Nous vous avions parlé récemment des 6 romans finalistes sélectionnés par les membres du jury du Prix Orange du Livre en Afrique.
Cette semaine, nous vous proposons la chronique de Foua Ernest de Saint Sauveur, membre du comité de lecture ivoirien du Prix Orange du Livre en Afrique, sur le livre de Beyrouk, "Le silence des horizons", éditions Elyzad en Tunisie.
L'avis de Foua Ernest de Saint Sauveur
" L’intrigue, dans ce roman ? Un jeune homme, Nadir, sur une plage, échange des mots rudes avec son amie, Raya. Secoué par une pique de la fille, le garçon la saisit à la gorge et l’étouffe. Paniqué, Nadir s’enfuit et va en errance, loin ; très loin de ses horizons connus et ordinaires. Croyant ainsi, échapper à la justice mais aussi à ses démons familiers. D’autres horizons lointains, inconnus mais sécurisants, à ses yeux, l’accueillent : la campagne et le désert. Où, dans le pas de son ami Sidi, guide touristique, il part promener des touristes à la recherche du dépaysement et du rêve, dans le grand Sahara.
Ses rêves à lui, s’évanouissent, d’une part, dans la culpabilité d’avoir ôté la vie à Raya, la fille du Cheikh, figure éminente de la région et, d’autre part, dans la honte d’être l’héritier d’un père couvert de malédiction. La fin de ses errances (hors de soi, à trouver un sens à la vie et à la notion d’honneur ; et dans le pur mais insaisissable horizon du désert saharien) arrive bientôt, au bout des 183 pages du récit.
Avec cette histoire d’une simplicité époustouflante, Beyrouk a produit une œuvre majeure, de haute volée. Une œuvre portée, de part en part, par une douce poéticité, une littérarité lumineuse, un souffle puissant de spiritualité et d’humanité : tous atouts qui, de tout temps, ont distingué les Maîtres de l’Art narratif. Et pourtant, Le silence des horizons se présente au lecteur sans porter aucunement de fard. Voir, la première de couverture d’un manque désolant d’éclat et d’attrait. C’est que la richesse du « produit » se trouve ailleurs ; précisément, dans le « ventre » de l’œuvre et au fil d’une narration enluminée, de bout en bout, par la magie du dire. Le dire, serein, mature, avenant. Le dire, psychanalytique, profond. Le dire, éclairé, édifiant, qui donne à prendre la mesure de la vie, des êtres et des choses.
Stendhal disait du roman que, c’était un miroir que l’on promenait le long du chemin. Selon cette vérité, on peut penser que, depuis le siècle de l’auteur de Le rouge et le noir, les romanciers qui ont excellé et se sont distingués, ce sont ceux qui, du chemin, ont su révéler les angles les plus éloquents, les perspectives les plus lumineuses et les variations les plus saisissantes. Mais il faut en convenir aujourd’hui : la vérité stendhalienne a vécu ; ou plus exactement, s’est reconfigurée. Au fil des siècles et des figures de littérarité, l’excellence n’attend plus de ses élus du champ littéraire, que de savoir seulement promener habilement leur miroir le long du chemin. Il leur faut, désormais, savoir rentrer dans le chemin, lui-même, aussi bien que dans les êtres et les choses qui parcourent et parsèment le chemin. Et, ressortir de ces ensembles animés les grandeurs, les richesses, les noblesses, les dimensions et les vérités à même d’enrichir la vie, l’âme et le cœur.
Oui, avec Le silence des horizons, Beyrouk, suave narrateur, psychanalyste pointu des vies et des formes mais encore, on peut le dire, âme engagée pour le salut des âmes, a atteint à cette hauteur sublime de Maître de l’Art.
Merci à Foua Ernest de Saint Sauveur, membre du comité de lecture ivoirien du Prix Orange du Livre en Afrique" !
Très intéressant le thème et découvrir pourquoi se pere et mêler au contradictions et cette violence au début du livre faire face à ses démons familiers , une histoire très très prenante envie de le découvrir surtout