"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
On est un présence d'une thématique "Frankenstein gothique". La terre est radioactive, les humains sont partis sur Mars. Un scientifique en pleine déchéance est kidnappé par une femme qui lui demande l'impossible : cloner sa fille décédée. L'ambiance est sombre, les dessins sont hachurés et deviennent de plus en plus sinistres au fil de la lecture. J'ai beaucoup aimé les graphismes et le rendu général ! Le bémol réside dans le synopsis qui va beaucoup trop vite a mon sens, on a très peu d'éléments sur l'univers et ces fameuses créatures marines. Heureusement que le cyborg a travers ses souvenirs nous donne un peu de contexte. C'est finalement plus une BD contemplative ou l'intrigue n'est qu'un prétexte et est laissée en second plan. Le final reste trop ouvert a mon goût je m'attendais vraiment a un tome 2 !
Cet opus, terminé il y a déjà plus de deux ans par ses auteurs, était très attendu de la part des aficionados des nouvelles de « Conan le Cimmérien ». En effet, « Les clous rouges » est considérée comme le chef d’œuvre de Robert E Howard. Cette longue nouvelle, extrêmement sombre, est la dernière nouvelle de l’auteur et paraîtra dans « Weird Tales » quelques jours après son suicide. Elle est marquée par une noirceur inégalée liée au contexte biographique dans lequel elle a été conçue. La santé de la mère d’Howard se dégrade, il doit faire face à de très nombreux frais médicaux, et se sent acculé financièrement. Au même moment, il découvre la trahison de sa petite amie Novalyne Price qui fréquente à son insu l’un de ses meilleurs amis avec qui il avait prévu de longue date un voyage au nouveau Mexique qu’il décidera malgré tout de ne pas annuler…
« Les clous rouges » portent l’empreinte cette double désillusion amicale et amoureuse mais également de la visite effectuée, lors du voyage néo mexicain, à Lincoln, théâtre de la « guerre sanglante du Comté de Lincoln » : un village dans la vallée, au milieu de montagnes et de grandes étendues désertiques, coupé du reste du monde dans lesquelles s’amplifièrent jusqu’à la tragédie, cinquante ans auparavant, des querelles de voisinage sans importance … Sous les oripeaux orientalo-aztèques du palais de Xuchotl on peut voir la résurgence de l’impression indélébile reçue par l’écrivain devant « ce village momifié » : « je n’ai jamais ressenti en aucun autre endroit les sensations bien particulières que Lincoln a provoquées en moi, au premier rang desquelles une sensation d’horreur ».
A la lecture de la description de la cité, totalement murée et artificielle, sans lumière du jour, sans rapport avec la nature, le lecteur ne manque pas d’éprouver un sentiment de claustrophobie. La vision de la société qui y évolue est d’une noirceur inégalée jusqu’alors : Howard y dresse le portrait d’une civilisation décadente où règnent trahison et folie et l’obsession du sexe. Il qualifiera lui-même cette histoire de Conan de « la plus sombre, la plus sanglante et la plus impitoyable de la série à ce jour ».
Or, dans l’album on ne retrouve pas ce rythme lent, angoissant. C’est un Conan à la sauce Tao Bang qui nous est présenté : 20 ans après l’équipe se reforme peu ou prou. On a de nouveau une belle pirate et de très beaux dessins. La technique en couleurs directes employée par Cassegrain fait merveille, les paysages de jungle et le dragon dinosaure sont superbes (le dessinateur avoue lui-même adorer tout ce qui est « organique »). Vatine est un storyboardeur renommé et un concepteur de décors dans l’animation et cela se voit également dans la présentation de la cité perdue ! Les dialogues d’Hautière sont savoureux dans la première partie : Conan a un sens de l’autodérision et de l’humour détonant : il apostrophe ainsi le dragon : « Viens un peu par ici gros lard » avant d’ajouter « j’ai toujours eu envie de m’offrir un sac en peau de lézard ». Nos auteurs ont le sens du découpage et du cadrage particulièrement dans les scènes d’action virevoltantes à souhait (Cassegrain a lui aussi commencé sa carrière dans l’animation et il a vraiment le sens du mouvement !) qui deviennent drôles à force d’être hyperboliques et de jouer sur les codes ! On a parfois l’impression de voir en images des passages d’ « Yvain le chevalier au lion » ! Comme dans « Yvain contre le géant Harpin » : ça tranche des biftecks dans les cuisses des adversaires. Le sang coule à flot mais de façon très série B au second degré (voir par exemple le plan moyen en contre plongée dans lequel Conan tranche un adversaire littéralement en deux)…
C’est léger, plaisant, mais on y perd le côté tragique et mythologique du texte originel (toute la tragédie de la cité perdue commence par le vol d’une femme comme dans la guerre de Troie). C’est peut- être dû au format : depuis le début de la série, les albums sont calibrés à 56 pages quoi qu’il advienne. « Les clous rouges » ont ainsi la même pagination que « la fille du géant du gel » qui est à l’origine une nouvelle de 7pages seulement. C’est beaucoup trop condensé, le rythme n’a pas le temps de s’installer, la tragédie des Tlazitlas est résumée à la hussarde et on s’y perd ! Les personnages n’ont plus ni profondeur ni ambiguïté et plus grave subissent une véritable édulcoration.
