"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une semaine après l’avoir posé, j’hésite encore sur le rendu de mes impressions et de mon ressenti.
Par moment, j’ai bien apprécié le calme et le temps de réflexion en pleine tempête, à d’autres j’ai été profondément agacée par tout ce mielleux et les bons sentiments, les mots tels que gratitude, bienveillance, amour reviennent trop souvent à mon gré !
Dès le début ;
, j’ai senti une faille chez la mère, Doris, qui ne veut pas, si elle peut les en empêcher, faire entrer les amis de ses enfants chez elle : elle n’a pas besoin du monde, du monde viendra le malheur « ce qui est au-delà, quoi que ce soit, doit y entrer. Je vais m’y faire » page 36
et le malheur qui va s’abattre sur eux, tranquilles dans leur ferme du Maine, unis et pleins d’amour, entre eux, pour Dieu également, va tout faire éclater, on s’en doute.
Le livre à trois voix, Doris la mère, Tup le père et Dodie la fille, rend bien compte des dégâts sur chacun d’eux, le quatrième membre étant considéré comme trop petit au moment du drame, n’a pas son mot à dire et sa vie prendra un autre chemin.
Douleur, résilience, combat, gratitude, ingratitude, isolement et communauté, sans oublier prière, Dieu, messe et surtout travail, travail, travail, ce livre se résumerait facilement à ces mots s’il ne planait la poésie du lieu, des travaux des champs rendus presqu’agréables dans leur description.
Des éclairs de pure beauté, suivis de passages d’auto analyse répétitifs renforcent le sentiment que le malheur qui les frappe ne peut être surmonté que par l’amour, suivi très rapidement par, « ca suffit, toute cette guimauve »…
Alors, à chacun son choix, sa voie, sa vie !!
Roman de la rentrée littéraire de ce début 2024, une fresque familiale qui se déroule sur cinq générations, une oeuvre à la fois joyeuse mais aussi triste lorsque la tragédie frappe cette famille de fermier.
Grande dépression, l'amour, le deuil, la vie d'agriculteur, le travaille.
Une lecture agréable, douce, touchante et sensible, on commence à partager la joie de Tup et Doris Senter puis le temps des enfants. Mais cette vie heureuse vole en éclat lorsqu'un drame se produit, cela entraine la crispation, la jalousie et les conflits.
Une écriture magnifique qui parle de résilience, de courage, de reconstruction, de souffrance, des personnages attachants, l'amour, la fragilité, le chagrin et la solitude. De la tristesse, de l'émotion si vous êtes hypersensible garder une boîte de mouchoir près de vous.
"Personne ne peut savoir ce qui va arriver. Vous rencontrez un homme, vous l’épousez, et vous découvrez si vous avez fait ou non le bon choix. Si c’est le cas, vous vous aimez et vous travaillez dur, puis vous avez votre premier bébé, et tout ce dont vous avez rêvé change dès l’instant où vous le tenez dans vos bras, où vous lui donnez à manger et le voyez scruter votre visage. J’avais dix-neuf ans à la naissance de Sonny est né, puis Dodie et plus tard Beston, j’étais disposée à renoncer à la vie que nous avions, Tup et moi, et à laisser mes enfants prendre cette place. Je le suis plus que jamais."
"Tous ces petits poissons argentés en bancs compacts formaient leur propre rivière de lumière dans le cours d’eau. Sonny s’est campé bien solidement pour résister au courant et y a plongé l’épuisette, qui s’est remplie en un éclair. Papa a alors tendu le seau pour recueillir les poissons scintillants, encore et encore et encore, jusqu’à ce que Sonny et lui aient rempli le premier seau et que ce soit mon tour, toujours dans l’ordre habituel, Sonny-Dodie-Beston, alors je me suis avancée, pataugeant dans l’eau juste en dessous de la limite supérieure de mes bottes. Je sentais les poissons glisser et se cogner contre mes jambes, tellement désireux de rentrer chez eux pour faire leurs bébés."
C’est d’abord le bandeau de l’éditeur qui attire l’œil « Bouleversant de poésie, de beauté et de grâce », commentaire de Joyce Maynard, puis cette magnifique couverture illustée qui n’est pas sans rappeler « Où vivaient les gens heureux », l’une des dernières plublications de… Joyce Maynard. Autant dire que les attentes étaient hautes pour ce premier livre de l’américaine Meredith Hall.
C’est une histoire simple - presque banale - d’une famille de fermiers du Maine dans les années 50 : le couple Tup et Doris et leurs trois enfants, Sony, Dodie et Beston. Une vie modeste, faite de labeur et de plaisirs simples sur l’exploitation laitière héritée des parents de Tup. Une vie rythmée par les travaux champs, les traites et les vêlages, au rythme des saisons, et en lien direct avec la nature. Pour égayer le quotidien, des plaisirs simples. Une sortie en patin sur la rivière gelé, un pique-nique au bord de l’océan. Mais toujours le bonheur à être ensemble, proches et unis, un bonheur tissant des liens entre eux doux et rassurants.
Jusqu’au jour où un évènement tragique vient mettre à mal le bel équilibre familial, un cataclysme intime qui vient saper les fondements de cette famille que l’on suivra sur une vingtaine d’années.
