"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
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Lionel Duroy adore parler de lui et de ses rapports familiaux. L’ayant écouté attentivement lors des Correspondances de Manosque, je m’attendais à mieux en lisant son dernier livre : Disparaître, après avoir aimé L’homme qui tremble et Eugénia.
Puisqu’il faut le reconnaître, j’ai été un peu déçu par la lecture de ce roman dans lequel il dit s’appeler Augustin et en changeant apparemment tous les prénoms.
À soixante-dix ans, l’auteur… enfin, Augustin, décide de partir sur son vélo pour Disparaître. Pourquoi pas ? Alors, je m’attends à un récit passionnant de ses pérégrinations à travers l’Europe jusqu’à Stalingrad, le but ultime qu’il s’est fixé. Stalingrad et non Volgograd comme cette ville se nomme aujourd’hui. Ce choix, il l’explique en détail à la fin du livre.
Au lieu de ça, une longue partie me narre ses rapports tendus avec ses quatre enfants, trois filles : Anna (27 ans), Coline (24 ans), Claire (32 ans) et un garçon, David (36 ans). David et Claire ont pour mère, Agnès, la première femme du narrateur. Anna et Coline ont été enfantées par Esther, seconde épouse. L’auteur avoue qu’Anna est sa chouchoute mais qu’elle a toujours un fort désir d’indépendance.
Alors qu’Augustin a décidé de les réunir, tous les quatre pour leur faire savoir qu’il a décidé de partir, seul, depuis sa maison bâtie sur le Mont Ventoux, tout ne se passe pas comme prévu.
La passion de l’auteur pour le vélo, passion que je partage, est reprise par Anna qui chevauche un Pinarello tout neuf, en carbone avec freins à disque…
S’ensuivent de longues pages durant lesquelles Augustin détaille tous les problèmes rencontrés avec ses enfants, les joies comme les peines et surtout les incompréhensions.
Ils sont à Paris et retrouvent des lieux familiers comme le Jardin des Plantes. Quand il confie enfin son projet de voyage à vélo, son Singer remis à neuf pour pouvoir supporter de lourdes sacoches, ses filles le jugent complètement fou…
Je termine alors la première partie : L’énigme des enfants, pour me lancer enfin dans le second volet, celui que j’attendais impatiemment : Stalingrad.
Lionel Duroy parle alors de son éditeur, Curtis, qui attend son récit pour préparer un nouveau livre. Il rêve de mourir dans l’Oural. Il parle de Bernard Moitessier qui voulait mourir en mer et qui, finalement, s’est éteint à soixante-neuf ans, à Vanves, en 1994.
Je passe sur les problèmes de santé, les ennuis mécaniques qui retardent le départ pour parler des références littéraires et historiques qui jalonnent cette seconde partie. Il y a d’abord Tolstoï qui voulait aussi mourir seul, Malaparte puis Petru Dumitriu, un écrivain roumain, Sigfried Lenz, Primo Levi, Imre Kertész, un écrivain hongrois, Panaït Istrati, autre écrivain roumain, Gide, Philip Roth, Rilke…
Apt, Manosque, Draguignan, Nice, l’Italie… de lourds souvenirs familiaux l’assaillent. Cela, je le comprends très bien. Lorsque je pédale longtemps ou pas, mon cerveau travaille aussi avec de bonnes et de mauvaises idées, de bons et de mauvais souvenirs.
Je note au passage la référence instructive sur Stradivarius (1644 – 1737) lorsque le narrateur fait halte à Crémone, la ville natale de ce célèbre luthier, il pense à Anna, sa fille qui joue du violon.
La Slovénie, une certaine Andjalija, puis la Croatie, pays qui lui rappelle ses reportages dans l’ex-Yougoslavie dévastée par la guerre civile, le massacre de Vukovar, en 1991.
Toujours sur son vélo, le voilà à Tulcea. Là, il doit prendre le bateau pour Sulina, une ville portuaire roumaine dans le delta du Danube. Après avoir connu son heure de gloire grâce à la Commission européenne du Danube, de 1865 à 1939, sa prospérité n’a fait que décliner.
Débute alors la partie la plus émouvante, la plus instructive de Disparaître avec l’évocation de la bataille de Stalingrad. Lionel Duroy s’appuie sur les lettres envoyées par Günter Flügge, soldat allemand mort à dix-neuf ans, à sa fiancée, Erika Schulze, restée à Hambourg.
Stalingrad, c’est une terrible bataille décisive pour le sort du combat contre le nazisme. Que de vies sacrifiées à cause de la folie de quelques psychopathes portés à la tête d’un pays ! Voilà une réflexion salutaire à mettre constamment en avant, à plus forte raison par les temps qui courent.
Lionel Duroy n’a pas disparu et il est donc revenu comme il le reconnaissait avec humour, place de l’Hôtel de Ville, à Manosque.
Avec Disparaître, il m’a gratifié d’une aventure familiale, littéraire, historique, amoureuse et sportive pour aller finalement à la rencontre des gens, créant un lien tellement important dans ce continent européen toujours tiraillé entre égoïsme et mégalomanie. Finalement, je reconnais, à la réflexion, que Disparaître est un bon roman.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/2022/11/lionel-duroy-disparaitre.html
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