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Dans ce roman violent, tendre et passionné, Claudio Magris se confronte à l'obsession de la guerre, quels que soient l'époque et le pays, une guerre universelle, indissociable de la vie même, rouge de sang, noire comme les cales des navires négriers, sombre comme la mer qui engloutit les trésors et les destins, grise comme la fumée des corps brûlés dans le four crématoire nazi de la Rizerie de San Sabba à Trieste, blanche comme la chaux qui recouvre le sépulcre et les noms des bourreaux. Classé sans suite est l'histoire d'un grotesque Musée de la Guerre pour l'avènement de la Paix, de ses salles et de ses armes dont chacune est une archive de passions et de délires; c'est l'histoire de l'homme qui sacrifie sa vie à son projet maniaque, puis se rachète enfin dans la recherche acharnée d'une atroce vérité cachée; c'est l'histoire d'une femme, Luisa, héritière de l'exil juif, de l'esclavage des Noirs et des vicissitudes d'une foule d'autres personnages en des temps et dans des pays les plus divers. À travers les éclats d'une narration totale, à la fois précise et visionnaire, Claudio Magris explore l'enfer impitoyable de nos fautes et raconte une épopée implacable traversée par les tragédies et les silences de l'amour et de l'horreur.
Je n’ai malheureusement pas accroché. Le sujet était prometteur : une petite-fille de déportée (Luisa) a la responsabilité de monter un musée consacré à la paix, selon les vœux de son emblématique fondateur. On peut refaire l’histoire du monde en étudiant l’histoire des armes. C’est fascinant de voir une nation l’emporter sur un simple avantage technologique, pour un fusil à plus longue portée, ou pour un tank aux chenilles plus larges.
Il y a deux récits qui avancent simultanément dans ce livre : une visite du futur musée, salle par salle, et l’histoire de la famille de Luisa. Pour apprécier le premier, il faut avoir l’esprit vide-grenier (de la mémoire), aimer les diversions incessantes. Elles peuvent être passionnantes comme la révélation des crimes de droit commun pendant les bombardements de Londres ou Trieste, qu’elle collabore ou qu’elle se libère. Mais sinon, ça tire dans tous les sens. À vouloir toucher tous les sujets, l’auteur n’en atteint aucun. Beaucoup trop de balles perdues. Et ces métaphores guerrières systématiques, ces descriptions sans fins, verbalistique ! Comme dans American Psycho, les lectures de notices, moi, ça ne m’emballe pas. J’ai eu l’impression de subir la logorrhée d’un ancien combattant bourré, impossible à suivre dans ses élucubrations.
Quant au deuxième récit, celui d’une famille juive emportée par le destin, il est confus parce qu’entremêlé à la question de l’esclavage (noir) – ça fait beaucoup. Quitte à lire une saga sur le peuple errant, autant choisir la fresque d’André Schwarz-Bart.
D’un fait méconnu (une chambre à gaz en Italie), Claudio Magris a construit un pensum. J’ai eu, un peu comme pour la guerre, une impression de gâchis.
Bilan :
De la guerre. Dans ce roman magistral, autour du point névralgique que fut Trieste, Claudio Magris construit un mausolée muséal à la violence humaine, à sa propension à en oublier les répétitions. Classé sans suite joue alors d'une narration sidérante, souvent hallucinée dans sa précision et son érudition. Un récit monomaniaque qui laisse le lecteur interdit : tel qu'il devrait être face à la guerre.
https://viduite.wordpress.com/2018/01/12/classe-sans-suite-claudio-magris
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