"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Lucide, tiré au cordeau dans une droiture extrême, ce récit journalistique dévoile un fait divers , un infanticide. Celui de Vivienne Kassoka qui a assassiné sa petite fille de quinze mois.
la trame toute de rectitude, sans partie pris est une mise en abîme de la personnalité de la mère, intellectuelle, mais socialement en dérive, sous le poids de ses mensonges et de ses chimères. Mythomane, mariée à un homme Emmanuel, beaucoup plus âgé, épris de cette dernière et qui ne connaît pas au fond véritablement sa femme. Il a un bandeau devant les yeux.
Elle a accouché seule dans un coin de la maison, dans une piscine gonflable pour enfants. Elle dit préparer une thèse sur Machiavel (tiens tiens) . Elle semble effacée, sans histoire aucune côté ville. Quasi inaperçue aux yeux de la société et de ses propres voisins. Mais voilà, elle s'imagine envoûtée. Elle dépense énormément d'argent dans des voyantes, des gourous et des malhonnêtes. Sa foi est ici dans les torpeurs de son pays d'origine le Sénégal. Paranoïaque, elle se pense en proie aux maléfices. Des femmes jalouses depuis le Sénégal lui auraient jeté un sort. Sa fillette nourrie au sein, choyée, va payer le prix fort des croyances de sa mère. Comment cette femme éclairée peut-elle ainsi prendre foi aux superstitions? Crescendo, elle va monter un scénario implacable, dans une froideur et une maîtrise hors norme et glaçante. Elle dit à Emmanuel qu'elle part au Sénégal, emmener l'enfant voir sa famille. Ce qui sera faux. Elle prend deux billets mais pour rejoindre un hôtel , celui de Berck dans le Nord-Pas-de-Calais. entre vagues et marées, elle va déposer l'enfant, coquille endormie à jamais. La mer a avalé sa fille.
Isabelle Stibbe est douée. Précise, juste, elle ne sort pas du cadre et ne juge pas. Les lignes sont le tribunal des intériorités, elle cherche à comprendre et analyse les faits avec justesse. Et les questionnements sur cette mère tueuse au sang froid propulsent une trame dévorante et parfois dérangeante car réelle.
Le tribunal peut-il en France accorder du crédit aux paroles de cette mère.? Un joker à cette femme se croyant démoniaque et envoûtée?
Ce livre est utile car il reste dans la prononciation des réalités. Le lecteur (trice) devient le juge de cette mère Vivienne Kassoka sénégalaise, envers et contre tout. Brillant. un livre fort et percutant. Publié par les Éditions Le Cherche Midi éditeur.
Tout d'abord un grand merci aux éditions du Cherche-Midi et à Lecteurs.com pour m'avoir permis de lire ce livre.
Un roman court, tiré d'un fait divers assez récent et glaçant., une écriture percutante, des phrases courtes sur un sujet difficile : l'assassinat d'une très petite fille de 15 mois.
En tant que mère et grand-mère, en amour pour ses petits, j'ai souvent frissonné, j'ai eu des moments de dégoût et une forte envie de laisser tomber cette lecture poignante.
Ce roman, bien qu'écrit avec brio et presque journalistique, m'a laissé un grand sentiment de colère, d'ecoeurement envers cette femme qui ne peut être appelée mère
Ce court livre ne compte qu’un peu plus de 150 pages, mais au niveau des émotions, c’est à la fois fort et puissant. Traitant comme principal sujet un infanticide, Isabelle Stibbe, s’inspire d’un fait divers réel de 2013. Elle apprivoise un choc des cultures entre la France et le Sénégal, qui même s’il n’explique pas le geste maternel, n’en reste pas moins un des facteurs essentiels dans le drame.
Vivienne Kassoka est une jeune fille issue de la bourgeoisie de Dakar. Elle arrive en France en vue de poursuivre ses études et sa thèse. Pourtant, elle y fait la rencontre d’Emmanuel, sculpteur beaucoup plus âgé qu’elle et ils se mettent en couple. Aurore sera le fruit de cette union. Alors que cette famille aurait tout pour vivre un parfait bonheur, Vivienne réserve un jour deux tickets de train pour se rendre à Berck où elle commettra l’irréparable.
Tout comme la couverture l’illustre si bien, ce livre est celui de l’ambivalence entre deux contrées, entre deux cultures, entre deux mondes à appréhender, avec ses us et coutumes si différents et pourtant si importants à comprendre. Les traditions sont ancrées en nous, qu’on le veuille ou non, qu’on reste dans son pays natal ou qu’on s’exile à l’autre bout du monde. Alors que pour nous occidentaux, une part non négligeable du vécu de Vivienne pourrait être considéré comme irrationnel, cette complexité n’est pas omise du récit.
Ce roman glaçant n’est pas là pour justifier le geste sordide mais apporte, petit à petit, des fragments de la vie de cette mère dont l’ancrage du folklore a pris le pas sur sa vie française et sa parfaite intégration. Les bribes d’informations se découvrent timidement dans le comportement de cette mère ainsi que dans celui de son entourage. Les faux-semblants de cette spirale destructrice entourant ce drame ne se révèleront qu’au cours du procès et saisiront effroyablement le lecteur.
Isabelle Stibbe en tire un roman poignant et troublant. Avec un brin de poésie, le côté purement sordide est mis de côté pour se concentrer sur la psychologie des protagonistes.
Vous ne pourrez-vous empêcher de vous rappeler la voix suave de Nina Simone sur cette chanson « I put a spell on you », éponyme au livre. Ici vous en découvrirez plutôt la version originale de 1956 de Screamin’ Jay Hawkins que vous entendrez résonner au fil de pages, jusqu’au final révélant bien des secrets.
“A spell on you” est un livre assez troublant. Vous avez sans doute entendu parler de ce fait divers affreux qui s’est produit il y a quelques années. Tout le livre est construit dans l’attente de ce dénouement tragique. Le lecteur va ainsi parcourir les pages à la recherche de bribes d’explications de ce qui demeure finalement hautement inexplicable. Il découvre cette jeune femme à laquelle il va forcément éprouver des difficultés à s’attacher, prise entre la naissance d’un bébé, la rédaction d’une thèse et un compagnon aimant mais finalement assez effacé. Petit à petit, les indices inquiétants sur sa personnalité et sa vision des évènements vont émerger et s’accumuler, dépassant le strict cadre de la dépression d’après naissance pour entrer dans un cadre plus irrationnel de notre point de vue occidental, fait d’envoutement et de mauvais sort. Jusqu’à ce dernier voyage qui fait éclater les faux semblants sur lesquels étaient construits la vie de Vivienne, mais aussi « A spell on you ». Et le lecteur de s’interroger, en même temps que le juge lors de son procès, sur cette jeune femme à la croisée de deux cultures sénégalaises et françaises, éduquée et bien intégrée, qui va petit à petit se persuader qu’elle est victime d’un envoutement et qu’elle a perdu tout son libre arbitre, incapable d’expliquer son geste tragique.
Un texte fort et troublant.
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