"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
De l’auteur, j’avais beaucoup aimé Comptine en plomb il y a quelques années.
Rencontré à Vienne lors des dédicaces Sang d’encre, je me suis fait dédicacer cette seconde enquête de soeur Blandine (oui, j’aime lire certaines séries à rebours).
J’ai adoré retrouver cette enquêtrice qui n’a pas sa langue dans sa poche, qui sait tirer les vers du nez des plus récalcitrants et à qui aucun détail n’échappe.
Je ne me rappelais pas que dans Comptine en plomb les personnages mangeaient aussi bien, mais dans celui-ci, ils ne se laissent pas abattre à coup de charcuterie et de vins rhône-alpins.
J’ai aimé la sorcière qui conduit une grosse moto et qui ne s’en laisse pas compter.
Honte à moi, j’ai découvert la Dombes et ses paysages magnifiques pourtant pas si loin de chez moi.
J’ai été scotché du vocabulaire local utilisé par l’auteur, lui qui n’est pas natif de la région.
Une enquête drôle et gastronomique.
L’image que je retiendrai :
Celle de Titine, la brave 4L que conduit soeur Blandine et qui menace à chaque fois de ne pas démarrer.
https://alexmotamots.fr/les-sorciers-de-la-dombes-philippe-bouin/
C'est drôle, impertinent, et très agréable à lire.
Revoilà Archi déjà rencontré dans Le vignoble du diable et Les chais des ambitieux. Toujours aussi bon vivant et impliqué dans le bien-être de ses administrés et de Xa. Le village est au complet avec ses différents habitants : des sympas, des drôles, des tête-de-cochon, des bigotes, des anticléricaux et même un curé africain, le père Goma qui me plaît bien, car loin d'être un dévot, il adapte les principes de l'Église aux situations et à l'évolution des mœurs ; il a connu et vécu des horreurs dans son pays d'origine et depuis, il relativise beaucoup, ce qui est une de ses grandes qualités. On est loin de Don Camillo et de Pepone, car là, le maire et le curé s'entendent pour tout et se comprennent à demi-mots. Par contre, les villageois ressemblent un peu à ceux du village du curé italien, c'est donc avec beaucoup d'humour que Philippe Bouin raconte son histoire.
D'abord, je salue sa belle idée de commencer son roman par le numéro 1 de Villages en folies, qui lui permet de refaire le point sur tous les personnages principaux de sa série et donc de nous les remettre vite en mémoire ; on entre donc tout de suite dans le vif du sujet. sa langue est patoisante (?) et joue avec des effets de niveau, un mot parfois désuet -notamment certains dont j'use moi-même : "icelui, icelle"- ou d'un langage châtié émaille les phrases collant ainsi à Archi, qui est très ancré dans son village, mais très original, il s'habille avec des vêtements exotiques (Inde, Tibet) a un catogan et n'a jamais oublié son passé de juge puisqu'il s'en sert encore pour mener ses enquêtes. Atypique, il n'habite pas un superbe loft, mais un manoir assez moche, mal meublé et mal décoré auquel il ne peut rien changer tant que ses parent vivent encore. Bougonne la femme-à-tout-faire est fidèle à son surnom, mais surtout aux petits soins et Tirbouchon, le labrador d'Archi, eh bien il ne lui manque que la parole puisqu'il comprend tout et s'agace même qu'on puisse en douter.
Et l'intrigue dans tout cela ? Elle tient jusqu'au bout, je devrais même dire, elles tiennent jusqu'au bout puisqu'il y en a deux. P. Bouin modernise le thème du corbeau en en faisant un animal connecté, parle de ce phénomène détestable qui a cours sur la toile qui autorise les propos infamants et diffamants et parfois franchement dégueulasses en toute impunité puisque les pseudos permettent l'anonymat.