La couverture en est un bon exemple : elle constitue en effet, dans sa composition, sa palette chromatique et l’attitude du héros un vrai hommage à l’une des illustrations les plus célèbres de Conan par Frazetta. Or, quelle n’a pas été ma surprise de découvrir que l’illustration originale de couverture (exposée cet été chez Maghen) avait été censurée ! Les créatures alanguies au pied de Conan ont été dotées de petites culottes ! Howard déclarait au moment de sa rédaction « je pense que je vais mettre dans ce récit plus de sexe et de sang que dans n’importe quel récit de ma carrière ». Or, dans l’adaptation, on a le sang, mais pas le sexe ! Contrairement au « Chimères de fer dans la clarté lunaire » de Virginie Augustin qui dépeignait fort bien la tension érotique régnant entre Olivia et Conan, on n’a ici qu’une grosse allusion grivoise émanant de Conan au début de l’album mais pas d’approfondissement des liens entre les héros ni mention de l’attirance qu’éprouve Valeria pour ce dernier. On n’y retrouve pas non plus son côté sadique (quand elle torturait dans longuement et inutilement une servante dans la nouvelle) et encore moins ses relations saphiques avec Tascela (c’était l’intention du romancier qui écrivait: « j’aimerais savoir ce que vous pensez de ma façon de traiter le thème du lesbianisme » [dans les « clous rouges »] ) ! L’ensemble de l’album est étonnamment sage voire pudibond parce qu’il y a toujours un volute de fumée bien placé, ou un bijou qui font office de feuille de vigne ! Devant cette forme moderne de puritanisme, on pourra alors se demander à quel public est véritablement destinée la série… Ce flou dans le lectorat visé, ainsi que l’impossibilité de dépasser les 56 p ont desservi ce 7eme opus. Il reste très divertissant mais n’est pas le chef d’œuvre qu’on attendait. C’est dommage !
TERRE EN ABANDON.
Un univers post-apocalyptique, ou peut-être juste de la science-fiction. Le début est complexe, s’apprivoise avec difficulté pour ce monde qui est à peine effleuré. La Terre est abandonnée, sa science jugée dangereuse. Mais quelques fripouilles viennent encore débusquer les bibliothèques oubliées. Une mère archéologue et sa fille imprudente. Une chute. Voici la mort qui enveloppe la petite. Le récit démarre réellement après l'événement. De science-fiction, on plonge dans un autre genre, on bascule vers le gothique, tout en conservant ce chuchotement qui invoque Lovecraft.
NARGUER LA MORT.
Un manoir où gambadent quelques aranéides (mes frissons n’ont cessé à aucun moment, moi qui répugne de voir ces bêtes). Le corps d’une fillette enveloppée dans un liquide, suspendue dans une cuve. On croit lorgner du côté de Frankenstein. On plonge dans un monde où les frontières entre sciences et magie sont maigres. Manipuler l’un, et duper l’autre. Jouer à ressusciter une fillette au péril de déranger la Mort. Le récit se déroule avec superbe, nous entraîne dans un conte gothique duquel on ne voudrait pas s’évader.
RENAISSANCE DE GUSTAVE DORE.
Du graphisme, il étonne mes billes, surprend, me ravit. La version que je lis est colorée, mais j’apprends qu’une version grand format et noir/blanc existe. J’aurais préféré celle-ci, qui m’aurait certainement permis de mieux apprécier tout le travail d'Alberto Varanda. Un dessin qui convoque les gravures de Gustave Doré, tout un onirisme cauchemardesque.
Un roman graphique pour les amoureux des histoires noires. Un mélange risqué mais un pari réussi entre les genres. Une adaptation réussie du roman de Stefan Wul.
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