D’abord, on découvre ce très bel objet qu’est ce dernier roman d’Isabelle Duquesnoy, tant attendu : une couverture magnifique, un titre en surimpression, une photographie attrayante et à-propos. Tout de suite on a envie de se jeter dans ce roman historique.
Dès la première phrase nous voilà...
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D’abord, on découvre ce très bel objet qu’est ce dernier roman d’Isabelle Duquesnoy, tant attendu : une couverture magnifique, un titre en surimpression, une photographie attrayante et à-propos. Tout de suite on a envie de se jeter dans ce roman historique.
Dès la première phrase nous voilà plonger au cœur du XVIIIe siècle, à la veille de la révolution française, pour quelques heures bénies de lecture. C’est la grande force et le génie d’Isabelle Duquesnoy qui nous délecte avec « L’Oiseleuse de la Reine », le 1er d’une série qui j’espère sera longue.
Comme à son habitude, c’est truculent, érudit, savoureux, captivant, caustique, vivant, écrit avec style et panache, avec une fausse simplicité. Les personnages sont attachants, richement croqués avec moults adjectifs et détails qui font paraître aussi vrais leurs défauts que leurs qualités. C’est une autrice hors pair qui nous régale de romans historiques basés sur la réalité de faits avérés traités avec un humour décapant, parfois féroce mais toujours juste. Elle frôle l’intime, pénètre le vécu de ses personnages, interprète les actions, les pensées, l’interaction entre les individus des différentes classes sociales de l’époque, et c’est très intéressant.
A lire Isabelle Duquesnoy, on s’instruit sur les siècles passés, le mode de vie des gens, les pauvres comme les riches, les serviteurs comme les maîtres, les nobles comme les domestiques. Chacun fait ce qu’il peut pour survivre, tenir son rang ou faire en sorte d’escalader l’échelle sociale. L’autrice maitrise parfaitement ce XVIIIe siècle, la préséance des titres de noblesse autant que la hiérarchie sociale des gens de maison, le langage parlé et écrit, les décors et paysages, les mœurs et coutumes. Elle nous fait profiter de ses connaissances en utilisant les mots et phrases appropriés, donnant souvent la définition ou l’explication en bas de page, parfois avec humour, pour notre plus grand bonheur.
Dans « L’Oiseleuse de la Reine », elle met en scène Liselotte Lussan, orpheline, contrainte (par son frère Jacques) au mariage avec le riche baron Casimir Cadet de Beaupré, un vieillard affreux, rebutant, nauséabond, dégoutant dont elle aura à subir les propos humiliants, les excentricités, Lara son perroquet géant et chieur, et les assauts matinaux dans l’objectif de faire un héritier. Les descriptions des coucheries sont drôlissimes, de même que les différents « tableaux » comme le bal costumé, la paralysie de Casimir, son déclin physique et langagier, le veuvage, la confession au curé, les lettres reçues et envoyées. …Les dialogues humoristiques ne sont pas en restent, un vrai délice. Elle distille à foison les us et coutumes de l’époque, les répartissant sur les divers personnages selon les situations. On apprend ainsi par exemple la misérable condition des fillettes laissées à l’orphelinat, de la façon de s’habiller et de manger dans les cuisines et dans les maisons nobles, des impôts qui sévirent à cette époque-là, et bien sûr de l’élevage d’oiseaux, de même que l’ambiance générale de la France, la colère du peuple qui a faim, et le début de la révolution. On y trouve également un coté exotique avec Narong fils d’une amie de Sophie d’Aubigny, qui débarque dans le domaine Beaupré de son Siam natal, avec sa zénitude, ses croyances et l’application des notions fondamentales du bouddhisme. Tous les ingrédients sont présents pour faire un bon roman. Et on se régale, incapable de lâcher le livre.
Ce premier opus se divise en trois parties : au début le mariage de Liselotte et Casimir jusqu’à la mort de celui-ci, en 2e partie la baronne Cadet de Beaupré se découvre miséreuse et ruinée, mais grâce à son amie la marquise Sophie d’Aubigny, amie d’enfance de Casimir, deviendra fortuitement l’Oiseleuse de la Reine, ce qui engendrera la renaissance du domaine de Beaupré. Quant - à la 3e partie, elle confirmera le nouveau statut de Liselotte, mais dans le contexte d’une France ravagée par la famine, le peuple grondant, son affaire florissante va à vau-l’eau. Parviendra-t-elle à sauvegarder son nouveau paradis ?
Je ne sais pas si elle s’amuse en écrivant, mais nous lecteur nous amusons beaucoup à la lire, et à apprendre de sa plume. Il faut lire Isabelle Duquesnoy, c’est un phénomène littéraire, avec une écriture fluide, un humour ravageur. Elle nous fascine et nous passionne avec l’histoire qu’elle sait si bien racontée, car c’est une conteuse née, c’est indéniable. Ses livres se déroulent comme une succession de plans, on se croirait dans un film cinématographique, et c’est génial.
J’attends déjà la suite avec impatience.