"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Elle est chanteuse, autrice, compositrice et interprète ; et enseignante ; il faut bien vivre... Quand elle rencontre Tristan, c'est le coup de foudre.
Il rêve d'être un photographe reconnu, mais n'est que libraire ; il faut bien vivre... Il semble lui aussi éperdument amoureux.
Quand il l'emmène dans sa famille, elle comprend que Tristan a été maltraité, psychologiquement sûrement, physiquement peut-être. Et c'est le début de l'enfer...
À aucun moment, l'autrice n'a donné de nom ou de prénom à son héroïne, elle n'est que "Je", ou "Tu" quand Tristan s'adresse à elle. Puis elle devient aussi "Égoïste", "Salope" ou "Connasse" quand il est en colère.
On suit ainsi sa plongée - celle du personnage ou celle de l'autrice, puisque celle-ci ne cache pas l'inspiration autobiographique de son roman ? - dans un enfer qui peu à peu devient son quotidien.
La violence n'est pas physique, ce qui aurait pu être, paradoxalement, salvateur. Elle n'est que verbale et psychologique. Alors le lecteur partage les interrogations et les hésitations de la narratrice. S'il ne connaissait pas le sujet du roman, il pourrait se laisser prendre au jeu.
La forme narrative retenue, un long monologue introspectif, nous plonge au cœur du sujet, comme un juré écoutant le témoignage d'une victime.
L'écriture est directe, ne cherchant pas à cacher les violences vécues et ressenties - quand "Elle" en est réduite à s'enfermer dans les WC, par exemple ! Ce roman est accessible à tous.
Un très beau roman témoignage !
Un dernier mot : en lisant le livre, j'ai écouté en boucle l'album "je, tu, elle" de la romancière/autrice/compositrice/chanteuse. Je n'ai pu m'empêcher de penser à Barbara, qui fut elle aussi victime d'une forme d'emprise, l'inceste - peut-être le pire du pire du pire, car l'enfant n'a aucun moyen de défense. Écoutez notamment "Elle dit non" :
"Elle a mis les jupes roses
Elle a joué à la poupée
Elle a fait toutes les choses
Que font les filles bien élevées
...
Ce soir elle a dit non
Depuis le temps qu'elle ne dit rien
C'est pourtant pas comp-
Pliqué et ça fait tellement du bien
..."
Chronique illustrée : http://michelgiraud.fr/2023/10/27/a-trop-aimer-dalissa-wenz-chez-denoel-un-tres-beau-roman-temoignage/
C’est grâce à une amie des livres que j’ai eu connaissance de ce petit ouvrage d’Alissa Wens "Lulu, fille de marin" pourtant publié en 2019. Il m’a suffi de constater qu’il s’agissait de l’histoire de sa grand-mère Bretonne pour qu’aussitôt l’envie de le lire se fasse sentir. La Bretagne, les marins, tout pour me plaire…
La collection, dans laquelle est parue cette histoire de Lulu porte un très joli titre : "une vie, une voix" et raconte "des vies ordinaires, des voix singulières… Ces récits sont réels. Ces histoires sont la nôtre" et oui, c’est tout à fait ça. Alors bien sûr je ne suis pas là pour vous parler de moi mais de Lulu et de ce qu’en a écrit sa petite-fille Alissa. Et pourtant, cette grand-mère, ressemble tellement à ma mère. Certes elle n’habitait pas au bord de la mer mais dans cette zone entre l’Armor et l’Argoat, certes elle n’était pas fille de marin, mais d’un ouvrier de l’Arsenal de Brest, mais elle aussi "rêvait dans", cette expression typique qui, comme l’écrit si joliment l’auteure, laisse à penser que "le rêve [était] un pays, un territoire à visiter." Elle aussi "était vite rendue" quelque part et souvent se cassait "la margoulette".
Je suis restée sous le charme de l’écriture d’Alissa Wenz, découverte l’an dernier à travers son roman "L’homme sans fil". Certes le récit n’a rien à voir mais de la même façon j’ai aimé la vivacité, la délicatesse, les mots posés là au bon endroit, qui transmettent à merveille l’amour de l’auteure pour sa grand-mère mais aussi la vie de cette femme, petite fille qui attend son père, parti à Terre-Neuve pêcher la morue. Adolescente pendant la guerre, puis jeune femme, jeune mariée qui attendra aussi son mari, aviateur. Tout est racontée dans une langue qui sautille, qui va et vient au gré des souvenirs de Lulu.
