"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
De notre monde emporté par Christian Astolfi, Lu par Guillaume Orsat, Multisonor, 2023 (1ère édition : le bruit du monde, 2022)
Comme tout le monde j’ai entendu parler du scandale de l’amiante, mais de loin, pas vraiment concernée dans mon entourage.
Un roman sur le quotidiens des ouvriers des Chantiers navals de La Seyne-sur-Mer du début des années 1970 à la fin des années 1980.
Le récit à la première personne de Narval, de sa jeunesse et de la construction de son identité ouvrière au sein d’équipes soudées, où chacun a sa spécialité, son surnom, sa personnalité.
Le récit d’une lutte à partir du moment où se répand le bruit de la fermeture des Chantiers pour des raisons économiques…
L’amour du travail bien fait même quand tout part en vrille…
L’histoire d’un couple aussi…
Et puis la maladie, déclarée longtemps après que l’amiante a empoisonné les corps…
Un titre à l’ancienne avec ce « de », un peu désuet, au sens de « au sujet de », comme pour annoncer un essai. Ici, il s’agit plutôt de marquer l’origine ; le narrateur nous parle d’une époque révolue, d’un monde oublié… Avec lui, j’ai revécu l’espoir avec l’arrivée de la gauche au pouvoir en 1981 et la lente mais inexorable désillusion depuis…
J’ai immédiatement été happée par cette écriture, magnifique, réaliste et lyrique, poétique et surtout immersive.
Un récit empreint de l’expérience de l’auteur qui a travaillé de nombreuses années à l’Arsenal maritime de Toulon.
Un livre audio porté par la voix de Guillaume Orsat, narrateur exceptionnel.
Christian Astolfi, une plume dont je souhaite vivement découvrir les autres livres.
#Denotremondeemporté #NetGalleyFrance #lesglosesdelapiratedespal
Christian Astolfi livre avec L’Œil de la perdrix un récit poignant sur la sororité. Un roman chaleureux, souvent tendre mais pudique, impressionnant de justesse qui raconte la vie de sa narratrice, à partir de sa rencontre avec une autre femme, qui a su lui tendre la main. Ce lien illumine la vie et bouleverse le quotidien de Rose, la Corse, exilée à Toulon entre les deux guerres, et Farida, l’Algérienne vivant dans son bidonville insalubre, situé en face de la maison de son amie, dans les années 50.
Deux femmes exilées qui apprennent à vivre, déracinées, soumises à l’ordre établi, patriarcal pour Rose, sociétale pour Farida, toutes deux analphabètes avec, en plus, cette langue française qui n’est pas leur langue maternelle. Elles vont se rencontrer, devenir complices, cheminer ensemble, s’aimer et se soutenir. Tout d’abord au coude à coude, puis côte à côte et pour finir de loin en loin.
Deux univers que tout pourrait opposer et pourtant c’est grâce à Farida que Rose va s’émanciper de toutes ses oppressions, comme dirait son ami Pierre. Dès les premières lignes, le ton humaniste et empathique de Christian Astolfi saisit directement le cœur de son lecteur (trice) par la narration d’un monde qui raconte ceux dont on ne raconte jamais rien. Ce récit relate simplement, sans fioriture, sans colère, enfermant ses silences jusqu’à la fin.
Une renaissance…
Rose vit dans sa maison, à s’occuper du quotidien de son mari. Les enfants sont partis. La vie s’est arrêtée. On comprend rapidement qu’il ne s’agit pas que du poids de sa naissance qui l’empêche, qu’il y a une autre blessure, encore plus invalidante. Seulement, pudiquement jusqu’à la fin, le lecteur ne sera pas voyeur de sa douleur.
De son univers qui ne semble n’être pas différent de celui de sa mère, Rose va conquérir peu à peu son émancipation et sa liberté. L’Œil de la perdrix est l’histoire de cette conquête, toute simple, cette révolution silencieuse et discrète, sans heurt ni violence, d’une femme qui reprend sa vie en main.
Ce bouleversement passe aussi par l’acquisition de la lecture, puis de l’écriture. Alors, le récit de Rose, narratrice, prend une autre dimension. Il quitte le domaine du privé pour gagner celui du monde et servir d’exemple. Car, la conquête de la liberté ne peut passer, semble rappeler Christian Astolfi, que par la liberté de savoir !
