Ne vous attendez surtout pas en ouvrant Le dernier debout à assister à un combat de boxe qui se lirait sur 328 pages. Aussi fameux soit-il, ce combat du siècle opposant Johnson à Jeffries, qui s’est tenu à Reno le 4 juillet 1910, sert de trame pour nous raconter l’histoire d’un homme, noir, fils...
Voir plus
Ne vous attendez surtout pas en ouvrant Le dernier debout à assister à un combat de boxe qui se lirait sur 328 pages. Aussi fameux soit-il, ce combat du siècle opposant Johnson à Jeffries, qui s’est tenu à Reno le 4 juillet 1910, sert de trame pour nous raconter l’histoire d’un homme, noir, fils d’esclave et champion du monde. Ou plutôt premier Noir champion du monde de boxe poids-lourd. Parce que jusqu’à présent, le racisme et la color line empêchaient l’affrontement entre un Noir et un Blanc. Mais évitait surtout qu’un homme noir puisse prendre le dessus sur un homme blanc dans le domaine sportif.
C’est donc à travers 15 rounds, décrivant ce combat mythique, que Youssef Daoudi (dessin et couleur) et Adrian Matejka (poète et scénariste) nous présentent la vie du colosse Jack Arthur Johnson. Quinze chapitres pour mieux comprendre l’état de la société américaine en ce début de 20e siècle. Un pays où la Guerre de Sécession et Abraham Lincoln ont permis de briser les chaînes de ceux qui, en raison de leur couleur de peau, avaient perdu leur liberté. Mais cette abolition ne signifie pas pour autant un retour à une réelle liberté, surtout quand celle-ci s’accompagne de ségrégation raciale.
Une vie. Ce titre emprunté à Guy de Maupassant aurait pu prendre place sur la couverture de cet album. Une vie qu’il faut se construire à la force des poings pour enfin espérer être reconnu. La reconnaissance, une chimère poursuivie par Jack Johnson qui ne rêve que d’être enfin à sa place dans son propre pays.
Tout n’est pas parfait et idyllique dans le parcours de cet homme. Celui-ci avait aussi le poing lourd face à Etta, la femme blanche qu’il avait épousée. Les auteurs ont essayé d’être justes en parlant du boxeur, mais surtout de l’homme qu’il était, une fois descendu du ring. Et c’est en noir, couleur de la peau de Jack Johnson, en blanc couleur de la peau de Jim Jeffries son adversaire et en rouge couleur du sang versé lors de ce combat de boxe, mais surtout lors de combats pour la liberté, que Youssef Daoudi a mis en image la poésie ô combien puissante d’Adrian Matejka.
Un magnifique album et un très beau plaidoyer pour le droit à l'égalité.