"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Vues d’intérieur après destruction, Arielle Meyer MacLeod, Arléa
A la mort de Gabriel, l’ami de toujours, sur un coup de tête, l’autrice part à Beyrouth, à la recherche de la maison d’enfance de son ami. Puis, en rentrant à Paris, c’est à sa propre histoire qu’elle se confronte.
J’ai mis quelques pages à entrer dans ce court récit, mais bien m’a pris de persister, car je l’ai trouvé très fin, beau et profond. L’idée de mettre en parallèle la recherche de la maison de Gabriel avec le foyer dans lequel elle a vécu entre ses deux parents et son petit frère peut paraître étonnante, et pourtant, elle fonctionne parfaitement. C’est la mort de Gabriel et une lettre ancienne et un peu oubliée de son père qui déclenche chez l’autrice les questionnements.
Le titre fait référence à la maison éventrée, à Beyrouth qui après avoir subi la guerre, a vécu une terrible explosion en août 2020, mais aussi à l’introspection à laquelle se livre l’autrice après la mort de son ami.
Beaucoup de pudeur, de choses qui se devinent plus qu’elles ne sont dites. A travers son histoire qu’elle parvient à se remémorer, elle parle des liens amicaux, familiaux, des lieux de l’enfance qui nous la rappellent, auxquels on se raccroche. De l’intime qui tend vers l’universel.
Une maison au Liban
Dans ce court et bouleversant roman, Arielle Meyer MacLeod raconte la douleur de l'exil autour du voyage de la narratrice au Liban. Après la mort de son ami, elle part pour Beyrouth afin de retrouver son histoire, sa maison.
Ce roman est né d'une pulsion, d'une envie soudaine, sans doute un besoin. Après les obsèques de son ami Gabriel, mort après avoir lutté en vain contre sa maladie, la narratrice prend un billet à destination de Beyrouth. Elle entend tenir post-mortem la promesse qu'il lui avait faite, lui faire découvrir son pays natal et sa maison. Des lieux qu'il n'a jamais revus depuis son exil en France. Cet exil qui les avait tous deux rapprochés: «Nous partagions cette nécessité, vitale et impérieuse, de garder toujours un pied dehors lorsque nous foulions de nouveaux territoires.»
En arrivant à Beyrouth, elle est à la fois triste de découvrir une ville défigurée par la guerre et l'explosion du port qui ont laissé de douloureux stigmates et heureuse de humer l'air de ce pays fantasmé depuis la France et qui a gardé une part de sa beauté, de ses parfums. Peut-être aussi ce goût de l'enfance qui laisse à l'imagination la liberté de s'appuyer sur des rêves. Comme celui de Gabriel décrivant sa maison, son palais. Mais comment retrouver une construction plus imaginaire que réelle, re-construite des dizaines de fois pour son amie? Car, il y a «des maisons qui sont des ancres, des maisons matrices auxquelles s'accrocher. Des maisons-récits, des havres réels ou fantasmés vers lesquels revenir.» Pour les trouver, il faut laisser sa part au hasard et la chance guider vos pas. Elle va se personnifier dans Nassim, un chauffeur de taxi à l'optimisme chevillé au corps. Lorsqu'il s'engage sur les routes de montagne vers le village de Bhamdoun, il est sûr de parvenir à retrouver cette belle demeure. Promesse tenue, même s'il ne reste que quelques murs, quelques pierres, quelques traces de la demeure. À l'image de Gabriel, elle retourne à la poussière, ne vit plus que dans le souvenir de ceux qui ont pu la contempler.
Comme l'avait fait son père, parti trop vite, c'est avec les mots que Gabriel avait réussi à conserver la splendeur de sa maison, à adoucir son exil. Les mots qui disent la douleur de l'exil en sublimant la beauté du lieu. «Je voudrais coudre ces histoires — l’histoire d’une maison et celle d'une lettre —, assembler les pièces manquantes». Et si quelques clichés accompagnent le texte, c'est parce qu'ils réussissent, comme l'affirme la citation de W. G. Sebald en exergue du livre, à faire apparaître «sorties du néant pour ainsi dire, les ombres de la réalité, exactement comme les souvenirs qui surgissent en nous au milieu de la nuit».
C'est en creusant l'intime dans ce qu'il a de plus fort qu'Arielle Meyer MacLeod atteint l'universel. Avec une écriture toute en pudeur et en finesse, elle donne ses lettres de noblesse à une humanité qui conserve par-delà les drames un souffle de vie. Alors souffle le vent de l'espoir, des montagnes du Liban jusqu'au cœur des exilés.
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Arielle la narratrice se penche sur la disparition de deux êtres chers et aimés, son ami libanais Gabriel et son père à la lecture de documents trouvés dans des enveloppes.
Elle les a récupéré pour Gabriel lors d’une visite à Beyrouth la magnifique et la massacrée, sur les traces de sa maison natale. Pour son père, une enveloppe trouvée dans un carton dans sa cave.
Un des liens entre les deux hommes c’est l’existence de leurs secrets respectifs. Pourquoi Gabriel qui adorait le Liban n’y est jamais retourné ? Pourquoi son père avait il écrit une lettre à sa fille comme s’il allait disparaitre ? Gabriel et le père sont tout aussi charismatiques que mystérieux.
Passionnant et épuisant, Gabriel ne s’était jamais fixé ni géographiquement ni émotionnellement, gardant sa maison levantine en ligne d’horizon. Tout était éphémère comme ses sculptures.
Quel secret de famille pour la narratrice de découvrir que son propre prénom porte la trace d’un autre enfant !
Deux êtres qu’elle a mal connu mais qui l’ont aidé à se construite tout en étant enfermés dans leurs mystères.
Vues d’intérieur après destruction est une quête intime dans un théâtre d’ombres sur des paysages dévastés.
Arielle Meyer Mc Load parle avec délicatesse du deuil et des non-dits.
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