Pourtant, dans L’Œil de la perdrix aucune leçon n’est assénée. Christian Astolfi donne à voir, à penser, à s’interroger, à comparer et à se souvenir. Car, le combat de Rose ressemble beaucoup à celui d’autres femmes, du passé, mais aussi d’aujourd’hui.
L’Œil de la perdrix, tatoué sur un front de Farida, fait fuir le mauvais sort : un losange avec, à chaque extrémité, une petite croix. Mais la perdrix est aussi le signe de la beauté et la grâce. Avec ces deux qualificatifs, Christian Astolfi décrit cette amitié si essentielle pour aider à vivre. Il dresse une parfaite illustration de leur complicité, de leur amour, de leur joie à être ensemble et même de leur bonheur de se retrouver, ces deux sœurs de cœur.
…Au cœur de bouleversements politiques et sociétaux
En implantant son roman dans la France de la guerre d’indépendance de l’Algérie, Christian Astolfi montre un pays où les effets du colonialisme, avec sa grandeur imaginaire, sont encore extrêmement présents. Il décrit la montée du racisme avec les répressions de l’État et les ratonnades de la droite extrême.
Mais, c’est aussi la problématique de l’exil qu’il pose ainsi en toile de fond. Le mari de Rose quitte sa terre et ses moutons pour devenir tout le restant de sa vie, ouvrier soumis à l’usine. Farida avec ses enfants rejoint son mari, terrassier pour cette France des grands chantiers, pour fuir la misère.
L’Œil de la perdrix de Christian Astolfi, je l’ai lu presque d’une traite, embarquée dans son univers, l’émotion au bord du cœur, bouleversée par tant de justesse et de pudeur. Il évoque la vie d’une femme simplement courageuse et généreuse. Le portrait de nombreuses comme elles dont on ne parle que rarement en littérature. Je vous laisse le découvrir !
Chronique illustrée ici
https://vagabondageautourdesoi.com/2024/11/18/christian-astolfi-loeil-de-la-perdrix/
Rose, orpheline, née en 1903, a grandi dans un petit village de Corse. Elle devient mère à seize ans et, sur une décision de son mari, alors qu'ils ont déjà trois enfants, ils quittent la Corse pour Toulon. Il pense qu'ils auront une meilleure vie sur le continent.
En 1957, Rose rencontre Farida, née en Algérie. Farida vit dans le bidonville de Toulon avec sa famille.
Les deux femmes deviennent amies et toute leur existence va en être profondément bouleversée.
Au fil des chapitres, l'auteur donne la parole à deux femmes déracinées, deux femmes solidaires, deux femmes courageuses.
Rose va relever un véritable défi en apprenant à lire et à écrire. Les cours d'alphabétisation donnent un nouvel élan à la vie de Rose dont le mari est taciturne et taiseux.
Je me suis réjouie de voir Rose progressivement sortir de sa condition de femme au foyer pour s'émanciper, de la voir s'impliquer dans les cours d'alphabétisation.
Un très bon récit qui s'inscrit dans l'histoire de la guerre d'Algérie, une belle amitié entre des femmes très attachantes, un chemin semé d'embûches pour sortir de l'illettrisme et réussir enfin à s'émanciper.
Ce roman est lumineux.
L'œil de la perdrix raconte une amitié à la fois forte et unique entre deux femmes que le hasard a rapproché. Rose est française, corse d'origine, Farida est algérienne. L'auteur , Christian Astolfi nous narre leur vie rude de mère, de femme dans le Toulon des années 50. Bien sûr, leur histoire rejoint la grande histoire, celle de la guerre d'Algérie, de ses combats, de ses drames. Il y a beaucoup de pudeur dans ce récit. Christian Astolfi nous peint par petites touches les portraits de Rose et de Farida, leur combat aussi pour gagner une forme d'émancipation loin de la pauvreté, de l'illettrisme. Ce sont des vies simples prises dans le brouhaha de l'histoire et c'est aussi cela qui fait toute la beauté de ce roman.
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