettre en scène des personnages réels et pas des moindres, tels Gaston Deferre, François Mitterrand, sans oublier Jacques Foccart, cet homme considéré comme un des hommes de l’ombre du gaullisme, et l’un des fondateurs du SAC.
Certains personnages sont inventés, d’autres encore sont inspirés de personnages réels.
Le livre s’appuie sur une solide documentation et Thomas Cantaloube, tient à souligner : « Ce roman est une fiction, mais il s’appuie hélas sur l’histoire bien réelle du Cameroun, de la France, et de la relation entre ces deux pays, qui compose une partie de ce que l’on appelle désormais la Françafrique. » C’est, à mon avis ce qui fait toute la force de ce bouquin, bouquin qui m’a permis de prendre connaissance de cette guerre inconnue pour moi.
Toute la valeur de ce polar réside dans le fait que le lecteur est embarqué dans cette terrible réalité au moyen d’une fiction débordante d’action et de suspense, complètement dépaysante.
La fin du récit, avec une course-poursuite à bord d’un hélico m’a laissée carrément bouche-bée !
Je ne peux que vous encourager à découvrir ce roman policier aussi instructif que divertissant !
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Nous avons trop vite oublié le rôle de la France en Afrique, même si, de temps à autre, l’actualité rafraîchit quelques souvenirs pas toujours glorieux.
Alors, en lisant Frakas, ce polar signé par l’excellent Thomas Cantaloube, j’ai été plongé au début des années 1960, au moment où notre pays perd peu à peu toutes ses colonies sans renoncer à les exploiter.
Franchement, en lisant Frakas, à de nombreuses reprises, je n’ai pas été fier d’être Français. L’action des services secrets, le SDECE (Service de documentation extérieure et de contre-espionnage), les coups de main du SAC (Service d’action civique), le rôle de ces hommes politiques de premier plan comme Pierre Messmer, François Mitterrand, Gaston Deferre et surtout de celui qui tirait toutes les ficelles, dans l’ombre, Jacques Foccart, secrétaire général de l’Élysée aux affaires africaines et malgaches sous de Gaulle et Pompidou, ont de quoi nous faire rougir de honte.
Au travers de l’histoire qu’il conte avec moult rebondissements, Thomas Cantaloube ne mâche pas ses mots. La plupart de ses personnages sont inventés, leurs aventures aussi mais l’histoire du Cameroun et de ses relations avec la France, bien réelles.
Tout débute le 15 octobre 1960, à Genève, où Félix Moumié, Président de l’UPC (Union des populations du Cameroun), est assassiné. Près de deux ans plus tard, le 17 mai 1962, voici un des principaux personnages de l’histoire : Luc Blanchard, journaliste à France Observateur.
Cet ancien flic, pour ne plus obéir aux ordres de Maurice Papon, a démissionné de la police criminelle. Son domaine concerne les anciennes colonies, Algérie, Maroc, Afrique noire. Son rédac’ chef lui demande alors d’enquêter sur une organisation assez obscure : La Main rouge.
Autre personnage important, Antoine Lucchesi, navigue en Méditerranée avec Alphonse Mukenga qui est aussi commis de cuisine dans le restaurant de Maria, la compagne de Lucchesi. Ce dernier gagne bien sa vie en convoyant de la morphine-base pour les labos marseillais qui transforment cela en héroïne à destination du marché étasunien. Marseille, la pègre, Mémé Guérini et Gaston Deferre, ce n’est pas beau du tout ! Antoine que l’auteur appelle souvent « le truand », tient un cahier de comptes pour la mafia locale, cahier qu’il cache dans une valise.
Subitement, Alphonse Mukenga, sympathisant de l’UPC, part pour le Cameroun, son pays d’origine, pour s’occuper d’un oncle bien malade. Alors qu’Antoine est absent, Maria croit bien faire en prêtant une valise à son commis, sans savoir qu’elle contient le fameux cahier.
En quelques semaines, au cours de cet été 1962, l’action s’emballe, m’emmène à Yaoundé sur les traces d’Antoine qui veut récupérer son fameux cahier pour sauver sa petite famille menacée par un caïd de la drogue.
En même temps, pour étoffer son enquête, Luc Blanchard, en bute aux intimidations et agressions d’un membre du SDECE, part là-bas aussi. Alors que le Cameroun est soi-disant indépendant, l’appétit de quelques industriels français pour les richesses du pays ne s’est pas éteint. Ils sont soutenus par des politiciens véreux qui savent bien camoufler leur trafic d’influences sous les dorures de notre ambassade.
Si les dirigeants camerounais collaborent, les maquisards de l’UPC ne désarment pas et luttent pour une véritable indépendance de leur pays. Au cours des aventures de Luc, Antoine, Alphonse mais aussi Lucille, délicieuse métisse qui tient un hôtel-restaurant à Yaoundé, je découvre les arrestations arbitraires, la torture, les massacres de paysans et même un village rasé au napalm !
À tout cela, s’ajoute un racisme puant, un sentiment de supériorité révoltant de tous ces Blancs qui tentent de profiter au maximum du pays et de ses habitants. Heureusement, Thomas Cantaloube fait évoluer Célestin, attachant chauffeur de taxi en 2 CV, efficace et très dévoué.