Un roman très bon, léger, drôle, bien ficelé, avec des personnages qu'on aime à retrouver, avec de la bonne bouffe, du bon vin -je suis plutôt amateur de ceux du sud-ouest, mais si un viticulteur du beaujolais me lit et qu'il veut me faire changer d'avis, il y a un onglet "contact" en haut de la page (à force de demander, on ne sait jamais...)- ; bref une série vraiment agréable, si vous le pouvez, commencez-la dès le début et dégustez sans modération
Philippe Bouin m'était inconnu jusqu'à ma lecture de l'enquête précédente d'Archibald Sirauton, Le vignoble du diable. Comme ce vignoble m'avait plu, j'étais partant pour la suite, du même tonneau si je puis m'exprimer ainsi. Même registre d'écriture entre français classique, argot, patois beaujolais ou lyonnais (lexique en fin de volume, auquel je n'ai eu que peu recourt, parce qu'on comprend aisément le sens global de la phrase, même émaillée de mots inconnus). Mêmes personnages : Archi, Xa son amie comédienne, Bougonne la gouvernante qui porte bien son nom, Hippolyte Goma le curé de la paroisse venu tout droit d'Afrique, Fernandez le gendarme qui travaille en étroite collaboration avec Archi, Filoche ex monte-en-l’air reconverti en second d'Archi, Poussin le commissaire lyonnais qui ne bouge pas surtout si les suspects ont des relations mais qui peut s'acharner sur un "petit" -la montée dans la hiérarchie se fait à ce prix selon lui- heureusement secondé par le capitaine Bordas et bien sûr Tirbouchon, le chien d'Archi qui ne peut pas parler à son grand désarroi : "Tirbouchon grogna en ut majeur. En langage canin, ce grognement était de l'ironie. Si Archi avait su qu'il comprenait ce qu'il disait, ce n'est pas étonné qu'il eût été, c'est ébloui." (p.264) Même plaisir de lecture légère, drôle. Un polar pour se détendre qui aborde néanmoins des points plus sérieux comme la succession des exploitants viticoles, la mauvaise réputation du beaujolais d'il y a plusieurs années lorsque des viticulteurs n'hésitaient pas à rajouter du sucre, la volonté des Chinois d'entrer dans le capital de certaines grosses entreprises et le marché chinois vu comme un eldorado par certains alors qu'il n'en est probablement pas un : "Désolé de te contredire, l'investissement doit être progressif. Or, à l'heure d'aujourd'hui, la demande est nébuleuse. Par conséquent, tout miser sur la Chine serait de la folie. Dans un pays qui peut vous virer du jour au lendemain, ou vous taxer lourdement pour protéger ses intérêts, on avance sur la pointe des pieds." (p.79). Très dialogué, cette technique permet de confronter les points de vue, mais bien sûr, Philippe Bouin ne creuse pas trop les sujets sérieux, ce n'est pas un essai sur les exportations viticoles ! Tout reste dans le domaine de la légèreté et de l'humour, l'auteur ne rechignant jamais à un bon mot ou à une répartie de l'un de ses personnages, comme cet échange entre le commissaire Poussin et son collègue le capitaine Bordas :
"Vous n'imaginez quand même pas que cet idiot a commis ce crime ?
- Croyez-en mon expérience, capitaine, il faut toujours se méfier d'un imbécile.
Goguenard, Bordas riva son regard au sien.
- Soyez tranquille, commissaire, c'est ce que je fais tous les jours." (p.183)
Un polar-pinard (deux bons ingrédients) qui fleure bon la ruralité (aucune condescendance chez P. Bouin ou chez moi, au contraire), le plaisir de se retrouver entre amis de déboucher une bonne bouteille et de parler de ses souvenirs d'enfance. Un charme légèrement désuet et à la fois intemporel qui marche à fond, qui n'est pas sans rappeler les téléfilms Le sang de la vigne (qui passent sur France 3, avec Pierre Arditi, tirés des romans de Jean-Pierre Alaux et Noël Balen, que je n'ai pas lus) avec un personnage principal, plus décalé et haut-en-couleurs, ex-juge, devenu vigneron, qui s'habille voyant aux quatre coins du monde.
Une série qui a démarré et qui continue sous d'excellents augures, dans cette belle collection qu'est Terres de France.
PS : dans mon billet Le vignoble du diable, je disais mon ignorance de cette région viticole qu'est le beaujolais, et invitais les éventuels professionnels qui me lisaient à m'envoyer des échantillons de leurs productions, histoire de juger. Mon appel n'as pas été entendu ou alors, les viticulteurs sont des gens timides, qui n'osent pas... Osez, osez me contacter, je renouvelle mon invitation, je goûterai bien volontiers...
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