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Kate Tempest : l’uppercut de la rentrée littéraire

"Ecoute la ville tomber" une petite bombe littéraire !

Kate Tempest : l’uppercut de la rentrée littéraire

On a souhaité démarrer la rentrée littéraire avec ce qui est à nos yeux une petite bombe littéraire. Elle s’appelle Kate Tempest, elle vient du Sud Est de Londres, les quartiers populaires de la capitale du Royaume Uni, et les amateurs de rap connaissent déjà bien cette rousse à la poésie déchiquetée. Après deux albums produits par Dan Carey, le producteur des Franz Ferdinand, trois pièces de théâtre et un recueil de poésie, Les Nouveaux Anciens (éditions de l’arche) en octobre 2017, elle publie ainsi son premier roman, Ecoute la ville tomber (Rivages).

 

Le roman commence par la cavale de trois des protagonistes de l’histoire, Beckie, Harry, Léon. Beckie est une très jolie femme qui voudrait devenir danseuse. Elle passe des castings en voyant défiler devant elle des filles plus jeunes et plus douées, et gagne sa vie en pratiquant des massages érotiques. Harry est une garçonne aux costumes un peu grands. Avec son ami d’enfance Léon, ils sont dealers haut de gamme. Harry aurait pu travailler à la City mais plutôt que s’ennuyer dans un bureau, elle préfère dealer, le business de la cocaïne est en plein essor chez  les cadres sup. Malgré une réputation sans tache, et une filière impeccable, sa petite entreprise va rapidement connaître de sérieux remous.

Tous trois partent se réfugier en France. Pourquoi ? On l’apprendra en repartant un an plus tôt dans le Sud-Est londonien, où l’on fait connaissance avec une kyrielle de personnages : Pete, le frère de Harry, leurs parents, la famille de Beckie qui recherche son père, emprisonné pour pédophilie mais dont les livres politiques subversifs sont interdits. Et l’on retrouvera des connexions inattendues entre ces personnages, dans le bar même où travaille Beckie.

 

Admirée par Lola Lafon et suivie de près par Virginie Despentes et Don De Lillo, Kate Tempest est une raconteuse d’histoires : qu’elle écrive des chansons, du théâtre ou un roman, c’est le même univers qu’elle charrie, celui d’une jeunesse qui lui ressemble, qui a digéré l’ultralibéralisme anglo-saxon et qui, contrairement à la vision de Ken Loach dans ses films, fait simplement avec.

La grande originalité de cette représentante d’une génération Y qui fait ses griffes dans les formes de l’écrit et de l’oralité, c’est peut être d’avoir évacué tout propos ou perspective politique dans ce qui est malgré tout un vrai roman social. Ce n’est pas une critique de l’ultra-libéralisme, mais plutôt un roman sur la vie, une fois les illusions perdues.

Écoute la ville tomber carbonise l’individualité et permet la naissance d’un nouveau romantisme. L’histoire se narre du point de vue des liens qu’entretiennent les personnages les uns avec les autres, passe par le biais des corps et des émotions, regarde comment ils s’aiment et agissent, dans une ville gentrifiée, grevée par la drogue, la lutte des classes larvée et une pauvreté criante.

 

Ce premier roman de Kate Tempest n’est ni optimiste, ni pessimiste, c’est un livre intense et tendre, écrit dans une langue simple, limpide, sans fioriture. Il y a dans l’écriture de cette jeune femme une puissance dépouillée qui force le respect et rend son roman complètement magnétique.

 

Une chronique lecteurs.com à retrouver sur Cnews 

Ecoute la ville tomber, Rivages, traduit de l’anglais par Madeleine Nasalik 

 

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