Luc enquête, découvre une réalité scandaleuse mais court de grands risques. Arrive enfin un certain Sirius Volkstrom, sorte de militaire d’occasion, dont l’efficacité est salutaire. Mais, attention, je n’en dis pas plus… J’ai essayé de survoler l’action de ce thriller mais pas en hélicoptère ; seuls les lecteurs de Frakas comprendront…
Après m’être régalé avec le second polar de Thomas Cantaloube, il me reste à lire Requiem pour une République, paru déjà dans la Série noire de Gallimard et plusieurs fois primé.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Attachez vos ceintures, l’histoire est brutale. A l’image de ce que fut la colonisation, mais aussi la décolonisation car le pays colonisateur ne voulait pas se séparer d’une poule aux œufs d’or, c’est-à-dire, donner soi-disant une indépendance tout en voulant continuer à exploiter et se garder les richesses par tous les moyens possibles, y compris par les armes.
En novembre 1960, Félix-Roland Mounié est assassiné à Genève, empoisonné par un envoyé de la SDECE, William Bechtel, se faisant passer pour un journaliste. Figure de l’indépendance du Cameroun, il avait succédé à Ruben Um Nyobe, lui-même abattu par l’armée française en 1958. De ces faits historiques, Thomas Canteloube va les réintroduire dans un thriller politiques où personnages de fiction alternent avec des personnages réels pour remonter le fil de l’emprise de la Françafrique lors de sa naissance dans les années 60. Là, c’est le jeune journaliste Luc Blanchard appuyé de son chef direct, René Hartmann, qui va enquêter dans les nébuleux services français, sur le territoire et jusqu’à Yaoundé. Mais, évidemment, les conseillers de l’ombre ne souhaitent pas que l’on soulève les boites malodorantes et vont faire pression sur le reporter. Dans cette course à la vérité, il rencontrera Antoine Lucchesi, un honnête trafiquant s’étant lié d’amitié avec Alphonse son cuisinier camerounais et militant à l’Union des Populations du Cameroun, Sirius Volkstrom, un mercenaire à la limite de la caricature, Casimir, aussi énigmatique que généreux et Lucille, une métisse originaire de la Guadeloupe se sentant de nulle part et de partout.
Thomas Cantaloube signe un polar époustouflant, jonglant avec brio dans la fiction pour mieux faire saillir la réalité. Après avoir enregistré tous les noms des intervenants et en resituant le contexte, le lecteur est prêt pour avaler l’incroyable cavalcade d’un journaliste en quête de vérité.
Un roman est parfois plus pertinent qu’un reportage ou qu’un essai et c’est avec joie que l’on peut accueillir cet opus mettant en scène l’un des pères de la Françafrique, l’homme de l’ombre dans toute son énigme : Jacques Foccart. La liste des pays est longue… Le Congo, bien que d’influence belge, avec la sécession katangaise, le Togo, le Niger, le Tchad, le Gabon ou nommé parfois le « Foccartland » avec le clan Bono – et justement, très judicieux le choix de l’auteur d’aller faire un saut à Libreville – et, et, le Cameroun ! Le massacre perpétué par l’armée française en pays bamiléké reste encore trop méconnu. Pourtant le chiffre de plus de 100.000 morts devraient apparaître dans les manuels scolaires, dommage que ce soient les vainqueurs qui fassent l’histoire. Le colonéalisme a gagné puisque la résistance nationaliste a été effacée. Pourtant elle a lutté pendant de nombreuses années, de 1957 à 1970. L’indépendance n’entraîna pas un état souverain mais un état sous tutelle moyennant des avantages à ceux qui acceptaient cette administration mixte… Frakas, même si romancé, en est une parfaite transcription.
Thomas Cantaloube a démissionné de ses fonctions de journaliste pour se consacrer à l’écriture. Mais son empreinte demeure et il n’oublie pas de faire référence à une autre indépendance malmenée, celle de la presse.
En remerciant BABELIO pour l’envoi de ce livre
Blog Le domaine de Squirelito => https://squirelito.blogspot.com/2021/06/une-noisette-unlivre-frakas.html
2è roman de l'auteur, ce roman nous transporte en Afrique, après quelques chapitres entre Paris et Marseille. On retrouve trois personnages de "Requiem pour une République", Luc Blanchard, devenu journaliste, Antoine Carrega / Lucchesi, "honnête" convoyeur de drogue pour les caïds marseillais et Sirius Volkstrom, /Pierre Lherbier, ex-barbouse et vieille connaissance parisienne de Luc Blanchard. Les routes de ces trois-là vont se croiser en Afrique, au Cameroun. Titillé par une organisation secrète, "La main rouge", Blanchard, à qui son journal a donné les anciennes colonies françaises à traiter, va suivre une piste qui le mène à Yaoundé. Lucchesi, de son côté, ira y chercher un cahier indispensable à son trafic. Volkstrom, quant à lui, devenu "sergent instructeur"des soldats camerounais, les rejoint par hasard. Mais on le devine vite, cette piste de la "Main rouge" est trop politique pour être tranquille, et l'on va suivre le parcours semé d'embûches de nos héros. On (re-)découvre les liaisons plus ou moins dangereuses de l'état français avec le Cameroun ancienne colonie pas très stable. Les possibles profits économiques excusent beaucoup de mauvais coups. Lecture plaisante que celle des tribulations africaines de Luc Blanchard et qqs autres. On navigue entre Histoire et film d'aventures, notamment lors de la dernière séquence. Séquence, oui, car voici un roman très visuel, qui avance bien sans temps mort. Voici un opus instructif et divertissant à lire !
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