Une sublime adaptation qui donne une nouvelle dimension au chef-d’œuvre de l’écrivain britannique
Une sublime adaptation qui donne une nouvelle dimension au chef-d’œuvre de l’écrivain britannique
J'étais curieuse de retrouver Orwell sous un format différent, voir la gueule qu'aurait ce roman graphique.
Cette BD était attendue dans le monde entier, elle est sortie en septembre 2020.
Le texte de 1948 étant tombé dans le domaine public, il en existe maintenant moult versions.
Bon, je ne vais pas vous retoquer l'histoire de 1984, c'est tout de même un grand classique de la littérature dystopique (si tu ne l'as pas encore lu, à mon sens il faudrait déjà commencer par là), c'est un de mes livres de référence !
En plus j'ai prévu de lire à sa suite Verax de Pratap Chatterjee qui parle justement de surveillance de masse… On est plus très loin d'Orwell aujourd'hui, Big Brother c'est maintenant !
Le roman très sombre retrouve ici son ambiance complètement déprimante, il faut bien le dire (si tu es adepte de romans feel-good, passe ton chemin…), l'illustrateur joue donc avec une palette de couleurs réduite (gris, rouge, noir).
L'oppression est vraiment palpable, la prise de conscience, l'embrigadement psychologique, l'anéantissement de tout sentiment de révolte, l'abrutissement par le travail… Tout est là !
Il ne faut pas oublier qu'en 2018, Bolsonaro est arrivé à la présidence du Brésil, Fido Nesti étant brésilien, il a sans doute voulu aussi nous parler en filigrane de cette actualité qui le concerne plus intimement…
Big Brother est de retour avec le talent de Fido Nesti
J’avais envie de relire 1984 mais sous un autre format et j’avoue que j’aime que la BD s’empare de ces classiques.
Plusieurs adaptations sont à notre disposition, j’ai choisi celle de Fido Nesti, le choix du gris et rouge avec leurs nuances de dégradés m’a séduite et j’ai trouvé qu’elle renforçait cette sensation d’oppression. La lecture m’a fait prendre conscience que l’auteur est non seulement investi mais aussi, me semble-t-il, obsédé par l’actualité de cette dystopie.
Big Brother is watching
Winston Smith, 39 ans, est un maillon de la censure du ministère de la Vérité. Son rôle réécrire l’histoire pour qu’elle colle au présent. Il remanie les archives, son travail est bien détaillé :
« Quelques lignes et un photomaton suffiront pour lui donner vie sans plus tarder. »
Seules distractions dans cette vie grise, est le spectacle mensuel des pendaisons.
Ainsi le 4/04/84 Winston décide d’écrire un journal pour rétablir la Vérité, il y joue sa vie, la peur au ventre.
Très vite il s’aperçoit qu’il a perdu sa capacité à transcrire, à dire. A-t-il perdu la faculté de penser ?
Comme dans le roman, me lecteur s’interrogera sur la novlangue et s’apercevra que la manipulation du langage, des images, l’instauration d’un état d’urgence ont une signification particulière.
Les gens en poste, le sont par leur capacité à renforcer le pouvoir par l’obéissance aveugle sans faillir.
Dans cette version graphique j’ai trouvé qu’inclure beaucoup de texte renforçait ce sentiment invasif s’oppression. C’est à la fois troublant, inquiétant et hypnotisant.
Découpé en trois partie, la première installe la suspicion dans laquelle vit Winston et sa prise de conscience qu’il lui manque quelque chose : les sentiments.
La deuxième partie, l’amour retrouvé. Contactés par un certain O’Brien qui leur remettra une copie du livre de Cassandre.
Cet O’Brien les avertit qu’ils ont peu de chance d’échapper à la Police de la Pensée.
Troisième partie, le piège se referme. Arrestation torture et lavage de cerveau.
Fido Nesti retranscrit cette escalade avec une grande maîtrise.
L’ensemble est remarquable car la force du dessin est à la hauteur du texte et de sa puissance.
Orwell ce visionnaire n’est pas mort :
« Nous détruisons des mots par dizaines, par centaines, tous les jours. Nous dégraissons la langue jusqu’à l’os.
Ne vois-tu pas que le néoparler est de rétrécir le champ de la pensée ? »
CQFD
©Chantal Lafon
Merci lecteurs.com pour m'avoir fait gagné ce roman graphique !
J'ai pu m'enthousiasmer en tournant frénétiquement les pages de cette sublime adaptation du chef d'oeuvre d'Orwell. Fido Nesti a réussi à donner corps et vie à ce texte mythique ; illustrant avec merveille les sentiments, les émotions et la tension continue.
