"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Paris, début des années 20. Un vieux bouclard du quartier de la Bastille. Un serveur derrière le comptoir nettoie ses verres en rêvant, manches relevées, tatouages apparents sur des bras musclés et blancs. La nuit est tombée, la porte s'ouvre. Entre une très jeune et très jolie métisse, cheveux courts, garçonne, la silhouette fine. La femme est accompagnée d'un homme d'un certain âge, gros, riche, transpirant et essoufflé. Son micheton sans doute. Bientôt viendra les rejoindre le chauffeur de l'homme riche, aussi louche que patibulaire... Dans un huis clos étouffant leurs histoires vont se mêler, histoires de tranchées, de vols, de courses, de frangins, d'amour et de trahison. Au bout, il y aura la mort pour deux des quatre protagonistes. Oui, mais pour qui la faucheuse ?
« Apache » c’est la première bande dessinée réalisée par Alex W. Inker en mars 2016, déjà chez Sarbacane , déjà dans une gamme restreinte de couleurs, déjà original par sa facture à l’italienne. Des prémisses donc de ce style si particulier que l’on retrouvera dans les œuvres suivantes.
Il n’est nullement question de western ici mais du Paris de la Belle époque et de l’après grande guerre ; « un Apache » c’est un voyou dans l’argot de l’époque ! Dans ce Paname des années vingt, un soir, un couple mal assorti, un vieux riche adipeux et une jolie poulette noire à la perruque blonde, déboule dans le bistrot d’Eddy ex-bagnard. Leur voiture est tombée en panne alors qu’ils se rendaient aux courses et Monsieur veut écouter les résultats car l’un de ses chevaux est en lice. Pendant qu’il est pendu à la TSF, Eddy et la jeune femme s’observent, bavardent et trinquent ; survient le chauffeur qui annonce que leur véhicule est réparé…
Tout commence dans un huis-clos poisseux, mais nous nous échappons à plusieurs reprises du troquet par des flash-backs joliment amenés qui nous ramènent à la période de l’avant-guerre ou du Front et lient de façon surprenante les protagonistes entre eux.
C’est un très bon polar bourré de références au film noir mais l’humour est aussi souvent présent dans ces pages ; d’ailleurs même les "Pieds-nickelés" s’invitent dans cette Bd au détour d’une case ! In fine, les truands sont plus stupides qu’effrayants et leur quatuor improbable est assez jubilatoire. Et puis il y a bien sûr la présence cet argot gouleyant (pour ceux qui s’y perdraient perdus un lexique est fourni en fin de volume), ce nuancier de couleur orange , cet association d’aplats et de trames, qui rappellent les albums de « Zig et Puce » ou de « Felix The Cat » !
Un très beau coup d’essai !
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