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Au fond de la mer, la vie est légère de Lucrezia Lerro, traduit de l’italien par Murielle Hervé-Morier, Éditions L’Écharpe d’Iris, 2024
Une autrice et poétesse italienne dont c’est, seulement, le 3ème livre traduit en français.
À 44 ans, Piero est en souffrance, il rêve à une vie plus légère où il serait moins seul, davantage considéré… Il nous livre son mal-être dans un monologue à la 1ère personne, se met à nu, mêlant des souvenirs d’enfance, ses aspirations, son quotidien… Il ambitionne un départ impossible de ce « bled », un village du sud de l’Italie où « les milanais de Milan » viennent en touristes, où les habitants se moquent de lui, le surnomment « Repacho », le disjoncté qui parle bizarrement.
Délaissé par son père militaire, violenté par sa mère, il est aujourd’hui marié à une femme avec laquelle il n’est pas heureux ; les disputes sont continuelles. Inapte au travail à cause d’un handicap qui n’est pas nommé, il aimerait cependant développer une activité valorisante et lucrative.
Piero oscille entre résilience et rancœur. Tantôt il injurie ses géniteurs, tantôt il pardonne. Il apostrophe aussi le prêtre de la paroisse, seule personne qui semble parfois interagir avec lui, pleure l’absence de son frère Santino, décédé tragiquement.
Pour se venger du prêtre et des villageois, il prémédite une étrange vengeance : voler la crèche de Noël ! Il est une métaphore à lui tout seul, « grand dehors et petit dedans », traumatisé, complexé, en désir d’ailleurs, de fuite vers le nord de l’Italie, vu comme un Eldorado.
Le discours s’éternise, se répète autour des mêmes obsessions. Au début, je me suis dit que j’allais avoir du mal… Et puis, Piero m’a embarquée dans la diversité de ses registres ; il a réussi à me toucher à défaut de m’émouvoir vraiment. Sa manière désuète et anachronique de ponctuer son propos d’un juron moyenâgeux, « crédiou ! », me faisait sourire. « Le désordre dans [sa] tête » n’est pas aisé à mettre en mots mais son mal-être transparait de manière épidermique, brute, non hiérarchisée. La manière dont il a été abusé, enfant, émerge comme un cri, comme un vomissement.
Heureusement, la durée du roman est adaptée au risque de saturation, une centaine de pages dans la version brochée.
Une tragi-comédie intéressante.
Merci aux éditions de l’écharpe d’Iris pour leur confiance.
Une lecture pas facile et qui fait réfléchir. On est face à une telle impuissance face à cette maladie : la boulimie. C’est vraiment bien retranscrit dans ce livre. Je n’ose imaginer la souffrance que cela doit être pour une mère de voir son enfant souffrir. La difficulté et la culpabilité qu’elle a dû ressentir en lisant les mots de sa fille dans son journal intime…
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Malgré l’envie de s’en sortir, la maladie est plus forte que tout, ça doit vraiment être compliqué à vivre au quotidien, autant pour la personne qui en souffre que pour l’entourage.
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On a qu’une seule envie, c’est de l’aider, mais comment ?
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Léger spoil attention, j’aurais aimé qu’on sache vers la fin si elle arrive à s’en sortir ou pas, en savoir un peu plus sur son évolution.
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En tout cas, malgré l'atrocité du sujet, c’est un livre que j’ai beaucoup aimé.
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