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Le 4 avril 1968, James Earl Ray assassine Martin Luther King à Memphis et prend la fuite. Entre le 8 et le 17 mai de la même année, il se cache à Lisbonne où il tente d'obtenir un visa pour l'Angola. En octobre 2013, sur les traces de James Earl Ray dans la capitale portugaise, Antonio Muñoz Molina se remémore son premier voyage dans cette ville, en 1987, quand, mari et père immature, fuyant un travail médiocre, il essayait d'écrire son deuxième roman, une histoire d'amour sur fond de jazz et de roman noir, L'Hiver à Lisbonne.La fascinante reconstruction du séjour de l'assassin croise alors le passé de l'auteur, et les deux récits alternent. L'un, autobiographique, relate, à la première personne et sur un mode très intime, l'apprentissage de la vie et des mécanismes du roman ; l'autre, à la manière d'un thriller, témoigne de ce qu'est l'accomplissement de la fiction, quand, fondée sur le réel, elle va au-delà des faits pour entrer dans la conscience des protagonistes. Maître de sa création littéraire, Antonio Muñoz Molina imagine les peurs de l'assassin exhibant ses faux passeports, assiste à ses déambulations nocturnes dans les bars et les hôtels de passe, le suit pas à pas avant de revenir à Memphis pour tenter de savoir pourquoi il appuie le canon de son fusil sur la fenêtre des toilettes d'une pension misérable et exécute Martin Luther King au balcon du Lorraine Motel. En prestidigitateur, le grand écrivain espagnol fait entrer le lecteur dans le mystère de l'univers mental du tueur, où se mêlent racisme, misère, admiration pour les livres de science-fiction, et la certitude que l'on peut impunément tuer un Noir militant des droits civiques.Comme l'ombre qui s'en va est un livre important, hypnotique, qui prend le risque de mêler deux genres littéraires et, en dernière instance, expose la théorie du roman de l'auteur.
J'avais emprunté ce roman en bibliothèque. Je ne connaissais pas l’auteur mais la quatrième de couverture semblait prometteuse.
Les premiers chapitres m’ont paru indigestes, trop chargés de référence, je ne parvenais pas à trouver pas la ligne directrice de l’écriture.
Après trois-quatre chapitres, je m’habituais à la plume de l’auteur, je prenais plaisir à la lecture ; des liens s’établissaient, des lignes de force se dégageaient.
L’accroche ne s’était pas faite immédiatement mais elle était puissante.
Quand un ouvrage me fascine, il me suit dans tous mes déplacements, le moindre petit instant qui pourrait être perdu devient prétexte à avancer dans ma tâche de lectrice.
Lors d’un trajet en train, le livre se trouvait donc dans mon sac posé dans la coursive…hélas, à l’arrivée, le sac avait pris son envol. Il fallait se rendre à l’évidence nous avions été victime d’un larcin…
Commande de l’ouvrage en librairie, attente et puis je reprends la lecture au point zéro…en pleine conscience que l’écriture de l’auteur s’était révélée passionnante, addictive.
Je flâne donc comme sur un chemin que je sais agréable, prenant plaisir à grappiller références musicales, littéraires, géographiques, touristiques. Savourant ces nouveaux mondes que l’auteur nous offre à découvrir en toile de fond de son roman.
Car cet écrit est dense, puissant, il pousse à la réflexion et chaque référence, chaque indication sert à construire la trame du récit…et, parfois, j’ai découvert en fin de lecture, le sens profond d’une référence livrée dans les premières pages.
Nombre de réflexions pertinentes s’intègrent au roman de manière naturelle, le lecteur doit pouvoir savourer les chemins de traverse, être nonchalant alors que le récit gonfle , enfle et s’enrichit de nombreuses ramifications.
Plusieurs récits sont tressés, entremêlés et constituent l’architecture qui m’avait un peu perturbée à la première lecture pour me ravir par la suite.
Dans les premières pages, il y a une alternance stricte entre les chapitres qui parlent de James Earl Ray et ceux tissés autour de l’auteur et la construction du roman. Ensuite l’auteur rompt ce rythme et laisse de plus en plus de place à ce qui tient le lecteur en haleine : l’errance de l’assassin, sa fuite…et sa chute.
Il y a la longue fuite de James Earl Ray, assassin de Martin Luther King après qu’il ait commis son crime.
L’auteur tente d’imaginer et de nous restituer l’univers mental de l’assassin.
On comprend mal pourquoi il a tué.