Les tourments, les violences, les tensions sont retranscris par des traits secs et précis, une palette de couleurs restreinte.
Rien ne sert de rentrer plus en détails, cet album est une incontestable réussite.
Si « 1984 » a plusieurs fois été l'objet d'adaptations cinématographiques et théâtrales, l'œuvre n'avait jamais été adaptée en roman graphique ; c’est désormais chose faite avec ce volumineux album de Fido Nesti sorti chez Grasset début novembre 2020, quelques semaines après la parution des œuvres complètes de George Orwell dans « La Pléiade », qui coiffait au poteau trois autres adaptations parues début janvier.
Il paraissait dans un climat très étrange, en pleine pandémie, quand le président de la plus grande démocratie mondiale refusait de céder sa place et clamait haut et fort qu’il ne fallait pas croire ce qu’on voyait et ce que l’on entendait ; il avait pour dessinateur, un homme qui doit subir tous les jours le régime populiste de Bolsonaro … Alors oui, forcément, on s’attendait à des parallèles dressés entre le roman et notre société.
Il n’en est rien.
Fido Nesti fait preuve d’une fidélité totale à l’œuvre source. La couverture, reprend les couleurs de celle de la première édition du roman : beige, gris et rouge dans une esthétique proche du courant futuriste. Il conserve la division en trois parties du roman et ses 24 chapitres. Le livre de Goldstein est repris in extenso ainsi que l’appendice sur le « novlangue » ou plutôt « néoparler » dans la traduction de Josée Kamoun qui a été choisie. Cette dernière a d’ailleurs prêté son concours à l’exercice d’ajustement des textes figurant dans les phylactères et les récitatifs . Le dessinateur a en effet gardé près de 40 % du manuscrit initial (400 pages dans la version poche), ce qui est énorme au regard des contraintes narratives propres à la bande dessinée. Et ceci constitue pour moi la limite principale de cet album : il est bavard, bien trop bavard.
Certains passages sont laissés en langue anglaise ce qui souligne à la fois la fidélité à l’œuvre originelle mais également l’impossible émancipation du dessinateur. L’avalanche de texte noie le lecteur surtout dans les trente premières pages. On a l’impression que le dessin « rétréci » par l’ampleur des cadres de récitatifs peine à s’imposer ; les planches en deviennent suffocantes et l’adaptation semble finalement une illustration bien sage et ordonnée dans un gaufrier classique …
Et puis, l’on se dit que cela permet tout de même de mettre en avant l’importance de la parole. Nesti joue des codes graphiques. Les appendices qui relient les phylactères aux personnages sont ondulés, sinueux, comme des serpents ou des jets de fumée : ils matérialisent finalement dans leur étrange forme tout le pouvoir nocif de la parole. De même on quitte enfin le gaufrier classique pour des angles de prise de vue et des plans variés. Le protagoniste – Winston – est vu en plan rapproché puis en demi ensemble ; en plongée puis en contre plongée, comme si l’on voulait nous faire sentir qu’il est sans cesse examiné, espionné et redonner ainsi toute sa portée à la célèbre phrase « Big brother is watching you ». L’auteur multiplie les gros plans sur les bottes des tortionnaires comme pour nous montrer la chappe de plomb qui pèse sur le héros ; parfois les personnages débordent sur les bordures sortant ainsi du cadre au propre comme au figuré.
Peu à peu, l’auteur déploie sa palette même s’il ne fonctionne qu’avec les trois couleurs présentes dès la couverture. On passe de planches monochromes rendant le climat morose d’Océania (Londres) et ses paysages de béton et de ruines à d’autres où les nuances se mêlent. Le rouge prend de plus en plus de place quand la violence et la colère sont prégnantes ; quand apparaissent les moments de bonheur avec Julia, le rouge s’adoucit et devient rose pâle. Fido Nesti choisit aussi à dessein d’enlaidir ses personnages : ils sont tous semblables, sans âge, ternes, aux petits yeux rétrécis comme pour montrer que l’élan vital les a quittés.
C’est un ouvrage qui permettra de se remémorer le roman pour ceux qui l’ont lu et de s’en faire une bonne idée pour ceux qui ne le connaissaient pas ; C’est d’ores et déjà un succès de librairie ( 4000 exemplaires vendus en moins de deux mois) mais personnellement je préfère la version de Xavier Coste qui est moins une illustration redondante qu’une réinterprétation graphique magnifique du roman dystopique
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