Chronique à trois voix d’une famille endeuillée, la narration nous plonge au plus près des pensées de chacun de ses membres, de leurs pensées les plus profondes, les plus intimes, les plus inavouables aussi. Tout le monde pense être fautif. Des êtres brisés qui se demandent comment se reconstruire ? Comment continuer à vivre ? Comment continuer à faire famille quand on se sent amputé, de toute forme de bonheur ? Comment continuer à grandir et se projeter dans une vie heureuse quand on est écrasé par la culpabilité et la douleu ? Face au fardeau du chagrin, chacun réagi comme il peut. Chacun se replie sur ses questions, ses doutes.
Seul Beston est exclu de ce schéma de narration alternée et on en vient à espérer qu’il puisse faire l’objet d’un livre dédié tant il suit une trajectoire différente : il va finir par quitter cette ferme qui constitue pourtant un quasi huis-clos tout le long du récit.
C’est un roman d’ambiance, lent, qui raconte une routine, une famille, une ferme, et la façon dont on s’y aime… Le rythme du roman suit celui de la nature, et au fil des saisons le récit est traversé par les questions de la culpabilité, de l'acceptation et du pardon. On se prend d'un attachement très fort pour chacun d'eux, on a envie de les aider, de les consoler et on les suit avec une profonde empathie sur le lent chemin de la reconstruction.
Il y a eu un « Avant », et un « Pendant », parcelles du roman qui commencent par des versets bibliques. Il y aura un « Après » et un « Ici » où la foi sera remplacée par des vers de poésie. Quatre parties distinctes pour parler de cinq membres d’une famille, de leur alliance qui dérape peu à peu vers des sommes d’individualités, avant de retrouver l’unité familiale à nouveau.
Un récit intime et intimiste, un voyage intérieur où les douleurs des personnages deviennent celles du lecteur. Loin de juger les actes de chaque membre de cette famille, on ressent une profonde tendresse pour chacun d'entre eux et comprend cette culpabilité qui les étreint pour laisser place à la bienveillance, la bonté... Que de belles valeurs !
J’avais lu de grands éloges concernant ce roman, alors j’imaginais en ressortir bouleversée moi aussi. Pourtant, si le sujet du deuil et la construction du roman sont intéressants, l’écriture alanguissante et douloureuse m’a parfois apportée quelques longueurs à la lecture.
Il est beaucoup question de culpabilité et de ce que le deuil peut bouleverser au sein d’un foyer aimant. Le style est contemplatif, ce qui peut gratifier le récit de descriptions agréablement poétiques, en revanche, le manque cruel d’action finit par engendrer de la lourdeur. Mon intérêt a faibli peu à peu, même si le dénouement a pu susciter un léger regain. Je le déplore parce que j’aurai vraiment aimé être transportée par cette histoire familiale dont les liens, qui semblaient extrêmement solides, se retrouvent mis à à rude épreuve. La cause en est bien sûr compréhensible puisque dramatique, et je dois avouer que Meredith Hall a su dépeindre la justesse des sentiments noirs et l’impuissance des personnages face à la tragédie. Mais l’espoir qui a bien du mal à percer, chapitre après chapitre, m’a essoufflée.
Plus grands que le monde est un roman choral qui extirpe la profondeur des sentiments de Doris, la mère, de Dodie, la fille et de Tup, le père, les autres personnages étant contés à travers les narrations des précédents. Tour à tour et sur une période s’étalant sur une vingtaine d’années, ils nous laissent devenir les témoins de leur amour, de la grâce qui les baigne alors, mais également de l’effondrement de leurs fondations qui déconstruit par conséquent tout ce à quoi ils aspiraient, tout ce qu’ils avaient pu imaginer pour leur famille. L’environnement prend une place très importante dans le roman, ce qui inclue le travail à la ferme qui peut s’avérer très difficile et sans concession. Certains évènements m’ont d’ailleurs brisé le cœur mais constituent la dure réalité de cette vie rude à la campagne.
Sur une majeure partie du récit, j’ai eu le sentiment que l’amour véritable qu’ils se portaient avant le drame ne tenait désormais plus qu’à un fil. Il n’est pas question de détestation mais plutôt d’une lente agonie intérieure que l’on espère toujours se terminer (en revanche, tous les personnages ne sont pas égaux face à cette douleur et il reste intéressant de constater les divergences de comportement et de points de vue au fil des années qui s’écoulent). Du reste, le dernier quart apporte davantage de lumière, ce qui est fort appréciable.
En bref, c’est un roman qui réussit à mettre en exergue la grande complexité du deuil et de ses conséquences sur l’amour au sein des membres de cette famille. La culpabilité transpire du texte et ne laisse que très peu de place à la résilience et à l’acceptation. Je regrette que l’écriture soit si lancinante, un peu de vigueur aurait apporté du rythme et davantage de fluidité. C’est donc une lecture mitigée me concernant, mais peut-être faites-vous ou ferez-vous partie de ces lecteurs qui ont été ou serez subjugués ?
Sur mon blog : https://ducalmelucette.wordpress.com/2024/04/10/lecture-plus-grands-que-le-monde-de-meredith-hall/
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