Caraïbes, 1492. "Ce sont ceux qui ont posé le pied sur ces terres qui ont amené la barbarie, la torture, la cruauté, la destruction des lieux, la mort..."
Nous sommes au début du XXe siècle, sur un bateau qui emmène des femmes japonaises de tout âge vers leurs futurs époux, aux Etats-Unis.
Nous découvrons en même temps qu'elles les vrais visages de leur nouveaux maris. De leurs mariages arrangés à leurs derniers exils, en passant par leurs travaux laborieux, parfois dégradants ; leurs maternités risquées ; les naissances et morts qui jalonnent les quotidiens ; les enfants de l'exil qui grandissent... Toutes les étapes de leurs vies après la traversée sont évoquées ici, par une sorte de chœur représenté par un "nous" rassemblant les dissemblances.
Julie Otsuka s'attarde sur cet épisode peu glorieux de l'Histoire internationale en utilisant presque exclusivement la troisième personne du pluriel, et souvent le conditionnel futur, rempli d'espoirs flous et déçus. Ce n'est pas un roman choral, même si l'histoire est racontée par un chœur aux voix multiples, aux expériences diverses et aux espoirs contradictoires.
C'est aussi un roman à liste (dans le même esprit que son roman plus récent : Ligne de nage). L'énumération des différents vécus de ces femmes n'ayant qu'un point commun : avoir fait ensemble cette traversée en bateau vers l'Amérique.
Le style est travaillé, la construction semble simple mais l'utilisation du "nous" et les énumérations lancinantes en font une lecture exigeante.
Le roman ne se déroule pas au Japon mais en Amérique, et pourtant, la culture nippone y est omniprésente. Il est aussi beaucoup questions d'émigration, immigration, de racisme, de déracinement et de génération...
Alors que leurs parents subissent le manque cruel de leur pays d'origine et l'absence d'acculturation, les enfants tentent de s'intégrer mais ils sont confrontés au racisme des populations blanches face aux "personnes de couleur". Si certaines d'entre elles n'avaient jamais vu la mer, nous réalisons que leurs enfants ne verront jamais le pays dont elles tirent leurs éducations, mais qu'ils ne seront jamais vraiment intégrés à leur pays de naissance. L'attaque de Pearl Harbor et le déclenchement de la guerre va finir de les mettre au ban de la société américaine blessée dans son orgueil...
Une piscine en sous-sol. Un groupe de nageurs et nageuses aux objectifs dissemblables. Parmi les lignes de nage : Alice. Une fissure dans le fond du bassin : catastrophe.
Un EHPAD. Une fille qui doit y laisser sa mère, qui perd la mémoire et la tête. Parmi les résidentes : Alice. Des blessures à l'âme, une fêlure au cerveau.
Une famille. Une histoire qui se délite, un naufrage inéluctable. Parmi ses membres : Alice. Des failles à n'en plus finir. Ou plutôt si, on voit venir la fin.
Et au milieu de tout cela : les regards désolés de nageureuses désœuvré.e.s, d'une fille impuissante et d'un père désarmé.
Voici un roman pour le moins déstabilisant, ce qui explique peut-être mon avis mitigé.
D'un côté, j'ai été séduite par le style et les thèmes principaux (à savoir la piscine, la perte de mémoire, le deuil inévitable) et, en même temps, le style a fini par me lasser, un peu comme les thèmes abordés.
Les sujets sont traités en profondeur, peut-être un peu trop... Cinquante pages sur la piscine et ses aficionados, ce n'est pas rien ! Même si j'adore nager - y compris en piscine municipale, de façon hebdomadaire, à horaire fixe, etc - j'étais contente de changer de décor (presque soulagée par la fissure). Sauf que le "changement de décor" est loin d'être gai : ne cherchez pas dans l'EHPAD Belavista de quoi remonter le moral... La dernière partie est encore plus triste car on y aborde les deuils successifs d'une vie.
Malgré la qualité du texte, du traitement des sujets et leur potentiel émotionnel, je n'ai pas été émue du tout. Au contraire, je suis restée très à distance de tous les lieux et personnages successifs. Autre source de déception : la présentation mentionnant "un camp pour Nippo-Américains", me faisait espérer plus d'éléments autour des relations Nippo-Américaines.
La construction est aussi originale que la narration. Le style est travaillé, surtout pour un "roman à listes", avec des phrases courtes, un vocabulaire précis, des redondances poétiques et des accroches percutantes. La construction n'est pas tout à fait chronologique, ni thématique finalement, plutôt placée sous le prisme du "décor" et des points de vue. L'autrice place la narration sous différents pronoms personnels : Nous, puis Elle, puis Tu et Vous. Ces aspects pourraient en faire une lecture exigeante, et c'est un peu le cas, mais le roman se lit très rapidement (moins de 120p). Cependant, je n'aurai pas pu le lire d'une traite sans respirations dans d'autres livres, car j'aurai frôlé la noyade...
Roman découvert lors de la rentrée littéraire 2022 où l'autrice explore la fin de vie, a travers les fissures d'une piscine et l'esprit d'une veille femme. La perte de la mémoire, la mélancolie, une histoire poignante mais aussi heureuse. Souvenir, perte d'un enfant, guerre mondiale, camp une litanie dans une langue métaphorique saturée de vitalité. Une lente de désintégration.
""Elle ne regarde plus par la fenêtre. Elle ne demande plus après ton père. Elle ne demande plus quand elle va rentrer chez elle. Parfois, des jours entiers passent sans qu'elle prononce un mot. D'autres jours, tout ce qu'elle dit, c'est "oui".
- Tu te sens bien ?
- Oui.
- Les nouveaux médicaments sont efficaces ?
- Oui.
- Tu as mal ?
- Oui.
- Tu aimes cet endroit ?
- Oui.
- Tu te sens seule ?
- Oui.
- Tu rêves toujours de ta mère ?
- Oui.
- Mon chemisier me serre-t-il trop ?
- Oui.
- Si tu avais quelque chose à me dire, ce serait quoi ?
Silence."
" Elle paraît calme, peut-être sous tranquillisants. Mais dès qu’elle te voit elle est tellement émue qu’elle est au bord des larmes. " Tu es venue me voir ! "dit-elle . Puis baissant la voix : " c’est tellement gênant. Je suis si impatiente de monter dans la voiture pour rentrer à la maison. " “
Récit historique sur des femmes japonaises vendues sur photo à des Américains au début du XXeme siècle.
La traversée entre le Japon et San Francisco est joyeuse, elles pensent se marier avec des banquiers voir des hommes d’affaires mais elles ne trouveront pour la plupart que des hommes rustres voir violents et peu aimants.
Et ensuite ce sont leurs enfants qui subiront les moqueries racistes et l’isolement.
La vie est difficile quand on a pas le choix et quand on a tout laisse derrière soi : famille, souvenirs,…
C’est un livre aux phrases courtes avec un style de narration qui m’a surpris car tout est écrit en « nous », cela apporte une proximité avec ce groupe de femmes.
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Caraïbes, 1492. "Ce sont ceux qui ont posé le pied sur ces terres qui ont amené la barbarie, la torture, la cruauté, la destruction des lieux, la mort..."
Chacune des deux demeures dont il sera question est représentée dans le sablier et le lecteur sait d'entrée de jeu qu'il faudra retourner le livre pour découvrir la vérité. Pour comprendre l'enquête menée en 1939, on a besoin de se référer aux indices présents dans la première histoire... un véritable puzzle, d'un incroyable tour de force
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