Surtout ne pas tout vous raconter de cette vie, vous laisser la découvrir comme je l’ai fait, vous laisser arpenter les rues de son village, vivre ses coutumes, écouter ses potins.
J’ai adoré cette histoire. Elle est aussi la mienne.
https://memo-emoi.fr
En 2022 j’ai lu le premier roman d’Alissa Wenz dans le cadre du Prix Orange du Livre. J’avais beaucoup aimé « L’Homme sans fil ». C’est donc avec joie que j’ai accueilli cette masse critique de Babelio. Je découvre par la même occasion cette collection, « Une vie, une voix » des ateliers Henry Dougier. Ce sont récits personnels racontant des vies ordinaires, des métiers, une France passée, « notre mémoire commune ».
Dans ce petit livre de 107 pages paru en 2019, Alissa Wenz rend hommage à sa grand-mère Bretonne, née à la fin des années 1920. Tantôt elle raconte, tantôt elle pose des questions à sa grand-mère et rapporte leurs dialogues. Lucienne dite Lulu s’exprime simplement. Parfois on entend un accent ou du patois dans ses phrases. Elle raconte par bribes son enfance, sa famille, son père marin, son mariage mais aussi la condition féminine, la vie à la campagne, la guerre, l’occupation allemande. On voit une femme évoluer à travers le XXe siècle. Elle fait partie d’une génération qui a eu peu de droits et destinée à être des épouses et des mères, laissant de côté leurs rêves. On sent aussi de la nostalgie et quelques regrets de la part de Lucienne.
Alissa Wenz termine le livre en disant ce qu’elle sait de sa grand-mère, un portrait touchant qu’elle conclut par cette phrase :
« Je sais de ma grand-mère qu’elle m’aime, et que je l’aime. »
Ce témoignage permet de garder une trace d’une époque et c’est en cela que cette collection est un élément patrimonial intéressant. C’est aussi une belle leçon de vie que Lulu transmet avec tendresse à Alissa.
Je remercie Babelio et les ateliers Henry Dougier pour cette lecture
Adrian Lamo, Bradley Manning, ces noms là vous disent-ils quelque chose ? Personnellement non, mais après avoir découvert L’homme sans fil, je ne peux plus les ignorer.
En 2010, un jeune soldat échange par internet pendant de longues nuits avec Adrian Lamo. Il lui parle de ses craintes, et de son envie de révéler des documents pourtant classés secret défense. Il se sent à l’abri derrière son écran mais pourtant, par esprit civique Adrian Lamo va le dénoncer.
Un procès et de nombreuses péripétie plus tard, on est en droit de se demander ce qu’est devenu Lamo ?
C’est un jeune homme solitaire, un as du web, un hacker fou, qui connait tout les systèmes, ne vit que pour son ordinateur, et peut pénétrer l’architecture web de n’importe quelle grande entreprise. Par pour lui ou pour en retirer un quelconque bénéfice, mais pour prévenir la firme qu’il a réussi à hacker de la faiblesse de son infrastructure.
Pourtant, cette façon de faire ne plaît pas. Adrian par ailleurs déjà bien malmené depuis sa délation, va subir procès et vexations à la chaine, jusqu’à vivre dans la rue comme un vagabond, puis se terrer dans un appartement et s’isoler du monde qui l’entoure.
C’est cet homme si singulier qu’Alissa Wenz a choisit de nous présenter, en lui redonnant cette part d’humanité qui l’anime, ce sens civique, ce besoin d’aider son prochain, non pas à la façon de monsieur tout le monde, mais à la hauteur de ses moyens, de son don, la manipulation et sa dextérité à connaître et pénétrer le web et internet comme personne.
Cet homme m’a fait penser à Alan Turing. Le déchiffreur d’Enigma a lui aussi subi un traitement inhumain, du fait de son homosexualité, et a fini par se suicider. Ces hommes et ces femmes qui sortent du rang, quelle qu’en soit la raison, ont du mal à être accepté pour ce qu’il sont, et y compris pour leur différence, et a être appréciés à leur juste valeur.
J’ai aimé l’humanité, l’objectivité, dont fait preuve l’autrice pour nous parler d’Adrian Lamo. L’écriture est fluide, le récit instructif se lit comme un roman. Pourtant, il ne faut jamais perdre de vue la réalité, la solitude, la souffrance, qui se cachent derrière les mots. Une enquête qui interpelle avec finesse sur notre appréhension du monde et notre façon d’accepter les différences.
chronique à lire sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2022/05/31/lhomme-sans-fil-alissa-wenz/
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