Et, à mots couverts, Antonio Munoz Molina explore la piste de l’humiliation. (Et cette grille de lecture, je la dois à un ami que je salue : merci m’sieur Jean)
Je m’explique.
James Earl Ray a grandi dans un univers misérable, sa proie est un américain, noir de peau, bien habillé, brillant, maniant la rhétorique, leader charismatique enflammant les foules et se déplaçant en Cadillac blanche avec chauffeur.
De plus, au moment des faits, James Earl Ray ne mesure pas l’importance de sa cible, il est persuadé de son impunité…le meurtre d’un noir reste insignifiant à ses yeux dans le contexte de l’époque.
En parallèle l’auteur se raconte au fil de deux voyages à Lisbonne qui ont nourri son roman et marqué sa vie.
La ville est un personnage.
Elle sert un thème très symbolique dans cette histoire : le contraste entre emprisonnement et ouverture, les lignes de fuite étant constituées par le fleuve, les avions, les bateaux.
Lorsque l’auteur parle de lui, il aborde aussi une réflexion sur l’écriture, pourquoi et comment commence-t-on un roman, quelles répercussions l’écriture a-t-elle sur la vie de l’écrivain ?
Comment nomme-t-on ses personnages et pourquoi le choix des patronymes est important, comment il crée la vraisemblance.
Il s’interroge aussi sur la consommation d’alcool, de nicotine en période de création. Et sur ce point, il établit également un parallèle avec le comportement de l’assassin lors de sa longue errance.
Enfin mettre un pont final à l’écrit, sortir du récit qui a alimenté son univers, ses fantasmes constitue aussi un dilemme.
C’est dans le regard que le narrateur pose sur l’auteur des faits que grandit, s’étoffe le personnage ; les non-dits, les indices livrés au lecteur vont germer dans l’esprit de ce dernier pour construire le l’identité de l’acteur principal.
L’identité est d’ailleurs un thème autour duquel l’auteur se livre à de nombreuses digressions, examinant notamment la facilité avec laquelle tout un chacun livre son identité réelle et combien il est ardu de devoir jongler avec plusieurs personnalités fictives, décliner son identité devenant alors un exercice périlleux.
Lorsque j’ai refermé ce livre, ses personnages ont continué à me hanter, les différents thèmes abordés menaient encore une petite danse dans mes neurones et, maintenant, ils pourraient m’empêcher de mettre un point final à cette chronique.
Je reviendrai à cet auteur et peut-être à ce roman, persuadée que je trouverai encore d’autres pistes de lecture, que je lèverai.
Voici ma première incursion dans l'univers d'Antonio Munoz Molina et je peux vous dire que cela a été un régal !
Je ne lis pas assez de littérature hispanique mais j'essaye de rattraper cette lacune, ce livre a deux temps est vraiment une très belle surprise, une très belle découverte, une lecture fascinante ! Nous sommes en 1968 et l'assassin de Martin Luther King prend la fuite. Nous sommes en 2013 et l'auteur Molina chemine sur les pas du meurtrier. Deux hommes qui vont se livrer, un roman autobiographique et biographique à la fois. Une mise en parallèle de deux existences qui n'avaient pourtant rien en commun...
Qui est cet homme qui a pu tuer l'un des hommes les plus importants du XXème siècle ? Qu'a t-il ressenti pendant et après cet acte odieux ? Qu'a t-il fait ? Qu'a t-il pensé ? Ce sont de nombreuses questions, des interrogations posées par l'écrivain qui va entrer dans la tête de ce personnage, lui donner une voix, une conscience. Bien sûr qu'il s'agit d'une œuvre de fiction mais on voit tout le travail d'Antonio Munoz Molina pour suivre les traces de James Earl Ray... L'idée même de se raconter en racontant la vie d'un autre est aussi très ingénieuse, car elle mêle les sentiments et donne encore plus de profondeur à l'ensemble.
Comme dans tout mystère historique, l'auteur décide de faire un choix. Le complot ou le meurtrier solitaire ? Il choisit le second pour mieux impacter sur le lecteur. Peu importe que ce soit la vérité, c'est sa vérité et la nôtre pendant le temps de cette lecture. On y croit, on se met dans la peau de chacun, l'Histoire se mélange à l'histoire et nous sommes embarqués. J'ai eu grand plaisir à lire ce récit car il est à la fois extrêmement intéressant dans son contenu et émouvant dans son introspection des pensées de Ray et Molina.
En définitive, je vous recommande chaudement cette très belle lecture !
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