"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une commune du sud-ouest de la France. Tous, maires, premier adjoint, élus, cadres administratifs, chefs d'entreprises de la région, se connaissent et font des affaires ensemble. Ils sont tous mouillés dans un dossier de corruption qu'une équipe de flics a pris en main avec une idée : traquer ces élus comme ils le feraient avec les grands voyous. En détention provisoire, le maire qui, au fil du temps, s'est transformé en petit empereur local, se suicide. Provoquant la polémique, mais aussi obligeant ses "amis" et ses "ennemis" à se dévoiler. Trahisons, mensonges, pressions politiques. Tout y passe dans ce roman mené tambour battant, qui dénonce un système politique qui favorise la corruption et l'abus de biens sociaux.
Christophe Gavat est commissaire de police. Il fut mis en examen dans "l'affaire Neyret", puis relaxé. Son premier livre fit l'objet d'une adaptation cinématographique par Olivier Marchal sous le titre Borderline (excellent, je l'ai vu).
Roman policier réaliste qui relate parfaitement le travail de fourmi des enquêteurs surtout lorsqu'ils vont dans le monde impitoyable, tortueux et abstrus des affaires politico-financières. Dès qu'ils ont trouvé un fil, ils le tirent, et les découvertes toutes plus époustouflantes les unes que les autres se font jour. Si ce n'est parfois un petit souci avec l'unité de temps -des allers-retours, le maire que je croyais en prison qui revient- vite dépassé, je dois dire que je n'ai pas pu quitter le bouquin. Je n'ai pas été au point des flics de Christophe Gavat qui laissent leur vie de famille de côté, mais à certains moments, j'aurais pu rester dans mon canapé à lire plutôt que de préparer le repas ou aller à une réunion de boulot. Mais je suis un garçon raisonnable, ce ne furent que des velléités.
Tout cela pour dire que, aussi incroyable que cette affaire puisse paraître, elle aurait très bien pu faire la une des journaux actuels et les choux gras des médias. "En enquêtant sur ce dossier, les policiers ont pris conscience que, aussi rigoureuse et précise soit leur enquête, elle ne sera jamais que le reflet de dix pour cent de la réalité corruptive, prégnante à Sainte-Jeanne. Ils ne pensaient pas que cette affaire les amènerait à tirer cette conclusion désespérante : tel un cancer incurable, la corruption se propage de la tête à la base." (p.249)
Christophe Gavat sait de quoi il parle et mène son récit sans temps mort. Il est passionnant, par son enquête, mais aussi par les hommes -et femmes- qui l'incarnent. Stanislas Midlak en tête qui sent que son couple ne tiendra pas le choc mais qui se cache la vérité, et les autres plus ou moins célibataires, dragueurs, pour qui la vie professionnelle passe avant tout. Ecrit par un flic dont le point de vue est partial voire contestable ne représentant que des flics intègres et des politiques pourris, il peut même frôler la caricature, mais sans doute y a-t-il plus de politiques que de flics poursuivis pour divers délits et les sommes, les objectifs et les conséquences ne sont-ils pas les mêmes ? Le politique à l'image de Robert Delacour, agit pour son propre compte, pour son profit personnel pas encore, pour détourner un titre de Pierre Combescot, "Pour [son] plaisir et [sa] délectation charnelle", mais d'autres réels et connus l'ont fait. Il agit pour le pouvoir et pour jouir de sa position de force, et toujours au détriment des citoyens que nous sommes, car au bout du compte, c'est nous qui rembourserons. Sainte-Jeanne est la commune la plus endettée de France, je n'ai pu, tout au long de ma lecture me défaire de l'image du maire de Levallois-Perret et de son épouse mis en examen plusieurs fois et qui continuent à gérer la ville, un modèle pour Robert Delacour à n'en pas douter.
Le label Sang neuf -dirigé par Marc Fernandez- chez Plon s'enrichit d'un titre fort qui bénéficie en plus d'une couleur de couverture inédite et du plus bel effet, entre le vert et le bleu, turquoise peut-être ?
Corruption ordinaire, ça sent le vrai, le vécu, l’authentique. J’étais impatiente de lire un polar écrit par un commissaire de police un vrai de vrai. Alors je n’ai pas été déçue ou si peu. Tout d’abord ce sont les références, la logique implacable et la grande connaissance du terrain qui donnent au roman de Christophe Gavat toute sa qualité. On va suivre le commissaire Stanislas Midlak et son équipe, des personnages secondaires qui sont attachants et touchants dans leur dévouement et leur profond engagement à arrêter les coupables, il y a même une certaine Valérie « flicesse » de son état qui donne le ton, du dynamisme à revendre. Il y a deux enquêtes en parallèle, celle très politisée et médiatisée du maire de Sainte-Jeanne qui est en train de tomber en entraînant avec lui tout un tas d’élus, grands patrons et autres banquiers pourris et celle plus commune de braqueurs de DAB entendez Distributeurs Automatique de Billets. Ce sont deux mondes bien différents, une criminalité que tout oppose et pourtant la limite est franchie et sur un rythme infernal, nous allons osciller entre ces deux enquêtes. On a peine à respirer tant c’est ancré dans la réalité, même la façon d’écrire ressemble parfois à un rapport circonstancié et j’ai bien failli m’en lasser, chaque chapitre apporte une nouvelle pierre à la construction de l’édifice entre politiciens véreux et truffés d’ambitions nauséabondes et grand banditisme avec certaines figures à l’ancienne , une sorte de code de l’honneur de plus en plus rare à trouver mais qui fait tout la différence. J’ai adoré le personnage de Jean-Louis Bastide alias Le Grand c’est même mon préféré de toute l’histoire avec Mérou et sa ressemblance avec Bourvil. Alors oui il y a certaines longueurs mais je suppose que dans la réalité aussi les longueurs et la patience sont souvent au rendez-vous, alors qui suis-je moi petite lectrice pour vouloir que tout se résolve fissa et qu’il n’y ai plus aucunes zones sombres. Corruption ordinaire reste une belle découverte qui m’a fait toucher du doigt une certaine réalité de la justice de notre pays, merci pour cela. Bonne lecture.
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