"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Le roman d’Aurélie Jeannin est la rencontre entre deux personnages contraints. Il y a Flo d’un côté qui est épuisée par son quotidien et veut changer de vie. Elle ne met pas de grands mots là-dessus. Comme tout animal – le roman ne cesse de nous rappeler que l’Homme est un animal comme les autres -, elle fuit une situation insupportable. L’autrice s’étend peu là-dessus pour se concentrer sur l’immédiateté des situations. Flo rencontre Daguet qui s’occupe d’un chenil entraîné pour la chasse à courre. Lui est sorti de son milieu social et atteint des sommets de responsabilité, côtoyant un univers qu’il pensait inatteignable. Flo est perdue quand Daguet est soumis à la pression de son ascension.
On suit d’abord les deux parcours en parallèle, percevant ici et là des points communs entre les deux personnages. Mais il y a également des fractures, intimes et environnementales, entre les deux. Cela n’annonce donc pas une histoire d’amour mais plutôt de compréhension. Flo et Daguet vont s’écouter et ressentir une solidarité entre eux. Aurélie Jeannin s’intéresse à la connexion entre les êtres qu’il s’agisse d’êtres humains ou d’animaux. Il y a de l’écoute, de l’humanité, du respect dans ce livre. Mais également une profonde violence. Elle est sociale, sexuelle et genrée. Aurélie Jeannin observe deux personnages tentant de trouver de l’air et du réconfort dans leur vie. L’une cherche, l’autre pense avoir trouvé. Les personnages les entourant sont enfermés dans leur certitude, dans leurs préjugés. Flo et Daguet tentent de sortir de cela.
Le roman, par son montage alterné, est rythmé et l’autrice prend le temps d’installer les scènes cruciales dans des décors bien détaillés. Le mobil home, la chasse, le bar. On y est et on sent les confrontations entre les personnages. Et ponctuellement, des phrases savamment élaborées pointent les failles des êtres, leur chute personnelle face à des tragédies plus grandes qu’eux. Par ces petites touches, la mort reste dans l’ombre.
Après 'préférer l'hiver', nouvelle tentative pour Aurélie Jeannin. Cette fois, l'histoire est nettement plus limpide mais le style moins percutant. Les angoisses de cette mère handicapée par la non reconnaissance des visages de ses propres enfants prennent le pas sur toute vie possible. ça monte au cours du roman, ça se répète même un peu trop et on sait que cela finira mal.
Un roman magnifiquement écrit, mais je n'ai pas compris où l'auteure voulait nous mener. La mère & la fille ont quitté la société, chacune après le deuil d'un enfant. C'est beau et très émouvant, mais cela manque de simplicité dans l'histoire. Une grande déception pour moi.
Comme tous les ans en juin, les Bordes se réunissent à la ferme familiale du même nom, pour un pique-nique en bord de lac. Avec son mari et ses deux jeunes enfants, Brune, la narratrice, y retrouve son beau-frère et les siens, mais surtout ses beaux-parents qui la détestent. Le week-end est donc pour elle une épreuve, qu’elle redoute d’autant plus que, mère anxieuse et sur-protectrice, elle envisage la ferme et ce coin de campagne comme des lieux de tous les dangers, souvenirs obligent...
Si le monologue de Brune est l’occasion d’abattre, avec une bonne dose de vérité dérangeante, tous les clichés de la maternité heureuse, l’on ne tarde guère à trouver cette mère au bord de la rupture un rien exaspérante dans l’excès de ses alarmes, son obsession de la perfection et ses crises émotionnelles qui sapent d’ailleurs définitivement son autorité. C’est que, chez Brune, la maternité est le révélateur de failles profondes, l’explosif qui fait sauter les couches de protection dont elle était parvenue à s’envelopper dans un semblant d’équilibre. La charge d’âmes renvoie brutalement à la figure de la jeune femme son manque de confiance en elle et ses angoisses, laissant à nu une vulnérabilité dont le lecteur s’irrite avant d’en comprendre la raison, enracinée aux Bordes depuis le temps de l’enfance.
Décortiqués en profondeur dans leur psychologie, les personnages nous sont livrés dans leur vérité brute, révélant sans fard la violence sous-jacente qui peut empoisonner les relations familiales, au gré de drames et de blessures jamais cicatrisées, surinfectées par les non-dits où couvent chagrin, amertume et colère. Imparable parce qu’enfermée dans le huis clos de l’intimité, la méchanceté y atteint d’autant plus facilement des paroxysmes, que chacun se pense victime, cherche un coupable à sa souffrance, et qu’un enfant facilement culpabilisable fait un parfait bouc-émissaire. D’abord agacé par ce qui paraît à première vue de pusillanimité chez Brune, le lecteur sombre peu à peu avec elle dans l’ambiance délétère des Bordes, bientôt convaincu que le pire reste à venir. Et c’est désormais la même prescience du danger qu’il partage avec la jeune mère.
Aucun de ses personnages n’échappe à l’impitoyable scrutation d’Aurélie Jeannin. Tous éclairés sans concession dans leurs peurs, leurs frustrations et leurs manipulations affectives, ils dessinent un tableau accablant de noirceur, indéniablement convaincant, de la nature humaine dans ce qu’elle a de plus intime : la sphère familiale, lieu de tous les amours et de toutes les haines.
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