Cette semaine, suivez Yann Briand, Directeur littéraire des éditions Le Passage et Charlotte Lefevre, responsable éditoriale pour la littérature française et étrangère aux éditions Pocket
Djibouti, dans la désolation sublime d'un bord de mer Rouge.
Au fond de l'épave oubliée d'un navire, à l'entrée du port, il y aurait une valise contenant, peut-être, les écrits jamais écrits d'Arthur Rimbaud. C'est la nouvelle quête de Paul Deville, maillon rétif de la tactique impérialiste de son employeur, la Shanghai Petroleum, qui enracine les intérêts de la Chine en Afrique.
Mais Paul n'a qu'un seul but : saisir ce que les écrivains laissent derrière eux, poursuivre ce que les livres disent ou suggèrent dans une chasse au trésor qui n'existe pas, entre littérature et abstraction, pour lutter contre l'obscénité des décideurs et les ravages de la mondialisation. Envers et contre tout, la raison surtout.
" Le style de l'auteur, mélange puissant de simplicité et de mots précieux, fait mouche. " Causette " Sigolène Vinson dépeint le bateau ivre de la mondialisation. " Le Point
Cette semaine, suivez Yann Briand, Directeur littéraire des éditions Le Passage et Charlotte Lefevre, responsable éditoriale pour la littérature française et étrangère aux éditions Pocket
Parfois, un bon roman vaut mieux que tous les longs discours. Courir après les ombres est de ceux qui ouvrent les yeux, n'hésitent pas à violenter un peu leurs lecteurs... car il faut bien ça pour donner à réfléchir sur l'état de notre vaste monde. On pourrait le classer dans la famille des essentiels nécessaires, aux côtés de celui de Pascal Manoukian, Les échoués par exemple.
La mondialisation, l'exploitation de certaines catégories par d'autres, les ravages de la société de consommation ce sont souvent des mots, parfois quelques images mais sans plus. On discute, on condamne et puis on retourne tranquillement à ses occupations. Courir après les ombres a le mérite de mettre en scène ces concepts lointains de façon très concrète en s'appuyant sur des héros particulièrement attachants pris dans le tourbillon d'un monde violent et hypocrite.
Il y a d'abord le décor. L'Afrique, Djibouti, la mer Rouge et puis plus loin le golfe d'Aden, et la route vers l'Asie. Décor paradisiaque, ilots de pauvreté, mainmise des grandes puissances sur les matières premières, enjeux d'influence. Paul Deville est un professeur d'économie reconverti dans les affaires pour le compte de la Shanghai Petroleum, chargé de négocier l'implantation de la Chine en Afrique. Un homme aux motivations complexes, un homme qui oscille constamment entre quête d'un monde enfoui et fuite en avant. Un homme qui s'accroche à des rêves, inscrit ses pas dans ceux des écrivains et explorateurs qui ont avant lui arpenté ce pays pour mieux oublier les intérêts qu'il sert, tout en se persuadant qu'il a le pouvoir de renverser le jeu.
"L'important était d'avoir saisi ce que les écrivains laissent derrière eux."
Peut-être. Sauf que la réalité est tout autre. A travers les visages de Mariam la jeune pêcheuse à l'activité menacée par les cargos usines, de Cush le migrant rescapé de la traversée vers le Yemen ou de Louise qui traîne son mal de vivre sur un cargo qui la ramène vers Le Havre, c'est la crudité du monde qui défile. Ici, les destins se jouent sur des coups de dés pipés. Ici, comme partout ailleurs, les hommes et les femmes sont les victimes de décisions qui les dépassent et les gomment. Impossible d'ignorer en refermant ce livre, à quel point chacun d'entre nous est minuscule face aux forces puissantes qui s'exercent. A quel point nous n'avons plus, chaque jour qu'à faire de notre mieux. Et surtout à continuer à rêver, malgré tout.
Ce livre est un vrai bonheur de lecture. Grâce à la sensibilité de l'auteure qui parvient à faire émerger du chaos des figures magnifiques, et qui ne renonce jamais, malgré un propos sans fards à croire au pouvoir de l'imaginaire. Il dégage une petite musique mélancolique, tristement belle, qui ne vous lâche plus pendant un bon moment. Essentiel vous dis-je.
Ce livre m'a beaucoup plu; j'ai trouvé l'écriture simple et belle. Paul Deville est un homme surprenant; il participe à la déchéance de l'occident, aux désastres de la mondialisation: il veut pousser le système jusqu'au bout: il travaille pour une multinationale chinoise qui exploite les ressources africaines...en même temps, il se désole de détruire la nature et la vie des indigènes comme la petite Mariam, sacrée petite bonne femme qui aime farouchement la vie et l'indépendance;
détruire le monde politico-économique pour que règne la poésie! L'autre aspect de Paul est celui d'un Don Quichotte qui cherche des trésors imaginaires; là, il entraîne son ami à la recherche des écrits "jamais écrits " de Rimbaud: il veut croire que le marchand d'armes est resté poète!
Avec ce livre, on découvre la Corne de l'Afrique, le problème de migrants (l'horreur des passeurs yéménites) la destruction des richesses de l'Afrique y compris la santé des habitants en déversant les déchets nucléaires sur les rives de la Somalie...
Paul semble incapable de s'engager en amour: il fuit Mariam tout en voulant l'aider et sa relation avec la mélancolique Louise n'est pas simple non plus.
Un coup de coeur pour le style, la construction et la richesse des découvertes
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